Tribunal de grande instance de Paris, 6 juin 2013, 2012/08312

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2012/08312
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : L'HOMME MODERNE
  • Classification pour les marques : CL02 ; CL0 3 ; CL0 4 ; CL0 5 ; CL06 ; CL07 ; CL08 ; CL09 ; CL10 ; CL11 ; CL12 ; CL13 ; CL14 ; CL15 ; CL16 ; CL18 ; CL19 ; CL20 ; CL21 ; CL22 ; CL24 ; CL25 ; CL26 ; CL27 ; CL28 ; CL31 ; CL34 ; CL35 ; CL38 ; CL39 ; CL41 ; CL42
  • Numéros d'enregistrement : 1696065 ; 93492476
  • Parties : REDER SAS / BULL TRADE BEAR SARL ; GROUPON SAS

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2014-05-16
Tribunal de grande instance de Paris
2013-06-06

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 3e chambre 1re section N° RG : 12/08312 JUGEMENT rendu le 06 Juin 2013 DEMANDERESSE Société REDER, SAS [...] représentée par Me Jean-Marc FEDIDA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0485 DÉFENDERESSES Société BULL TRADE BEAR, SARL [...] représentée par Me Antoine CHÉRON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2536 Société GROUPON, SAS [...] représentée par Maître Emmanuel TRICOT de la SELARL W & S, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0215 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice Présidente Thérèse A. Vice Présidente Mélanie BESSAUD, Juge assistées de Léoncia BELLON, Greffier DÉBATS A l'audience du 13 Mai 2013 tenue publiquement devant Marie-Christine C, Thérèse ANDRIEU, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seules l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile. JUGEMENT Prononcé par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort EXPOSÉ DU LITIGE La société REDER a pour activité la vente de produits et gadgets sur le site internet www.lhommemoderne.fr. Elle est titulaire des marques françaises suivantes : - la marque semi-figurative « L'HOMME MODERNE », déposée le 17 novembre 1993, par la société REDER, sous le n° 1696065 enregistrée le 30.09.1991 et régulièrement renouvelée dans les classes 04,05,06, 08,09,11,13,14,15,16,18,20,21,24,27,28,34,35,40,42,43 et 44. - la marque verbale « L'HOMME MODERNE » déposée le 17.11.1993 par la société SERPIE, sous le n° 93492476, et régulièrement renouvelée dans les classes : 02,03,04,05,06,07,08,09, 10,11,12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 20, 21, 22, 24, 25, 26, 27, 28 31, 34, 35, 38, 39,41,42, la marque ayant été cédée à la société REDER le 6.02.2009. La société BULL TRADE BEAR est une société spécialisée dans la vente de produits sur internet. Elle indique commercialiser ses produits sur le site www.objetmoderne.com qu'elle édite mais également sur le site de vente groupé www.groupon.fr. édité par la société GROUPON FRANCE Ayant découvert et estimé que la société BULL TRADE BEAR commercialisait sur internet, avec la complicité de la société GROUPON, des produits identiques aux siens sous la dénomination « L'objet moderne », la société REDER a fait dresser un procès-verbal de constat d'huissier le 14 avril 20 i 2. C'est dans ces conditions que la société REDER a fait assigner par exploit d'huissier en date du 21 mai 2012, les sociétés BULL TRADE BEAR et GROUPON FRANCE en contrefaçon de marque ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire. Dans ses dernières e-conclusions du 8 janvier 2013, la société REDER a demandé au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de : - DIRE ET JUGER la détention, l'offre à la vente et la vente par les sociétés GROUPON et BULL TRADE BEAR de produits, sans le consentement de la société REDER constituent la contrefaçon des marques précitées au sens des dispositions légales susvisées ; - DIRE ET JUGER surplus que les sociétés GROUPON et BULL TRADE BEAR ont commis des actes de concurrence déloyale par parasitisme au préjudice de la société REDER ; - INTERDIRE conséquence aux sociétés GROUPON et BULL TRADE BEAR de mettre dans le commerce, sans le consentement de la société REDER des produits présentés sous la marque « L'homme moderne » et ce, sous astreinte définitive de 5.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision à intervenir ; - INTERDIRE, plus généralement, aux sociétés GROUPON ET BULL TRADE BEAR de faire usage des marques de la société REDER sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, sous astreinte définitive de 5.000 euros par infraction commise à compter de la signification de la décision à intervenir ; - CONDAMNER les sociétés GROUPON ET BULL TRADE BEAR à verser à la société REDER les sommes suivantes: * 150.000 euros pour l'atteinte à la marque dénominative, * 150.000 euros pour l'atteinte à la concurrence déloyale, * 50.000 euros pour l'atteinte à la marque, - DIRE ET JUGER la demande la société BULL TRADE BEAR en déchéance des marques « L'Homme Moderne » pour défaut d'intérêt à agir et, par extraordinaire, l'en débouter ; - ORDONNER remise de tous les articles contrefaisants aux demanderesses en vue de leur destruction, aux frais solidaires des sociétés GROUPON ET BULL TRADE BEAR et sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir ; - ENJOINDRE sociétés GROUPON ET BULL TRADE.BEAR d'avoir à cesser la commercialisation pouvant être concernée par le dépôt effectué par la société REDER ; - CONDAMNER outre, les sociétés GROUPON ET BULL TRADE BEAR à payer à la société REDER » la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Au soutien de ses prétentions, la société REDER estime que la société BULL TRADE BEAR n'a pas d'intérêt réel, actuel et légitime à agir en déchéance des droits de la demanderesse dans la mesure où elle n'a aucun projet effectif d'exploiter les marques litigieuses et qu'en tout état de cause, les produits proposés depuis 1985 par la marque « L'Homme Moderne », soit plus de 25.000 articles en stock, recoupent la totalité des segments décrits dans les marques. En outre, la société REDER fait valoir, sur le fondement de l'article L.713-3 du code de propriété intellectuelle : - que l'association des termes « L'Homme » et « Moderne » constitue une marque évocatrice, protégeable et protégée, permettant au consommateur d'identifier les produits visés au dépôt, - que l'étude comparée des catalogues de « L'Homme Moderne » d'une part, et des constats réalisés sur le site commercialisant les produits du signe «L’Objet Moderne» d'autre part, atteste que les produits proposés sont bien identiques, à tout le moins similaires et visent une seule et même clientèle, via un service notamment de vente à distance par internet, - qu'il existe un risque de confusion entre les signes en cause du fait que, visuellement, les deux signes sont constitués de deux mots et produisent une physionomie proche, source de confusion pour le consommateur ; phonétiquement, les signes sont dominés par la même sonorité finale avec le terme « moderne » et que le rythme de diction est également identique, puisqu'il est composé de deux mots et laisse au consommateur une impression de similitude, - que ce risque de confusion est corroboré par des témoignages émis par des internautes sur les sites www.leguide.com www.lcsarnaques.com. qui sont antérieurs à la demande introductive d'instance. Elle invoque par ailleurs, à titre cumulatif, une action en parasitisme consistant à profiter de la notoriété et des importants efforts d'investissements en matière de publicité réalisés par la société REDER, - qu'il a été constaté que les sociétés GROUPON et BULL TRADE BEAR utilisent la dénomination « Objet Moderne » et commercialisent des objets identiques à ceux vendus par la demanderesse. Enfin, elle précise que la marque « L'homme moderne » est une marque notoire ainsi qu'en témoignent la diffusion du catalogue sous ce nom et les éléments relatifs à son chiffre d'affaires, aux investissements réalisés en terme de publicité et au nombre de colis expédiés chaque année. Dans ses dernières e-écritures notifiées le 21 mars 2013, la société BULL TRADE BEAR a demandé au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de : - DEBOUTER société REDER de l'ensemble de ses demandes, - RECEVOIR société BULL TRADE BEAR en toutes ses demandes, fins et prétentions, Ainsi : - DIRE ET JUGER la société BULL TRADE BEAR en utilisant le signe OBJET MODERNE n'a commis aucun acte de contrefaçon des marques L'HOMME MODERNE n° 93 492 476 et n° 1 696 065, - DIRE ET JUGER la société BULL TRADE BEAR n'a commis aucun, acte parasitaire, - DIRE ET JUGER la société BULL TRADE BEAR n'a pas commis d'atteinte aux marques L'HOMME MODERNE n°93492476 et n° 1696065. A titre reconventionnel, -DECLARER société REDER déchue de ses droits pour défaut d'exploitation sur l'ensemble des produits et services visés à l'enregistrement des marques suivantes: * La marque française verbale « L'HOMME MODERNE » déposée le 17 novembre 1993 sous le numéro 93492476 dans les classes 02 ; 03 ; 04 ; 05 ; 06 ; 07 ; 08 ; 09 ; 10 ; 11 ; 12 ; 13 ; 14 ; 15 ; 16 ; 18 ; 19 ; 20; 21 ; 22 ; 24 ; 25 ; 26 ; 27 ; 28 ; 31 ; 34 ; 35 ; 38 ; 39 ; 41 et 42 ; * La marque française semi-figurative « L'HOMME MODERNE » déposée le 29 novembre 1995 sous le numéro 1696065 en classes 04 ; 05 ; 06 ; 08 ; 09 ; 11 ; 13 ; 14 ; 15 ; 16 ; 18 ; 20 ; 21 ; 24 ; 27 ; 28 ; 34; 35; 40; 41; 42; 43; 44.

En conséquence

: - CONDAMNER société REDER à verser à la société BULL TRADE BEAR la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - CONDAMNER société REDER aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître C, Avocat au Barreau de Paris. La société BULL TRADE BEAR fait valoir qu'il n'y pas de contrefaçon des marques de la demanderesse aux motifs : - que la comparaison des produits ou services n'est aucunement identique ni similaire puisque l'activité de la société BULL TRADE BEAR est le commerce de produits en ligne, service qui n'est pas visé par les marques arguées de contrefaçon, - que la dénomination OBJET MODERNE n'imite pas les marques arguées de contrefaçon en ce que le premier mot diffère et que ces deux mots, qui sont « L'HOMME » d'une part, et « L'OBJET » d'autre part, ont des prononciations bien distinctes, - que la police utilisée par la société BULL TRADE BEAR est différente de celle utilisée par la société REDER, - que les couleurs de présentation se distinguent nettement : orange pour OBJET MODERNE et noir et blanc pour L'HOMME MODERNE, - que conceptuellement les signes sont très différents puisque le signe L'HOMME MODERNE laisse à penser que les produits proposés dans les magasins ou sur le site internet www.lnomrnemoderne.fr des produits destinés principalement à la gente masculine, tandis que le signe présumé contrefaisant, « OBJET MODERNE », fait penser que les produits proposés à la vente sur le site internet www.objetmoderne.com des produits novateurs, liés notamment aux nouvelles technologies, et touchant ainsi aussi des hommes que des femmes. Au surplus, elle indique que la clientèle visée n'est pas la même en arguant que le site internet www.objetmoderne.com la société BULL TRADE BEAR vise une clientèle jeune, intéressée notamment par les nouvelles technologies et les produits et gadgets innovants, contrairement aux produits de la société REDER qui visent plus particulièrement une clientèle plus classique et plus âgée. Par ailleurs, elle précise n'y avoir aucune atteinte à la marque puisque la société REDER n'apporte aucune preuve de la prétendue notoriété de la marque « L'HOMME MODERNE » et qu'elle est seule responsable de la dégradation de l'image de ses marques L'HOMME MODERNE eu égard aux nombreuses critiques des internautes sur ses prestations et qualité de ses produits. Elle souligne qu'aucun acte de parasitisme n'est démontré et déclare que pour que la concurrence déloyale soit invoquée à titre principal, au même titre que l'action en contrefaçon, il convient de démontrer que la concurrence déloyale est fondée sur des faits distincts de la contrefaçon ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Elle ajoute qu'en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, la simple commercialisation de produits identiques ou similaires n'est pas suffisante pour constituer un acte de concurrence déloyale et que selon une jurisprudence constante le seul fait de pratiquer des prix inférieurs n'est pas un acte de concurrence déloyale. Elle sollicite reconventionnellement la déchéance totale des droits de la société REDER sur les marques verbale n° 93 492 476 «L'homme moderne» et semi-figurative «L'HOMME MODERNE» n° 1 696 065 pour défaut d'exploitation sérieux depuis au moins cinq ans aux motifs que les marques L'HOMME MODERNE sont utilisées pour viser des services de vente de produits en magasin, par correspondance ou en ligne qui correspond à une activité non visée aux dépôts. Elle déclare à ce sujet que les produits distribués par la société REDER via son site internet ne portent nullement la marque L'HOMME MODERNE en raison du fait que les produits vendus par la société REDER sont des produits de tierces sociétés portant leur propre marque ou signe. Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 21 mars 2013, la société GROUPON FRANCE a demandé au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de : A TITRE PRINCIPAL, - CONSTATER la marque « L'HOMME MODERNE » enregistrée sous les numéros 93492476 et 1696065 est nulle pour défaut de caractère distinctif, En conséquence, - DECLARER l'action en contrefaçon de la société REDER à rencontre delà société Groupon et l'en débouter, A TITRE SUBSIDIAIRE, - DIRE ET JUGER la société Groupon ne s'est pas rendue coupable d'actes de contrefaçon de marque ; - DIRE ET JUGER la société Groupon ne s'est pas rendue coupable d'actes de concurrence déloyale ou parasitaire; En conséquence : - DEBOUTER société REDER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; A TITRE RECONVENTIONNEL, - CONDAMNER société REDER à payer à la société Groupon la somme de 10.000 euros pour procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du code civil; EN TOUT ETAT DE CAUSE, - DIRE 'il y aura lieu à exécution provisoire au profit de la société Groupon; - DIRE 'y avoir lieu à exécution provisoire au profit de la société REDER, sauf constitution de garantie consistant en une somme d'argent équivalente au montant de l'éventuelle condamnation, qui sera déposée à la Caisse des dépôts et consignations, en application des articles 517 et suivants du code de procédure civile ; - CONDAMNER société .REDER à payer à la société Groupon la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; - CONDAMNER société REDER aux entiers dépens. La société GROUPON fait valoir que les termes « homme » et «moderne » sont génériques, descriptifs, utilisés dans le langage courant. Elle ajoute au surplus que la distinctivité ne saurait avoir été acquise par l'usage en raison de l'absence de notoriété des marques L'HOMME MODERNE, la société REDER ne démontrant aucunement cette notoriété et se contentant simplement de dire la marque L'HOMME MODERNE « exploitée par une société ancienne réputée sur ce marché», et qu'il s'agirait d'une marque notoire, « en témoigne la diffusion du catalogue sous ce nom ». En outre, la société GROUPON conteste la matérialité de la contrefaçon aux motifs : - que les marques arguées de contrefaçon ne visent pas le service de vente par internet, laquelle est l'activité principale de la société GROUPON, - que la demanderesse reproche à la société GROUPON de faire la promotion de produits qui ne reprennent en aucun cas les marques L'HOMME MODERNE, - que le signe « OBJET MODERNE » et les marques « L'HOMME MODERNE » ne présentent aucune similitude visuelle, phonétique et conceptuelle, - que la demanderesse cible, comme elle le précise dans ses écritures, une clientèle aisée, notamment les cadres supérieurs, tandis que la société GROUPON vise une clientèle jeune et souvent peu fortunée, cherchant à bénéficier de réductions de prix attachées au principe de l'achat groupé, de sorte qu'il n'existe en conséquence aucun risque de confusion possible. Elle sollicite l'irrecevabilité de l'action en parasitisme, invoquée à titre complémentaire, à défaut de démontrer l'existence de faits distincts de ceux argués de contrefaçon. À toutes fins utiles, elle réclame la condamnation de la demanderesse pour procédure abusive en raison de sa légèreté blâmable et du peu de sérieux de son action qui ne précise pas si son action en contrefaçon est fondée sur la marque enregistrée sous le numéro 93492476 ou sous le numéro 1696065. L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 avril 2013. SUR QUOI: Sur la demande de nullité des marques « L'HOMME MODERNE » formée par la société GROUPON : La marque est le signe qui permet d'identifier l'origine des produits ou les services visés. L'article L.711-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que la marque est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou les services d'une personne physique ou morale. Peuvent notamment constituer un tel signe les dénominations sous toutes les formes, les signes sonores et les signes figuratifs. Les signes énumérés par l'article précité ne peuvent être utilisés comme marque que s'ils ont un caractère distinctif. L'article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que sont dépourvus de caractère distinctif : 1( les signes ou dénominations qui dans le langage courant ou professionnel sont exclusivement la désignation nécessaire générique ou usuelle du produit ou du service. 2( les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de production du bien ou de la prestation de service. 3( les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. La société GROUPON soulève la nullité des marques « L'HOMME MODERNE » au motif que celles- ci sont dépourvues de distinctivité. Elle soutient que les termes « homme » et « moderne » sont de façon évidente des termes génériques, descriptifs, utilisés dans le langage courant. Si les termes « homme « et « moderne » sont en effet des termes utilisés dans le langage courant, leur association décrit éventuellement le consommateur visé par les produits offerts mais la marque « L'HOMME MODERNE » est différente des produits proposés de sorte qu'elle est distinctive. En conséquence, la demande de nullité des marques « L'HOMME MODERNE » n° 93492476 et n° 1696065 formée par la société GROUPON est rejetée. Sur la demande reconventionnelle en déchéance des marques françaises verbale n° 93492476 et semi-figurative n° 1696065 « L'HOMME MODERNE » formée par la société BULL TRADE BEAR: L'article L. 714-5 du CPI dispose que : « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans. [...] La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits ou aux services concernés. La preuve de l'exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens. La déchéance prend effet à la date d'expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu ». La société BULL TRADE BEAR a formé la demande reconventionnelle en déchéance de marques par conclusions notifiées par e-barreau le 25.02.2013. Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle en déchéance des marques de la société REDER formée par la société BULL TRADE BEAR : La société REDER estime que la société BULL TRADE BEAR n'a pas d'intérêt à agir dans la mesure où elle n'a aucun projet effectif d'exploiter les marques litigieuses, qu'au surplus elle ne saurait se prévaloir d'un quelconque intérêt à agir alors qu'elle prétend dans le même temps que ses produits et services ne peuvent être comparés sur le terrain du droit des marques à ceux proposés par la société REDER. Dans la mesure où la société REDER agit en contrefaçon à l'égard de la société BULL TRADE BEAR, celle-ci a un intérêt légitime à présenter tout moyen de défense et notamment à former une demande reconventionnelle en déchéance des marques qui lui sont opposées pour défaut d'exploitation et ce quelques soient l'issue de la procédure et le jugement qui sera rendu. Dans ces conditions, la société BULL TRADE BEAR est recevable à agir en sa demande reconventionnelle en déchéance de marques à l'égard de la société REDER. Sur la demande en déchéance pour défaut d'exploitation : La société REDER conclut à la déchéance des marques « L'HOMME MODERNE » pour défaut d'exploitation à compter de leur publication, la société REDER n'étant pas en mesure de rapporter la preuve de ce que les marques sont utilisées pour des services de vente en ligne, en magasin ou par correspondance, ces services n'étant pas visés dans l'enregistrement des marques d'une part, les produits présentés sur son site ne portant pas d'autre part les marques. Il appartient à la société REDER de rapporter la preuve de l'exploitation de ses marques pendant un délai de cinq ans à compter de la publication mais elle peut aussi rapporter la preuve de ce qu'elle a repris l'exploitation des marques postérieurement à cette période de cinq ans à condition que cette exploitation ait commencé avant les trois mois précédant la demande en déchéance et sans que le propriétaire n'ait eu connaissance de l'éventualité de cette demande conformément au dernier alinéa de l'article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle. Il appartient donc à la société REDER de démontrer un usage sérieux du signe à titre de marque pour les produits et services pour lesquels celles-ci sont enregistrées et donc la preuve d'un contact entre le produit porteur de la marque protégée et sa clientèle et ce dans les cinq ans précédant le 25.11. 2012, les premières conclusions en déchéance de la société BULL TRADE BEAR étant du 25.02.2013. S'agissant de marques françaises, la preuve de l'exploitation sérieuse des marques doit se faire par des pièces prouvant l'exploitation de la marque sur le territoire français en raison du principe de territorialité. La société REDER à laquelle il appartient de justifier de l'exploitation sérieuse des marques invoquées se limite à verser au débat un catalogue de produits « L'HOMME MODERNE » sous la pièce n°7, daté de mai 2012. La seule production de ce catalogue par correspondance sur lequel figure en haut à droite de la page de garde « L'HOMME MODERNE » est insuffisante à rapporter la preuve de l'exploitation des marques, le signe « L'HOMME MODERNE » étant uniquement utilisé à titre d'« enseigne » et non en tant que marque. En outre, la société REDER ne procède à aucun travail d'analyse entre les produits proposés dans le catalogue et ceux visés dans les classes déposées. Elle ne donne non plus aucune information sur les services qu'elle mettrait en œuvre et notamment ceux de vente en ligne, en magasin et de correspondance correspondant aux services visés dans le dépôt des marques. Dans ces conditions, faute pour la société REDER d'établir la preuve de l'exploitation sérieuse de ses marques pour les produits et services visés à l'enregistrement, la déchéance des deux marques françaises semi-figurative et verbale « L'homme MODERNE » est prononcée à compter du 30.09.1991 pour la marque n° 1696065 et à compter du 31.12.1993 pour la marque n° 93492476, date de sa publication au BOPI. Elle est donc irrecevable à agir en contrefaçon d*e ses marques à rencontre des deux sociétés défenderesses faute d'être titulaire de droits sur ce signe à la date de la contrefaçon alléguée. Sur les actes de parasitisme : Le parasitisme est caractérisé dès lors qu'une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, s'inspire ou copie une valeur économique d'autrui individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements. La société REDER soutient que lasociété BULL TRADE BEARatenté de profiter de la notoriété et des importants investissements faits en matière de publicité. Elle fait grief à la société défenderesse d'utiliser les mêmes procédés de vente par correspondance ou par internet pour vendre des produits pour certains identiques à ceux qu'elle propose à un moindre prix et en tirant profit des investissements réalisés. La société REDER se limite à procéder par affirmations sans verser au débat aucune pièce et notamment des éléments sur les investissements tant en matière de publicité qu' en termes d'image qu' elle aurait engagés et dont profiterait'la société BULL TRADE BEAR comme elle le prétend de sorte qu'elle est déboutée de sa demande à ce titre faute prétend de sorte qu'elle est déboutée de sa demande à ce titre faute pour elle d'établir la preuve des faits invoqués. Sur la demande de la société GROUPON en dommages et intérêts pour procédure abusive : L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur équipollente au dol. La société GROUPON est déboutée de sa demande à ce titre, faute pour elle de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de la société REDER qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits et d'établir l'existence d'un préjudice autre que celui subi du fait des frais exposés pour sa défense. Sur les autres demandes : Les conditions sont réunies pour condamner la société REDER à verser à chacune des sociétés défenderesses la somme de 6000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. L'exécution provisoire de la présente décision n'est pas nécessaire. La société REDER est condamnée aux dépens avec distraction au profit de Maître C, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

; Statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par remise au greffe au jour du délibéré, Déboute la société GROUPON de sa demande en nullité des marques françaises « L'HOMME MODERNE » verbale déposée le 17 novembre 1993 sous le numéro 93492476 et semi-figurative déposée le 30.09.1991 sous le numéro 1696065, Déclare la société BULL TRADE BEAR recevable en sa demande de déchéance des marques françaises « L'HOMME MODERNE » verbale déposée le 17 novembre 1993 sous len° 93492476 et semi-figurative déposée le 30.09.1991 sous le n° 1696065, Déclare la société REDER déchue de ses droits pour défaut d'exploitation sur l'ensemble des produits et services visés à l'enregistrement des marques suivantes: * La marque française verbale « L'HOMME MODERNE » déposée le 17 novembre 1993 sous le numéro 93492476 dans les classes 02 ; 03 ; 04 ; 05 ; 06 ; 07 ; 08 ; 09 ; 10 ; 11 ; 12 ; 13 ; 14 ; 15 ; 16 ; 18 ; 19 ; 20 ; 21.; 22 ; 24 ; 25 ; 26 ; 27 ; 28 ; 31 ; 34 ; 35 ; 38 ; 39 ; 41 et 42 et ce à compter du 31.12.1993, * La marque française semi-figurative « L'HOMME MODERNE » déposée le 29 novembre 1995 sous le numéro 1696065 en classes 04 ; 05 ; 06 ; 08 ; 09 ; 11 ; 13 ; 14 ; 15 ; 16 ; 18 ; 20 ; 21 ; 24 ; 27 ; 28 ; 34; 35 ; 40 ; 41 ; 42 ; 43 ; 44 à compter du 30.09.1991, En conséquence, La déclare irrecevable à agir en contrefaçon de ses marques à rencontre des deux sociétés défenderesses faute d'être titulaire de droits sur ce signe à la date de la contrefaçon alléguée. Déboute la société REDER de sa demande en dommages et intérêts pour actes de parasitisme, Déboute la société GROUPON de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive, Condamne la société REDER à verser à la société BULL TRADE BEAR la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, Condamne la société REDER à verser à la société GROUPON la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision, Condamne la société REDER aux dépens dont distraction au profit de Maître C, Avocat au Barreau de Paris.