Cour de cassation, Chambre sociale, 1 juillet 2020, 18-19.941

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2020-07-01
Cour d'appel de Paris
2018-06-26

Texte intégral

SOC. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 1er juillet 2020 Cassation partielle sans renvoi Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 518 F-D Pourvoi n° X 18-19.941 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER JUILLET 2020 La société BPI, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° X 18-19.941 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant à M. K... E..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Depelley, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société BPI, de Me Isabelle Galy, avocat de M. E..., après débats en l'audience publique du 19 mai 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Depelley, conseiller référendaire rapporteur, Mme Marguerite, conseiller référendaire, ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application des articles R. 431-7 et L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur le moyen

unique :

Vu

l'article 461 du code de procédure civile ; Attendu que les juges, saisis d'une requête en interprétation d'une précédente décision, ne peuvent sous le prétexte d'en déterminer le sens, modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

que, dans un litige opposant M. E... à son ancien employeur, la société BPI, la cour d'appel a rendu un arrêt, le 13 juin 2017, condamnant cette dernière à payer au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité de rupture contractuelle, sans préciser si ces sommes devaient s'entendre en net ou en brut ; que, saisie d'une requête en interprétation de cet arrêt, la cour d'appel l'a rectifié en disant que lesdites sommes, à caractère indemnitaire, étaient nettes de tous prélèvements sociaux ;

Qu'en statuant ainsi

, alors que son précédent arrêt ne s'était pas prononcé sur l'imputation des cotisations et des contributions sociales, ce dont il résultait que l'employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur les condamnations prononcées, la cour d'appel qui, sous le couvert d'une interprétation, a modifié sa précédente décision, a violé le texte susvisé ;

Et vu

l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS

, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rectifie l'arrêt rendu le 13 juin 2017, entre les parties, en ce sens que dans le dispositif de cet arrêt sera insérée la mention selon laquelle les sommes de 120 000 euros allouées à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 300 000 euros à titre d'indemnité de rupture contractuelle sont nettes de tous prélèvements sociaux, l'arrêt rendu le 26 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Rejette la requête en interprétation présentée par la société BPI ; Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société BPI. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rectifié l'arrêt N° S 14/02686 rendu par cette chambre de la cour dans la procédure opposant K... E... à la société BPI et ayant donné lieu à l'arrêt rendu le 13.06.2017 et d'AVOIR en conséquence dit que dans le dispositif de cet arrêt sera insérée la mention suivante : "Confirme le jugement rendu le 17.01.2014 par le Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 6 en ce qu'il a déclaré le licenciement de K... E... sans cause réelle et sérieuse et en qu'il a condamné la société à lui verser la somme de 500 (cinq cents) € en vertu de l'article 700 du CPC, mais l'infirme sur les montants accordés à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité contractuelle de licenciement " Condamne en conséquence la Société BPI à payer à K... E... les sommes de : - 120.000 (cent vingt mille) € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 300.000 (trois cent mille) € à titre d'indemnité de rupture contractuelle ", le reste sans changement, ces sommes à caractère indemnitaire sont nettes de tous prélèvements sociaux » AUX MOTIFS QUE : « Aucune mention du jugement rendu le 17.01.2014 par le conseil des prud'hommes de Paris infirmé partiellement par l'arrêt rendu le 13.06.2017 par la cour d'appel de Paris ne prévoit que des sommes pourraient être déduites des condamnations prononcées et par ailleurs l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse a un caractère indemnitaire ; par suite les montants litigieux des condamnations prononcées doivent être entendues nettes au profit du salarié. La cour n'a pas réformé la décision rendue par le premier juge concernant l'allocation d'une somme de 500 € au titre de l'article 700 du CPC qu'il convient par suite de confirmer ». 1°/ ALORS QUE le juge saisi, sur le fondement de l'article 461 du code de procédure civile, d'une requête en interprétation d'une précédente décision, ne peut, sous prétexte d'en déterminer le sens, modifier les dispositions de celle-ci ; qu'en rectifiant son précédent arrêt de sorte à ce qu'il soit précisé que les sommes mises à la charge de l'employeur étaient exprimées en net et non en brut quand cet arrêt ne s'était pas prononcé sur l'imputation des charges sociales dues sur les sommes allouées au salarié, la cour d'appel a modifié les dispositions de son précédent arrêt et a ainsi violé l'article 461 du code de procédure civile ; 2°/ ALORS QUE le juge saisi d'une requête en interprétation, ne peut, sans modifier l'objet du litige, rectifier d'office la décision qu'il a précédemment rendue sur le point ayant fait l'objet de la demande d'interprétation ; que la cour d'appel qui a rectifié son arrêt quand il lui était demandé de l'interpréter, a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble les articles 461 et 462 du même code. 3°/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le juge ne peut, sous prétexte de rectifier sa décision, modifier les droits et obligations que les parties tirent de celle-ci ; qu'en rectifiant le dispositif de son précédent arrêt, afin de préciser que les condamnations étaient nettes de toute charge sociale, quand cet arrêt ne s'était prononcé ni dans ses motifs, ni dans son dispositif sur l'imputation des charges sociales, la cour d'appel, qui a modifié les droits et obligations des parties, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 462 du code de procédure civile.