Cour de cassation, Chambre sociale, 7 mai 2003, 01-41.473

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2003-05-07
Cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale Cabinet B)
2001-01-31

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Attendu que M. X..., qui avait été engagé en 1987 comme directeur de l'organisation et des systèmes informatiques et techniques par la société Les coopérateurs de Champagne (LCC), est passé en 1991 au service de la société Champenoise Grossiste (SCG), filiale de la précédente assurant la gestion d'entrepôts et de services communs aux sociétés du groupe LCC ; que le groupe Promodès ayant pris le contrôle des filiales de la société LCC, celle-ci a décidé d'assurer elle-même, à compter du 1er janvier 1997, les travaux informatiques et comptables qu'elle confiait jusqu'alors à la société SCG, dont M. X... était devenu responsable du service informatique ; que ce salarié a été informé du transfert de son contrat de travail à la société LCC, qui l'a ensuite licencié ; Sur la fin de non-recevoir opposée par les sociétés Promodès et SCG : Attendu que les sociétés Promodès et SCG prétendent que les demandes de M. X... étaient irrecevables, au regard de l'article R. 516-1 du Code du travail, dès lors qu'une précédente action avait été exercée par ce salarié devant le conseil de prud'hommes, qui dérivait du même contrat de travail ; Mais attendu que la fin de non-recevoir tirée de la règle de l'unicité de l'instance, qui n'est pas d'ordre public, ne peut être soulevée pour la première fois devant la Cour de Cassation ; Et attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni de la procédure, que cette fin de non-recevoir ait été opposée devant les juges du fond ; Qu'elle est en conséquence irrecevable ;

Sur le second moyen

:

Attendu que M. X... fait grief à

l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts dirigée contre la société Promodès alors, selon le moyen, qu'en affirmant que le courrier du 24 mars 1992 ne comportait aucune promesse, n'annonçait que la définition "éventuelle" d'un dédommagement et n'envisageait le maintien des responsabilités du salarié que dans le cadre de son contrat de travail auprès de la société SCG, alors qu'il ressortait des termes clairs et précis de ce courrier que M. Y..., directeur général adjoint du groupe Promodès, s'était comporté à l'égard du salarié comme son employeur, déterminant les tâches qui lui incombaient, en contrôlant l'exécution et décidant de la rémunération et des primes qu'il devait percevoir, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette lettre, en violation de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu

que M. X... ne demandait devant les juges du fond que l'indemnisation d'un préjudice causé par le refus de la société Promodès, d'exécuter un engagement de reclassement dans le groupe Promodès, pris dans la lettre du 24 mars 1992 ; que le moyen, qui fait grief à la cour d'appel de n'avoir pas dit que la société Promodès s'était comportée dans cette lettre en employeur de M. X..., est inopérant ;

Mais sur le premier moyen

:

Vu

l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;

Attendu que, pour débouter

M. X... de la demande qu'il formait à l'encontre de la société SCG, en sa qualité d'employeur, la cour d'appel a retenu que les services informatiques, dont ce salarié avait la responsabilité disposaient d'un matériel et d'un personnel propres, tendaient à des résultats spécifiques et avaient une finalité propre ; que les prestations informatiques de LCC traitées par le service informatique de SCG représentaient une part non négligeable de l'activité de ce service, (30 à 35 % selon Pierre Z..., celui-ci indiquant travailler à 50 % pour LCC, tandis que Michel A... travaillait à 80 % et chacun des deux autres membres du personnel à 10 %) ; que la reprise en gestion directe de ses activités informatiques par la société LCC avec, pour assurer la pérennité des emplois, transfert d'une partie du personnel et des éléments informatiques (hard et soft) (matériels et licences) et avec poursuite des activités dans un premier temps dans les mêmes lieux et les mêmes conditions, relève de l'application de l'article L. 122-12, peu important que la cession de l'activité n'ait pas porté sur la totalité du service ; qu'il y a eu reprise, donc cession par SCG, d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments permettant l'exercice d'une activité économique poursuivant un objectif propre ; qu'il y a ainsi eu transfert du contrat de travail de M. X... de SCG à LCC dans les conditions de l'article L. 122-12 ; que d'ailleurs M. X..., qui n'a jamais protesté lorsqu'il en a été avisé par lettre du 23 janvier 1997, l'a admis puisqu'il a sollicité du conseil de prud'hommes non pas qu'il déclare le licenciement nul et sans effet mais qu'il condamne LCC à lui payer des indemnités de rupture, reconnaissant ainsi LCC comme son employeur ; que dès lors, il est mal fondé à demander sa réintégration auprès de SCG et le paiement de salaires à cette société ;

Attendu, cependant

, que le transfert de l'activité d'une entreprise ne peut entraîner l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail et la poursuite des contrats de travail des salariés affectés à cette activité avec le cessionnaire que s'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations qu'une partie seulement des activités de la société SCG avait été reprise par la société LCC, l'autre partie continuant à être exercée par la société SCG pour le compte de sociétés dépendant du groupe Promodès, en sorte que l'identité dont relevait l'activité de prestation de services n'avait pas été maintenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 31 janvier 2001 par la cour d'appel d'Amiens, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes dirigées contre la société SCG ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ; Condamne la société SCG, la société Promodès France aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société SCG, la société Promodès France ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille trois.