Tribunal de grande instance de Paris, 18 janvier 2008, 2006/10020

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2006/10020
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : LA PRAIRIE ; LA PRAIRIE SWITZERLAND
  • Classification pour les marques : CL03 ; CL05 ; CL16 ; CL18 ; CL21; CL25 ; CL28
  • Numéros d'enregistrement : 608322 ; 598478
  • Parties : LABORATOIRES LA PRAIRIE SA (Suisse) ; SODICOS SAS / LA COLLINE CELLULAR RESEARCH LABORATORIES SA (Suisse) ; LA COLLINE INTERNATIONAL SARL

Texte intégral

TRIBUNAL D E GRANDE INSTANCE DE PARIS 3ème chambre 2ème section № RG: 06/10020 JUGEMENT rendu le 18 Janvier 2008 Assignation du 21 Juin 2006DEMANDERESSES S.A. LABORATOIRES LA PRAIRIE8 Industriestrasse [...] S.A.S. SODICOS[...]92100 BOULOGNE BILLANCOURT représentées par Me Christophe CHAPOULLIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 188 DÉFENDERESSES S.A. LA COLLINE CELLULAR RESEARCH LABORATORIES[...] 57340 SUISSE S.A.R.L. LA COLLINE INTERNATIONAL, exerçant son activité sous le nom commercial "La Colline".[...] représentée par Me Jean-Baptiste BOURGEOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire Ll 11 COMPOSITION DU TRIBUNAL Véronique R, Vice-Président, signataire de la décision Sophie CANAS, Juge Guillaume M. Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l'audience du 08 Novembre 2007 tenue en audience publique JUGEMENT Prononcé par remise de la décision au greffeContradictoireen premier ressort

Faits et procédure

La société de droit suisse Laboratoires La Prairie (ci-après la société La Prairie) est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de produits cosmétiques haut de gamme. Elle justifie être titulaire : - d'une marque internationale semi-figurative visant la France déposée à l'OMPI le 18 août 1993 et enregistrée sous le n°608 322, notamment pour les produits de la classe 3 "savons ; parfumerie, cosmétiques, préparations non médicinales sous forme de crèmes, lotions, émulsions et concentrés pour la protection, les soins et le traitement de la peau, produits solaires, préparations pour les soins des cheveux, shampooings et lotions pour les cheveux, dentifrices, déodorants et antiperspirants pour l'usage personnel ", se présentant comme suit : - de la marque internationale semi-figurative visant la France, déposée à l'OMPI le 11 février 1993 et enregistrée sous le n°598 478, notamment pour les produits de la classe 3 "préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices ; tous ces produits d'origine suisse ", se présentant comme suit : Ces marques sont utilisées pour commercialiser des produits de beauté dits "cellulaires", déclinés dans diverses gammes et vendus à un prix très élevé. En vertu de contrats de licence exclusive en date des 18 août et 21 décembre 1992, la société Sodicos, filiale de la société La Prairie, est l'importateur et le distributeur exclusif, en France, des produits revêtus des marques précitées. Elle exploite notamment un stand aux Galeries Lafayette, boulevard Haussmann, à Paris. Les sociétés La Prairie et Sodicos exposent avoir constaté au sein de ce même magasin l'ouverture, en avril 2005, d'un stand "La Colline", exploité, à l'instar d'un magasin ouvert en août 2005 avenue de l'Opéra, à Paris, par la société La Colline International, société de droit français, filiale de la société de droit suisse La Colline Cellular Research Laboratories SA, et distributrice exclusive des produits du même nom. Elles précisent que la société La Colline International a acquis auprès de la société Créations Beautés Fragrances les marques françaises suivantes : - "La Colline" n°98 715 408, enregistrée le 29 janvie r 1998 pour les produits de la classe 3 "savons, produits de parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrices", la cession en date du 17 décembre 2004 ayant été transcrite au Registre national des marques le 13 juin 2005,- "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 56 8 311, enregistrée le 20 avril 1995 pour les produits de la classe 3 "préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons ; parfumerie, huiles essentielles ; cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices ", la cession en date du 2 février 2005 ayant été transcrite au Registre national des marques le 8 août 2005). Les sociétés La Prairie et Sodicos ajoutent que la société La Colline International commercialise, sous ces marques,des produits cosmétiques proposés à des prix élevés, dont le conditionnement comporte notamment une croix rouge, entre autres références explicites à la Suisse, et un motif circulaire de nature, selon elles, à créer un risque de confusion avec leur marque n°598 478. Jugeant que, pour pénétrer le marché français, les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories SA ont adopté, y compris sur leur site internet www.lacolline- skincare.com, une démarche constitutive d'imitation illicite de leurs marques, de suivisme et ont usurpé, sans bourse délier, la renommée, l'identité visuelle et l'image positive acquise par les produits "La Prairie" au fil des années, les sociétés La Prairie et Sodicos leur ont demandé, en vain, de les indemniser du préjudice subi et de cesser ces pratiques. Puis, par actes d'huissier de justice en date du 21 juin 2006, les sociétés La Prairie et Sodicos ont assigné les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories SA devant le Tribunal de grande instance de Paris, en contrefaçon et en concurrence déloyale. L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2007, l'affaire a été plaidée le jour même, puis mise en délibéré à ce jour. Prétention des parties • Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 28 septembre 2007, lessociétés La Prairie et Sodicos demandent au Tribunal : - de débouter les défenderesses de l'ensemble de leurs demandes, et notamment de dire et juger que les marques "La Prairie Switzerland" n°598 478 et 608 322 ne sont p as déceptives,- de constater, dire et juger que l'action en contrefaçon est recevable, et que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories ont commis des actes de contrefaçon par imitation des marques "La Prairie Switzerland" n°598 478 et 608 322 appartenant à la société La Prairie,-de faire interdiction aux sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories de faire usage de l'imitation des marques "La Prairie Switzerland" n°598 478 et 6 08 322 dans la vie des affaires, sous astreinte de 5.000 € par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir,- de prononcer la nullité des marques "La Colline" n°98 715 408 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311,- d'ordonner au greffier de signifier la décision à intervenir à l'Institut National de la Propriété Industrielle afin d'inscription au Registre National des Marques,- de condamner solidairement les défenderesses à payer, à titre provisionnel, à la société La Prairie la somme de 300.000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, sauf à parfaire,- de constater, dire et juger que les défenderesses ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au détriment des sociétés La Prairie et Sodicos, par la commercialisation de produits créant un risque de confusion dans l'esprit du consommateur, par leurs appellations, l'emploi de la dénomination "Cellular", des conditionnements reproduisant quasi-servilement les produits des demanderesses et notamment leurs couleurs, leurs dimensions et leurs formes cubiques, l'usage de l'imitation illicite des deux marques "La Prairie" au même emplacement sur les produits que lesdites marques, l'imitation des produits eux-mêmes, la référence inexacte à des travaux de recherche de plus de 50 ans, l'utilisation trompeuse des origines suisses, la reprise de l'identité visuelle des produits de La Prairie et de la communication des Laboratoires La Prairie et de Sodicos,- de constater, dire et juger que les dénominations sociales La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories à payer, à titre provisionnel, aux sociétés Laboratoires La Prairie et Sodicos la somme de 300.000 € de dommages intérêts en réparation du préjudice, sauf à parfaire,- de débouter les sociétés La Colline de leurs demandes en nullité de la partie française des marques "La Prairie" n°598 478 et n°608 322,En tout état de cause, - de nommer un expert avec pour mission de déterminer le préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, de concurrence déloyale et de parasitisme,- de faire interdiction aux défenderesses de faire usage sous quelque forme que ce soit des marques et dénominations "La Colline", "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment", des conditionnements et des produits litigieux et des dénominations "Cellular" et "Cellulaire" dans la vie des affaires sous astreinte de 5.000 .€ par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir,- d'ordonner la publication du jugement à intervenir, intégralement ou par extraits, dans cinq journaux ou magazines au choix des sociétés La Prairie et Sodicos, le coût de chacune de ces cinq insertions ne pouvant excéder 10.000 €, à la charge des sociétés défenderesses,- de condamner solidairement les défenderesses à leur payer la somme de 40.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et constitution de garantie,- de condamner solidairement les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories aux entiers dépens dont distraction directe au profit de Maître C. • En réponse, dans leurs dernières conclusions, signifiées le 31 octobre2007, les sociétés La Colline International et La Colline CellularResearch Laboratories demandent au Tribunal :- de prononcer la nullité de la partie française des marquesinternationales n° 608 322 du 18 août 1993 et n° 59 8 478 du11 février 1993,- d'ordonner la transmission de la décision à intervenir auprès de l'Office Mondial de la Propriété Intellectuelle sur réquisitiondu greffier, ou, à défaut, de la partie la plus diligente,

En conséquence

, - de débouter la société La Prairie et la société Sodicos de l'ensemble de leurs demandes au titre de la contrefaçon, A titre subsidiaire, - de débouter la société La Prairie et la société Sodicos de l'ensemble de leurs demandes au titre de la contrefaçon, En tout état de cause, - de débouter les demanderesses de l'ensemble de leurs demandes formulées sur le fondement de la concurrence déloyale,- de condamner les demanderesses à leur verser la somme de 200.000 € chacune à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi, - de condamner les demanderesses à leur payer la somme de 40.000 € chacune en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,- de condamner les demanderesses aux entiers dépens, dont distraction au profit du cabinet Bourgeois, Rezac, Mignon. Motifs de la décision I. Sur la validité des marques "La Prairie Switzerland" n°608 322 et n° 598 478 Attendu qu'il résulte de l'article L. 711-3 c) du Code de la propriété intellectuelle, ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ; Attendu que pour contester la validité des marques invoquées au soutien de l'action en contrefaçon, les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories exposent qu'elles comportent une mention "Switzerland" alors que les produits de la société La Prairie ne peuvent revendiquer une origine suisse ; Que dans le dispositif de leurs dernières conclusions, elles demandent au Tribunal de prononcer la nullité des marques litigieuses, en se fondant non seulement sur les dispositions de l'article L. 711 -3 du Code de la propriété intellectuelle, mais également sur celles de l'article L. 714-6 du même Code ; Que le Tribunal relève cependant que dans les motifs de ces mêmes conclusions, les défenderesses, se prévalant des mêmes textes, entendent voir "constater la déchéance des droits " de la société La Prairie sur les marques litigieuses, et "prononcer la nullité de la partie française de chacune de ces marques " ; Attendu qu'en réponse, les demanderesses font valoir qu'en application de l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, le Tribunal doit examiner ces demandes au regard des seules dispositions de l'article L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle ; qu'au fond, elles soutiennent que l'emploi de la mention "Switzerland" dans les marques qu'elles invoquent au soutien de leur action n'est pas déceptif ; Attendu qu'il convient dans un premier temps de restituer aux demandes des sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories leur exacte portée ; A. A titre liminaire, sur la portée des demandes des sociétés La CollineInternational et La Colline Cellular Research Laboratories Attendu que l'article 5 du Code de procédure civile dispose que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ;Attendu, en l'espèce, que tant le dispositif que les motifs des dernières conclusions des défenderesses, dont la teneur a été rappelée ci-dessus, visent expressément les articles L. 711 -3 et L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle, aux termes duquel encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d'une marque devenue de son fait propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ; Que dès lors, le Tribunal ne peut, sans dénaturer les écritures des sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories, ou omettre d'y répondre, examiner la validité des marques litigieuses à la lumière du seul article L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle ; Qu'au contraire, il y a lieu de considérer que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories entendent voir prononcer tant la nullité que la déchéance des marques litigieuses ; Attendu que ces demandes conduisent le Tribunal à déterminer si la mention "Switzerland" est, au sens des articles L. 711-3 c) et L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle, de nature "à tromper le public " ou "à induire en erreur " sur "la provenance géographique " des produits désignés lors de leur enregistrement, avant d'en tirer toutes conséquences de droit ; B. Sur le caractère trompeur de la mention "Switzerland" Attendu que la fonction première d'une marque est de garantir au consommateur ou à l'utilisateur final d'un produit l'origine de ce dernier, en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ce produit de ceux qui ont une autre provenance ; Que dans ce but, la marque doit avant tout constituer la garantie que tous les produits ou services qu'elle désigne ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle d'une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité ; Qu'une marque accolant le nom d'un pays à une désignation de fantaisie conduit le consommateur à identifier l'entreprise concernée au regard, notamment, de son pays d'origine ; Qu'il s'agit dès lors de vérifier si la personne morale usant d'un tel vocable entretient avec le dit pays des liens exempts de toute Activité ; Qu'il apparaît en l'espèce que la mention "Switzerland" comprise par les deux marques invoquées au soutien de l'action en contrefaçon constitue davantage une indication de l'origine géographique, par ailleurs non contestée, de la société La Prairie, qu'une référence explicite au lieu de fabrication des produits concernés ; Qu'à cet égard, elle n'est pas de nature à tromper le consommateur sur la provenance géographique des produits désignés, et remplit son rôle tel que précédemment défini ;Attendu qu'à supposer que la mention "Switzerland" incite le consommateur à attribuer aux produits concernés une "origine suisse " (pour reprendre les termes utilisés par les défenderesses), et, partant, affecte son comportement économique, il appartient aux défenderesses de démontrer en quoi elle est de nature à induire le public en erreur ; Que, comme le souligne à juste titre le Procureur de Bâle, dans une ordonnance versée aux débats classant sans suite une plainte dirigée contre la société La Prairie sur un fondement analogue, s'agissant de cosmétiques dont le coût élevé est revendiqué, le consommateur, correspondant nécessairement à une clientèle ciblée disposant d'un pouvoir d'achat substantiel, sera particulièrement attentif d'une part au processus de recherche aboutissant à la création du produit, d'autre part au contrôle de l'efficacité de ce dernier ; qu'en revanche, il n'attachera que peu d'importance au processus de conditionnement des produits concernés ; que c'est en fonction de ces critères qu'il convient d'apprécier la régularité de la mention litigieuse au regard des articles L. 711-3 c) et L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle ; Attendu que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories justifient avoir acquis, en France, un produit revêtu des marques litigieuses, supportant, sur la partie avant de son emballage, la marque "La Prairie Switzerland" n°608 322 est mise en évidence sur la partie avant de l'emballage alors qu'au dos figure une mention "MANUFACTURED IN THE USA FORLABORATOIRES LA PRAIRIE S.A.CLARENS/MONTREUX . ZURICHBADEN-BADEN . MILANO . PARISLA PRAIRIE, INC., DISTR. NEW YORK,N. Y. 10019" Que les défenderesses traduisent le terme "manufactured in the USA " par "fabriqué", et en déduisent que le cosmétique concerné est fabriqué outre Atlantique ; Que dans leurs dernières conclusions, les demanderesses ne contestent pas qu'une "infime partie des produits La Prairie (3 à 4%) sont [sic] fabriqués (au sens strict) aux USA où sont réalisés les opérations de "Bulk' (mélange des ingrédients) et de remplissage pour satisfaire à des exigences techniques complexes ", même si cette affirmation semble contredire une attestation des représentants de la société La Prairie, Messieurs T, son Président, et Hoener, administrateur, aux termes de laquelle c'est la mise en pot et l'emballage de ces produits qui est réalisée aux Etats-Unis ; Mais attendu qu'il ne peut résulter de cet emballage la preuve de ce que les procédures de recherche et de contrôle-qualité aboutissant à la conception des produits La Prairie sont mises en oeuvre hors du territoire de la Confédération Helvétique ;Attendu, par ailleurs, que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories ajoutent avoir acheté en Espagne un produit revêtu des marques litigieuses ; que selon elles, alors que la législation locale imposerait une mention relative au pays de fabrication si celui-ci ne relève pas de l'Union européenne, aucune précision relative à une fabrication en Suisse ne serait visible sur l'emballage ; qu'elles en déduisent que la société La Prairie admet ainsi que ses produits ne sont pas fabriqués en Suisse, mais sur le territoire de l'Union ; Mais attendu que le non-respect éventuel des dispositions de la législation espagnole par la demanderesse ne saurait constituer un aveu du caractère mensonger de l'origine suisse prétendument attribuée à ses produits ; Attendu, en outre, que les défenderesses soutiennent qu'aux termes de la législation suisse, ne peuvent revendiquer une origine helvète que les produits dont le processus essentiel de fabrication a lieu en Suisse, la quote-part du travail réalisé en Suisse devant quant à elle représenter au minimum 50% du coût de revient ; qu'elles font valoir que tel n'est pas le cas en l'espèce ; Que cependant, le Tribunal doit s'interroger non pas sur la conformité de la mention "Switzerland" à la loi suisse, dont le contenu n'est pas précisément porté à sa connaissance, mais sur le fait de savoir si une telle précision est de nature à tromper le consommateur français sur la provenance géographique des produits concernés visés ; Or, attendu qu'aux termes de l'attestation précitée, "le groupe La Prairie a son centre opérationnel à Volketswil en Suisse et y emploie environ 185 employés hautement qualifiés, dont 28 chercheurs qualifiés en recherche et développement dans ses propres laboratoires " ; qu'il ressort de ce document que la masse, ou "bulk", à savoir "le mélange en vrac constituant la composition qui est utilisée pour les produits La Prairie est fabriquée en Suisse (...) Ce principalement par l'entreprise Trichema AG à Baar"; que ces affirmations sont corroborées par diverses télécopies attestant d'échanges réguliers entre la société La Prairie et la société Trichema AG ; qu'un représentant de cette dernière atteste produire la "masse" (ou "bulk") des produits cosmétiques La Prairie depuis 1992, "selon les formules développées etfournies par les Laboratoires La Prairie SA, les instructions données par les Laboratoires La Prairie sur les produits, et sous la surveillance et le contrôle (y compris la confirmation de l'autorisation finale) des Laboratoires La Prairie SA" ; qu'un représentant d'une société Temmentec AG, également basée en Suisse, a fourni une attestation similaire ; Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la recherche afférente aux produits commercialisés sous les marques litigieuses et le contrôle de leur efficacité dépend d'unités de la chaîne de production basées en Suisse ; Que le fait que certains cosmétiques sont conditionnés en Allemagne, à Baden-Baden, est sans incidence ; que dès lors, la mention de cette ville au dos certains emballages "La Prairie" ne paraît pas contredire la mention "Switzerland" ;Que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories, qui se bornent, pour l'essentiel, à remettre en cause le caractère probant des documents produits par les demanderesses, ne portent à la connaissance du Tribunal aucun élément permettant d'en infirmer le contenu ; Attendu, en conséquence, qu'il n'est pas démontré que la mention "Switzerland" reprise tant par la marque n°608 322 que par la marque n°598 478 est de nature à tromper le cons ommateur sur la provenance géographiques des produits désignés, pas plus qu'elle n'est devenue, du fait de la société La Prairie, propre à induire en erreur sur cette même provenance ; Qu'il convient de rejeter les demandes des sociétés Colline International et Colline Cellular Research Laboratories tendant à voir prononcer la nullité des marques litigieuses ou la déchéance des droits de la société La Prairie sur celles-ci. II. Sur la contrefaçon Attendu que pour solliciter l'annulation des marques "La Colline" n°98 715 408, enregistrée le 29 janvier 19 98 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311, enreg istrée le 20 avril 1995, ainsi qu'une somme de dommages intérêts, la société La Prairie soutient qu'elles constituent la contrefaçon par imitation de ses deux marques internationales semi-figuratives "La Prairie Switzerland" n°608 322 et n°598 478 ; qu'aux mêmes fins de dédommagement, elle affirme par ailleurs que les sociétés défenderesses ont apposé, sur leurs produits cosmétiques, un signe constituant une imitation flagrante de la marque "La Prairie Switzerland" n°598 478 ; Attendu que les défenderesses opposent la forclusion de l'action en contrefaçon sur le fondement de l'article L. 716-5 du Code de la propriété intellectuelle, selon lequel est irrecevable toute action en contrefaçon d'une marque postérieure enregistrée dont l'usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi ; qu'au fond, elles concluent au mal-fondé du grief de contrefaçon ; A. Sur l'exception de forclusion Attendu que la marque "La Colline" n°98 715 408 a é té enregistrée le 29 janvier 1998 ; que la marque "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311 a quant à el le été enregistrée le 20 avril 1995 ; que l'assignation en contrefaçon a été délivrée le 21 juin 2006 ; Que s'agissant de marques françaises, il incombe aux défenderesses de démontrer que la société La Prairie avait une connaissance effective de l'usage de ces signes sur le territoire national, ou qu'elle ne pouvait ignorer, compte tenu des circonstances de l'espèce, l'existence d'un tel usage, depuis le 20 juin 2001 au plus tard ; Que de ce point de vue, la connaissance, par la demanderesse, de l'existence des sociétés défenderesses ou d'un usage de signes identiques aux marques litigieuses à l'étranger est indifférente ;Attendu que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories soutiennent que la société La Prairie connaissait l'existence des marques prétendument contrefaisantes au moins depuis 1997 ; Qu'en réponse, la société La Prairie fait valoir qu'elle n'a eu connaissance de l'usage en France des marques "La Colline" et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" qu'en octobre 2005, à l'occasion de la parution, dans le périodique "Cosmétique Magazine", d'un article consacré à l'ouverture par la société La Colline International de son magasin situé avenue de l'Opéra, à Paris ; Attendu que les défenderesses produisent inopportunément des documents tendant à démontrer que leurs produits étaient exposés au sein des locaux suisses d'un de leurs fournisseurs, ou lors de salons se déroulant en dehors du territoire national ; que les attestations faisant état d'une commercialisation de leurs produits dans une importante enseigne de distribution basée à Hong-Kong sont également sans portée ; Que la parution en France, en mai 2002 et avril 2003, dans "Cosmétiques Magazine", d'annonces de recrutement portant un emblème "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" ne peut constituer un usage des signes examinés à titre de marque pour les produits désignés lors de leur enregistrement ; Qu'enfin, il ressort de l'attestation de Monsieur L, directeur commercial d'une société AirlessSystems dont l'objet social est inconnu du Tribunal, qu'il s'est contenté affirmer qu' "à compter de janvier 1997, des produits La Colline, entièrement fabriqués en Suisse, ont été exposés d'une part dans les vitrines des salles de réunion où nous recevions tous nos visiteurs et d'autre part dans des salons professionnels" dont certains se déroulaient en France ; que cette attestation, ainsi que la photocopie en noir et blanc de photographie, inexploitable, qui l'accompagne, ne fournissent aucune information démontrant la connaissance, par la demanderesse, d'un usage en France des marques "La Colline" n°98 715 4 08 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 31 1 ; Attendu qu'il n'est pas formellement établi que la société La Prairie a toléré, au sens de l'article L. 716-5 du Code de la propriété intellectuelle, l'usage des marques secondes au cours de la période considérée ; Que n'étant pas forclose, la société La Prairie est recevable à agir en contrefaçon.B. Sur le bien-fondé de l'action en contrefaçon Attendu que les marques premières et les signes argués de contrefaçon étant différents, c'est au regard de l'article L. 713-3 b) du Code de la propriété intellectuelle, qui prohibe, "sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public, l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement", qu'il convient d'apprécier le bien- fondé de la demande en contrefaçon ;Qu'il convient particulièrement de rechercher au regard d'une appréciation des degrés de similitude entre les marques et les signes, et entre les produits désignés, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; Sur la contrefaçon par imitation de la marque n°608 322 Attendu que la marque invoquée se présente comme suit : Que les signes argués de contrefaçon sont les marques verbales "La Colline" n°98 715 408 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311 ; Qu'à ce stade, les marques doivent être comparées tels qu'elles ont été enregistrées, indépendamment de leurs conditions d'exploitation ; Attendu qu'il n'est pas contesté que les marques en cause concernent des produits identiques ou similaires ; Attendu que sur le plan visuel et phonétique, les signes comparés n'ont en commun que leur terme d'attaque, constitué de l'article "la" ; Que sur le plan conceptuel, le signe "La Colline" ne comporte aucune référence à la Suisse ; Que s'agissant du signe "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment", il est certain que la mention "Swiss Riviera" est de nature à conduire le consommateur moyen à établir un lien entre les produits et la Confédération Helvétique, à l'instar de la mention "Switzerland" ; Que toutefois, si les signes renvoient tous à l'idée de nature, force est de constater, comme le souligne elle-même la société La Prairie, que "La Colline" évoque un terrain en relief, alors que "La Prairie" évoque au contraire une étendue plane ; qu'à moins de conférer à la société La Prairie un monopole sur toutes les références bucoliques susceptibles de suggérer une certaine harmonie entre cosmétique et nature, il ne peut être affirmé que ces deux termes renvoient nécessairement au même univers paysager ; Que dès lors, le consommateur normalement attentif, n'ayant pas l'ensemble des signes examinés sous les yeux, ne sera pas nécessairement conduit à établir un lien entre les produits respectivement commercialisés par les parties ; Que le grief de contrefaçon n'est donc pas fondé, de sorte que les demandes tendant à l'allocation de dommages intérêts et à l'annulation des marques "La Colline" n 98 715 408 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311 ne pou rront qu'être rejetées.Sur la contrefaçon par imitation de la marque n"598 478Que le signe argué de contrefaçon se présente comme suit : Attendu que la marque invoquée se présente comme suit : Qu'il convient cependant de préciser que parmi les pièces produites, il est visible sur des emballages cartonnés, des pots de crème ou des sacs, dans une couleur tantôt blanche, tantôt argentée ; Attendu qu'il n'est pas contesté que les signes en cause se rapportent à des produits identiques ou similaires ; Attendu que les deux signes examinés prennent la forme d'un cercle enfermant un paysage, et comprenant, dans sa partie inférieure, une zone nettement délimitée par un trait horizontal ; Attendu, toutefois, que cette zone inférieure correspond, dans le signe argué de contrefaçon, à un lac, alors qu'elle est simplement destiné, dans la marque première, à accueillir l'élément verbal constitué des termes "La Prairie Switzerland" ; Que dans le signe litigieux, l'élément verbal "La Colline" est au contraire situé dans la partie supérieure du dessin, correspondant au ciel ; Attendu, comme le Tribunal l'a précédemment relevé, que sur les plans visuel et phonétique, les mentions verbales des signes comparés n'ont en commun que leur terme d'attaque, constitué de l'article "la" ; que sur le plan conceptuel, le signe "La Colline" ne comporte aucune référence à la Suisse ; que si les signes comparés renvoient tous à l'idée de nature, "La Colline" évoque un terrain en relief, alors que "La Prairie" évoque au contraire une étendue plane ; Attendu que le dessin de la marque invoquée représente une maison ; que sur le plan intellectuel, les dimensions de cette construction évoquent davantage un centre destiné à l'accueil de curistes qu'une habitation, et ne constitue en aucun cas une illustration de la notion de "prairie" ; Que le signe argué de contrefaçon comprend quant à lui la représentation d'un village entouré d'un lac et de collines évocatrices de son élément verbal ; qu'au sein de ce village, le consommateur peut apercevoir un clocher ; que le signe litigieux renvoie dès lors, sur le plan intellectuel, à un milieu semi-urbain ; Attendu que compte tenu de ces différences, le consommateur normalement attentif, n'ayant pas l'ensemble des signes examinés sous les yeux, ne sera pas nécessairement conduit à établir un lien entre les produits revêtus des signes examinés ; Que le grief de contrefaçon n'est donc pas fondé. III. Sur la concurrence déloyale Attendu que les sociétés La Prairie et Sodicos soutiennent en substance que les défenderesses ont cherché à usurper l'image des produits La Prairie en reprenant à leur profit des éléments caractéristiques de ces produits, à savoir la dénomination "cellulaire", l'identité visuelle des produits, les thèmes de communication de pureté et de sérénité alliés à une haute technologie et la référence trompeuse à une origine suisse ; Attendu qu'en réponse, les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories font valoir que ces griefs sont infondés ; Attendu qu' il ressort des pièces versées aux débats que la société La Prairie fait reposer l'essentiel de sa communication commerciale tant sur le caractère luxueux, et "extraordinairement efficace", de ses produits que sur leur forte valeur ajoutée sur le plan technologique ou scientifique ; qu'ainsi ont fait l'objet de brochures publicitaires spécifiques des crèmes confectionnées à partir d'or ou de caviar ;qu'en revanche, il n'apparaît pas que le prix élevé de ces cosmétiques soit particulièrement mis en avant, même si la presse a pu en faire état ; que si les produits La Colline ne paraissent pas être vendus à des sommes parfaitement identiques, il n'en demeure pas moins que les défenderesses communiquent également autour de la qualité des recherches à l'origine de leurs produits ; qu'une telle stratégie ne peut être constitutive, en soi, de concurrence déloyale ; Attendu, cependant, qu'il n'est pas contesté qu'à l'instar de la société La Prairie, les défenderesses emploient, dans le cadre de la promotion de leurs produits cosmétiques, le terme "cellulaire" ; Que s'il ne dispose pas d'éléments scientifiques ou techniques lui permettant de définir précisément ce que recouvre cette notion, le Tribunal relève qu'en faisant usage d'un tel vocable, la société La Colline Cellular Research Laboratories a manifestement souhaité évoluer au sein d'un marché similaire à celui sur lequel les sociétés demanderesses se sont positionnées, regroupant notamment les produits de beauté agissant sur des cellules dont l'action favoriserait l'entretien de la peau ; Que, de plus, la société La Colline Cellular Research Laboratories a adopté une dénomination sociale comportant des termes de langue anglaise, mais aisément compréhensibles par le consommateur, faisant référence aux notions de "recherche" et de "laboratoires" ; qu'une telle dénomination ne correspond pourtant à aucune nécessité technique ; qu'en effet, alors que les demanderesses lui font grief de ne disposer d'aucun laboratoire et de ne pas avoir élaboré ses propres produits, elle ne justifie ni même ne prétend exercer en son nom propre une quelconque activité de recherche ; qu'elle démontre ainsi sa volonté de se présenter avant tout comme proposant des produits élaborés selon un processus quasi scientifique, à l'instar de la société La Prairie ; Que cet élément est corroboré par les prix pratiqués par les défenderesses ; qu'en effet, il résulte des pièces versées aux débats que la société La Colline International propose sur le territoire français une gamme de produits vendus entre 21,50€ et l65€; que les prix des cosmétiques La Prairie s'échelonnent de 18,14 € à 302,27 ; qu'il peut être déduit de ces fourchettes de tarifs, qui se recoupent en partie, que les parties au litige disposent d'une clientèle commune ; Qu'ainsi, il apparaît que les défenderesses ont délibérément voulu concurrencer les produits "La Prairie" ; Attendu, par ailleurs, qu'il est démontré que certains produits proposés par les défenderesses sont conditionnés dans des emballages fortement similaires à ceux proposés par la société La Prairie ; Qu'ainsi, la société La Prairie propose une "crème cellulaire de jour " vendue dans un pot cylindrique de couleur blanche, surmonté d'un bouchon argenté portant la mention "la prairie " imprimée ton sur ton et en relief ; que de la même façon, la crème "Soin vitalisant cellulaire " vendue sous la marque "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" est présentée dans un pot de couleur blanche, surmonté d'un bouchon de couleur dorée, portant une mention "la colline " également imprimée en relief et ton sur ton ; Que le pot "La Colline", ainsi que l'emballage en carton le protégeant, ont une contenance, une forme, des dimensions, une conception équivalentes aux pots de crème vendus par la société La Prairie ; Que la couleur de l'emballage "La Colline", argentée, se distingue difficilement de l'argenté adopté pour l'emballage "La Prairie" ; Qu'au sommet de l'emballage en carton examiné, les défenderesses ont apposé, en relief et ton sur ton, le graphisme circulaire évoqué plus haut, comprenant la représentation d'un village, entouré d'un lac et de collines ; que cette configuration est strictement identique à celle adoptée par la société La Prairie pour faire figurer, sur ses emballages, sa marque semi-figurative n°598 478 ; Qu'il en résulte une impression d'ensemble de nature à créer un risque de confusion évident chez le consommateur normalement attentif n'ayant pas simultanément sous les yeux les produits "crème cellulaire de jour" La Prairie et "Soin vitalisant cellulaire La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" ; Que ce risque de confusion est aggravé par le mot "swiss" et la référence au drapeau de la Confédération Helvétique pouvant être aperçus sur les conditionnements des produits La Colline versés aux débats, qui de la sorte se trouvent liés, sur le plan géographique, avec les cosmétiques revêtus de la marque "La Prairie Switzerland" ; Que si les défenderesses soutiennent que la société La Prairie ne peut revendiquer une quelconque antériorité s'agissant de ces emballages, elles ne produisent aucun document démontrant qu'elles proposaient leurs produits sous cette forme avant la demanderesse ; Qu'en toute hypothèse, les sociétés La Colline n'étaient nullement contrainte de commercialiser leur crème sous ce type d'emballage ; qu'elles arguent elles-mêmes de l'existence de cosmétiques proposés dans des conditionnements de tailles différentes, et rappellent notamment que la marque "Chanel " est parvenue à se distinguer "avec des pots et des flacons de forme presque carrée "; Attendu, de plus, que les défenderesses ne peuvent utilement tirer argument de la banalité des emballages examinés, ou du bien fondé de la référence à une quelconque origine suisse de leurs produits, dans la mesure où les éléments précédemment examinés relèvent d'une stratégie commerciale devant être appréciée au regard des considérations suivantes ; Attendu, en effet, que les défenderesses déclarent elles-mêmes que la société de droit suisse La Colline Cellular Research Laboratories a été créée en 1996 ; Que la société La Colline International est sa filiale depuis le 30 juin 2004 ; qu'anciennement nommée "Up & Move", elle n'a adopté sa dénomination sociale actuelle que le 1er juillet 2004, élargissant, par la même occasion, son objet social, initialement limité au conseil aux entreprises, aux activités d'achat, d'importation, de vente et d'exportation de tous produits de beauté, de soin de la peau, de maquillage, d'hygiène et de parfumerie ; Que la société La Colline International est devenue le distributeur exclusif en France des produits de la société La Colline Cellular Research Laboratories en vertu d'un contrat daté du 20 septembre2004 ; Que si les marques "La Colline" n°98 715 408 et "La Colline Swiss Riviera Beauty Treatment" n°95 568 311 ont été resp ectivement déposées en 1998 et 1995, la société La Colline International ne les a acquises qu' en décembre 2004 et février 2005, l’inscription des cessions au Registre national des marques n'étant intervenue qu'en juin et août 2005 ; qu'en admettant que des produits estampillés "La Colline" sont vendus sur le marché international, et notamment en Asie, depuis au moins 1997, il n'est pas contesté que les premiers points de vente au public français n'ont été ouverts qu'en avril et en août 2005 ;Qu'ainsi, la société La Colline Cellular Research Laboratories a manifestement décidé de s'implanter sur le marché français par l'intermédiaire d'une société acquise dans ce but ; Que les défenderesses ne pouvaient ignorer qu'à cette date, la société La Prairie intervenait sur le marché des cosmétiques ; que tel était le cas depuis au moins 1978 ; que les défenderesses produisent des coupures de presse démontrant que les produits La Prairie bénéficient d'une certaine reconnaissance médiatique ; qu'elles connaissaient donc nécessairement les pratiques commerciales de leur concurrente ; Attendu, dès lors, qu'en concevant et en proposant à la vente leurs produits cosmétiques dans les conditions précédemment décrites, les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories se sont délibérément placées dans le sillage des sociétés La Prairie et Sodicos, avec la volonté manifeste de tirer profit, sans bourse délier, de la notoriété des produits La Prairie, résultant des investissements réalisés par les demanderesses tant pour la conception que pour la commercialisation de leurs produits ; Que ces agissements parasitaires sont constitutifs d'une faute engageant la responsabilité des sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. IV. Sur les mesures réparatrices Attendu qu'en se rendant coupable des actes de parasitisme précédemment décrits, les défenderesses ont nécessairement détourné une partie de la clientèle intéressée par les produits cosmétiques "La Prairie" ; Que seule la société Sodicos, en sa qualité de distributeur exclusif, peut prétendre avoir subi, de ce chef, un préjudice sur le territoire national ;que la société La Prairie, qui ne justifie pas commercialiser directement ses produits sur ce même territoire, ne peut qu'être déboutée de sa demande indemnitaire ; Qu'il ressort des pièces du dossier qu'en septembre 2006, les produits "La Prairie" ont généré au sein d'un établissement des Galeries La Fayette un chiffre d'affaires de 127.000 € ; qu'en février 2007, cette somme était évaluée à 92.124 € ; Que le comportement fautif des défenderesses justifie en conséquence l'allocation d'une somme de 100.000 € àtitre de dommages intérêts au profit de la société Sodicos, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise ; Attendu qu'il convient, àtitre de complément d'indemnisation, de faire droit aux mesures d'interdiction et de publication sollicitées, dans les limites énoncées par le dispositif de la présente décision. V. Sur les autres demandes Attendu que la nature de l'espèce ne commande pas d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;Attendu que les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories, succombant, seront condamnées aux entiers dépens ; Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Sódicos la totalité des frais irrepetibles ; qu'il convient, en conséquence, de lui allouer la somme globale de 7.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile. Que la société La Prairie étant déboutée de l'ensemble de ses demandes, aucune considération d'équité ne commande de faire droit à sa demande formulée sur le même fondement ; Que pour les mêmes raisons, les défenderesses ne sauraient voir prospérer leur demande à ce titre dirigée à l'encontre de la société La Prairie.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, Statuant publiquement, par mise à disposition du présent jugement au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,Par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, - DEBOUTE les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories de leurs demandes en nullité et en déchéance visant d'une part la marque internationale semi-figurative visant la France, déposées à l'OMPI le 18 août 1993 et enregistrée sous le n°608 322, d'autre part la marque internati onale semi- figurative visant la France, déposée à l'OMPI le 11 février 1993 et enregistrée sous le n°598 478, appartenant toutes d eux à la société Laboratoires La Prairie, - REJETTE l'exception de forclusion pour tolérance soulevée par les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories, - DEBOUTE la société Laboratoires La Prairie de son action en contrefaçon, - DIT qu'en concevant et en proposant à la vente des produits cosmétiques vendus dans un pot de couleur blanche laissant apparaître le terme "swiss ", surmonté d'un bouchon de couleur légèrement dorée comprenant une mention "la colline " reportée en relief et ton sur ton, accompagné d'emballages cartonnés de forme cubique d'une couleur argentée, comportant en leur sommet un graphisme circulaire intégrant la représentation d'un village entouré d'un lac et de collines ainsi qu'une mention "la colline ", les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories se sont rendues coupables de concurrence déloyale,En conséquence, - INTERDIT aux sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, à compter de la signification de la présente décision, - CONDAMNE les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories à payer à la société Sodicos la somme de 100.000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale, - AUTORISE la publication de la présente décision, par extraits, dans trois journaux ou revues au choix de la société Sodicos, aux frais avancés des sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories, dans la limite de 3.500 € hors taxes par insertion, - DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes, - CONDAMNE les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories à payer à la société Sodicos la somme de 7.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, - DEBOUTE la société La Prairie et les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories de leurs demandes formulées sur le même fondement, - CONDAMNE les sociétés La Colline International et La Colline Cellular Research Laboratories aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.