Cour de cassation, Première chambre civile, 14 janvier 2015, 13-28.069

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2015-01-14
Cour d'appel de Rouen
2012-12-13

Texte intégral

Sur le moyen

unique, pris en ses deux branches :

Vu

l'article 815-9 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, et l'article 1315 du même code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, qu'au cours de l'instance en divorce de M. X... et de Mme Y..., qui s'étaient mariés sans contrat préalable, un juge aux affaires matrimoniales a attribué au mari la jouissance de l'immeuble commun constituant le domicile conjugal ; qu'après le prononcé du divorce, par un arrêt du 25 avril 2002, Mme Y... a demandé qu'une indemnité soit mise à la charge de son ex-époux à compter de cette date, au titre de l'occupation privative du bien indivis ; Attendu que, pour débouter Mme Y... de sa demande, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. X... justifie avoir bénéficié d'un logement de fonction au Havre à compter du 7 février 2000, qu'il n'a pas occupé le logement litigieux et que l'épouse ne démontre pas ne pas avoir pu accéder au pavillon après le prononcé du divorce le 25 avril 2002 et que si M. X... s'est opposé à la remise des clefs à son épouse, c'est qu'il estimait avoir, lui aussi, la jouissance de ce bien ;

Qu'en statuant ainsi

, alors que l'indemnité que le texte susvisé met, sauf convention contraire, à la charge de l'indivisaire en contrepartie du droit pour lui de jouir privativement d'un bien indivis est due, même en l'absence d'occupation effective, et qu'il incombait au mari de prouver avoir remis à la disposition de l'indivision le bien dont la jouissance lui avait été attribuée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, mais seulement en celles de ses dispositions ayant débouté Mme Y... de sa demande tendant au paiement par M. X... d'une indemnité pour l'occupation privative de l'immeuble indivis, l'arrêt rendu le 13 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la SCP Delaporte, Briard et Trichet la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme Y... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande d'indemnité d'occupation formulée à l'égard de M. X... ; Aux motifs que « Jean-Marc X... a bénéficié à titre gratuit, en application de l'ordonnance de mise en état du 21 décembre 1998, de la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal et ce jusqu'au prononcé définitif du divorce, soit l'arrêt de la cour d'appel du 25 avril 2002 ; que Fabienne Y... soutient que Jean-Marc X... doit une indemnité d'occupation à compter de cette date jusqu'à la vente effective de l'immeuble, soit le 18 janvier 2011 ; que le rapport d'expertise établi, à la demande du juge aux affaires familiales par décision du 23 octobre 2009, par l'expert François Z... a fixé la valeur locative mensuelle de l'immeuble, par conclusions du 20 avril 2010, à la somme mensuelle de 750 ¿ ; qu'en conséquence l'appelante réclame dans le cadre des opérations de liquidation partage une moitié d'indemnité d'occupation du 25 avril 2002 au 18 janvier 2011 soit 105 x 750 : 2 = 39 375,25 ¿ ; qu'en application de l'article 815-9 du Code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ; que Jean-Marc X... allègue avoir bénéficié d'un logement de fonction au Havre à compter du 7 février 2000 et ajoute que Fabienne Y... ne rapporte aucunement la preuve de ce qu'il aurait occupé de manière privative ce logement au-delà du prononcé définitif du divorce ; que Fabienne Y... ne conteste nullement que son ex-mari résidait en réalité dans un autre domicile mais prétend qu'il bénéficiait toutefois de la jouissance de l'ex domicile conjugal postérieurement au jugement de divorce ; qu'à l'appui de cette demande, Fabienne Y... argue d'une procédure de référé devant le président du tribunal de grande instance du Havre par laquelle elle avait demandé un double des clés du domicile sous astreinte ; que ce magistrat, par décision du 18 août 2006, l'en avait déboutée pour les motifs suivants "dans ces conditions et M. Jean-Marc X... ayant obtenu la jouissance du bien immobilier au cours de la procédure de divorce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle de Mme Fabienne Y... tendant à la remise du double des clés sous astreinte" ; que Fabienne Y... souligne en outre que lors des opérations d'expertise diligentées par M. Z... en 2010, une remorque appartenant à Jean-Marc X... se trouvait encore dans le garage ; que l'indemnité que l'articles 815-9 du Code civil met sauf convention contraire, à la charge de l'indivisaire en contrepartie du droit pour lui de jouir privativement d'un bien indivis est due, même en l'absence d'occupation effective des lieux ; qu'en ce qui concerne le motif invoqué par Fabienne Y... à propos de l'ordonnance en la forme des référés du 18 août 2006 pour l'obtention des clés, il convient de relever que cette décision faisait référence à la jouissance par Jean-Marc X... du domicile conjugal durant les mesures provisoires qui ont pris fin lors du prononcé définitif de la décision de divorce par arrêt du 25 avril 2002 ; que Fabienne Y... ne démontre nullement n'avoir pu avoir accès au pavillon postérieurement au 25 avril 2002 ; que si Jean-Marc X... s'est opposé à la remise des clés à Fabienne Y... c'est qu'il estimait avoir lui aussi la jouissance de ce bien ; qu'ainsi, il n'est nullement prouvé que Jean-Marc X... bénéficiait de la jouissance exclusive de l'ancien domicile conjugal ; qu'en conséquence la Cour, en confirmant le jugement sur ce point, déboutera Fabienne Y... de sa demande d'indemnité d'occupation » (arrêt attaqué, pages 4 et 5) ; Alors, premièrement, que l'indivisaire à qui a été provisoirement attribuée, à titre gratuit, la jouissance privative d'un immeuble appartenant indivisément aux époux est, après le prononcé définitif du divorce, redevable d'une indemnité jusqu'à ce qu'il soit justifié de la restitution de la jouissance de cet immeuble à l'indivision ; que pour rejeter la demande d'indemnité d'occupation, l'arrêt s'est borné, après avoir relevé que M. X... a bénéficié à titre gratuit de la jouissance du domicile conjugal jusqu'au prononcé définitif du divorce le 25 avril 2002, à retenir, d'une part, que Mme Y... ne démontre pas qu'il lui ait été impossible d'accéder à l'immeuble passé cette date et, d'autre part, que si M. X... s'est opposé à la remise des clefs à son ancienne épouse, c'était parce qu'il estimait en avoir également la jouissance ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que M. X... avait remis l'immeuble à la disposition de l'indivision post-communautaire une fois le divorce devenu irrévocable, la cour d'appel a privé sa décision au regard de l'article 815-9 du code civil ; Alors, secondement, qu'il incombe à l'indivisaire qui a obtenu le droit de jouir privativement de l'immeuble indivis de rapporter la preuve que ce bien a été remis à disposition de l'indivision pour que l'indemnité cesse d'être due ; que pour rejeter la demande d'indemnité d'occupation, l'arrêt retient, après avoir relevé que M. X... a bénéficié à titre gratuit de la jouissance du domicile conjugal jusqu'au prononcé définitif du divorce le 25 avril 2002, que Mme Y... ne démontre pas n'avoir pu accéder au pavillon après cette date ; qu'en statuant, quand il appartenait à M. X..., qui s'était provisoirement vu attribuer la jouissance privative de l'immeuble indivis, de justifier avoir restitué à l'indivision la jouissance de cet immeuble, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil.