Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 12 février 2002, 99-15.693

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2002-02-12
Cour d'appel de Rennes (1re Chambre, Section B)
1999-03-25

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le pourvoi formé par M. Bernard X..., demeurant ..., agissant ès qualités de liquidateur de la liquidation judiciaire de M. Marcel Y..., en cassation d'un arrêt rendu le 25 mars 1999 par la cour d'appel de Rennes (1re Chambre, Section B), au profit : 1 / du Crédit lyonnais, société anonyme dont le siège est ..., 2 / de la société Elf Atochem, société anonyme dont le siège social est Usine de Mont à Argagnon, 64300 Orthez, 3 / de la Banque populaire de Bretagne Atlantique, société coopérative de Banque populaire, dont le siège est 12, cours de la Bôve, 56100 Lorient, 4 / de la société Rhodia chimie, société anonyme, nouvelle dénomination de la société anonyme Rhône Poulenc chimie, dont le siège est ..., défenderesses à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 18 décembre 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Boinot, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, Mmes Garnier, Betch, conseillers, Mmes Mouillard, Champalaune, Gueguen, M. Sémériva, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Boinot, conseiller référendaire, les observations de Me Blondel, avocat de M. X..., ès qualités, de la SCP Vier et Barthélémy, avocat du Crédit lyonnais, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à M. X..., en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. Y..., de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi en tant que dirigé contre la SA Elf Atochem, la Banque populaire de Bretagne Atlantique et la SA Rhodia chimie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Rennes, 25 mars 1999), que la société CAO, titulaire d'un compte courant au du Crédit lyonnais, a cédé à cette banque, le 22 octobre 1987, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, deux créances qu'elle détenait sur la société Atochem et sur la société Rhône Poulenc chimie, aux droits de qui se trouve aujourd'hui la société Rhodia chimie ; que M. Y..., gérant de cette société, s'en était porté caution le 9 février 1985 à concurrence de 300 000 francs envers le Crédit lyonnais ; que la société CAO a été mise en redressement judiciaire le 3 février 1988 ; que le Crédit lyonnais a régulièrement déclaré sa créance entre les mains du représentant des créanciers et a judiciairement demandé à M. Y... d'exécuter ses engagements ; que M. Y... a appelé en garantie la société Atochem ; qu'après la mise en liquidation judiciaire personnelle de M. Y... le 24 septembre 1997, le Crédit lyonnais a régulièrement déclaré sa créance entre les mains de M. X..., liquidateur de M. Y... ;

Sur le premier moyen

, pris en ses deux branches : Attendu que M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de M. Y..., fait grief à l'arrêt d'avoir admis la créance du Crédit lyonnais au passif de la liquidation judiciaire de M. Y..., alors, selon le moyen : 1 / qu'ayant constaté que, faute de signature par le cédant du bordereau de cession de créance professionnelle litigieux, ladite cession n'avait pu produire d'effet et que la créance cédée n'était pas rentrée dans le patrimoine du Crédit lyonnais, ès qualités de cessionnaire, il en résultait nécessairement que celle-ci ne pouvait disposer à ce titre d'aucune créance contre le prétendu cédant, qui n'aurait été que garant solidaire du paiement des créances cédées ;

d'où il suit

qu'en statuant comme elle le fait, la cour d'appel ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations et viole les articles 1er, 1 et 2 , de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 ; 2 / qu'en toute hypothèse, commet une faute de nature à engager sa responsabilité le banquier cessionnaire d'une créance professionnelle dans les termes de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 qui agit sur la foi d'un bordereau manifestement irrégulier, comme dépourvu de la signature du cédant, et le notifie tel quel au débiteur cédé ; qu'il appartient en effet au banquier cessionnaire, professionnel du crédit, et seul bénéficiaire possible d'une cession de créance professionnelle, de s'assurer de la régularité formelle de l'acte de cession de créance, ou de le faire régulariser par le cédant, ou, le cas échéant, de refuser de procéder à l'opération de crédit en cas de défaut de régularisation préalable par le cédant ; d'où il suit qu'en statuant comme elle le fait, après avoir constaté que le bordereau litigieux était manifestement irrégulier en la forme, car ne comportant pas la signature du cédant, la cour d'appel ne tire toujours pas les conséquences légales de ses propres constatations et viole l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas fondé sa condamnation à paiement sur la garantie du cédant résultant des articles 1er et 2 de la loi du 2 janvier 1981, devenus les articles L. 313-23 et L. 313-25 du Code monétaire et financier, mais, par des motifs non critiqués, sur le fait que le Crédit lyonnais n'avait pas reçu de contrepartie à l'avance de fonds faites à la société CAO et avait régulièrement déclaré sa créance au redressement judiciaire de cette société, a pu décider que le Crédit lyonnais était fondé à se retourner contre la caution ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Sur le second moyen

: Attendu que M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de M. Y..., fait grief à l'arrêt d'avoir débouté M. Y... de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre le Crédit lyonnais pour avoir procédé à une notification irrégulière de cession de créance à la société Rhodia chimie, alors, selon le moyen, que, si la notification d'une cession de créance professionnelle n'est qu'une faculté pour la banque cessionnaire et l'abstention de celle-ci à y procéder ne peut être invoquée par les cautions du cédant comme constitutive de faute à leur égard, constitue en revanche une faute opposable par la caution l'irrégularité affectant l'acte de notification à laquelle la banque décide de procéder ;

d'où il suit

qu'en statuant comme elle le fait, après avoir constaté que le Crédit lyonnais avait décidé de procéder à la notification de la cession de la créance Rhône Poulenc et que celle-ci était irrégulière, la cour d'appel ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations et viole l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu que la notification des cessions étant, au regard de l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981, devenu l'article L. 313-28 du Code monétaire et financier, une faculté pour la banque, l'irrégularité commise par celle-ci en procédant à cette notification ne peut être invoquée par la caution du cédant comme constitutive de faute à son égard ; que l'arrêt a, à bon droit, statué en ce sens ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du Crédit lyonnais ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille deux.