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Tribunal administratif de Nîmes, 1ère Chambre, 6 décembre 2022, 2003549

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Nîmes
  • Numéro d'affaire :
    2003549
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction totale
  • Rapporteur : Mme Bahaj
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : SCP MARGALL D'ALBENAS
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Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Nîmes
6 décembre 2022
Tribunal administratif de Réunion
6 décembre 2022

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 novembre 2020 et le 3 janvier 2022, M. B A, représenté par la SCP CGCB et Associés, demande au tribunal : 1°) d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2020 par lequel le maire de la commune de Villelaure a retiré le permis de construire implicitement délivré le 23 juin 2020 et a refusé de lui délivrer un permis de construire ; 2°) d'enjoindre au maire de la commune de Villelaure de délivrer le permis de construire demandé dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Villelaure le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision est insuffisamment motivée ; - le maire n'était pas en situation de compétence liée pour retirer le permis de construire tacite ; - la décision est entachée d'une erreur de droit en ce que les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne permettent pas de refuser ou de retirer un permis de construire au prétexte que le projet empiète sur une servitude de droit privé ou est de nature à entraver le passage des engins de secours ; - elle est entachée d'une erreur de fait en ce que le projet n'est pas implanté sur une servitude de passage ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UC 2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU). Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2021, la commune de Villelaure, représentée par la SCP Territoires Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés ; - il peut être procédé à une substitution de motif dans la mesure où le projet méconnait les dispositions de l'article 2 du règlement de la zone UC du PLU. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'urbanisme ; - le plan local d'urbanisme de la commune de Villelaure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C, - les conclusions de Mme Bahaj, rapporteure publique, - les observations de Me Geoffret, représentant M. A, et celles de Me Teles, représentant la commune de Villelaure.

Considérant ce qui suit

: 1. Par arrêté du 17 septembre 2020, le maire de la commune de Villelaure a retiré le permis de construire accordé tacitement le 23 juin 2020 et a refusé de délivrer à M. A un permis de construire pour réaliser, après démolition du bâtiment existant, une maison individuelle avec étage, garage et terrasse sur un terrain situé rue de Callier, cadastré section AN numéro de parcelles 161 et 88, en zone UC du PLU de la commune. M. A demande l'annulation de cette décision. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation : 2. L'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dispose que " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". 3. Pour retirer le permis de construire tacite et refuser de faire droit à la demande de permis de construire, le maire de la commune de Villelaure s'est fondé sur le seul motif tiré de ce que le projet méconnaissait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme compte-tenu de son empiétement sur une servitude de passage. Toutefois, il ne ressort pas du plan de masse joint à la demande de permis de construire que le projet de construction d'une maison individuelle avec garage et terrasse est implanté sur les voies privées longeant les limites nord, sud et sud-ouest du terrain d'assiette. Le projet n'est ainsi pas susceptible d'entraver le passage des engins de secours sur le chemin menant aux constructions situées au nord-ouest de ce terrain, ni de porter atteinte à la sécurité publique. Il suit de là que M. A est ainsi fondé à soutenir que le motif opposé par la commune est erroné. Pour les mêmes raisons, ce motif de refus est entaché d'une erreur d'appréciation. En ce qui concerne la demande de substitution de motifs : 4. L'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué. 5. Dans son mémoire en défense, communiqué à M. A, la commune de Villelaure fait valoir en l'espèce que l'arrêté attaqué est légalement justifié par la violation des dispositions de l'article 3, et non 2 comme indiqué par erreur par la commune, du règlement de la zone UC du PLU, relatif aux conditions de desserte des terrains par les voies publiques ou privées et d'accès aux voies ouvertes au public aux termes desquelles : " () 2. Voirie / Les voies doivent avoir des caractéristiques adaptées à l'approche du matériel de lutte contre l'incendie, sécurité civile et ramassage des ordures ménagères et être adaptées aux usages qu'elles supportent et aux opérations qu'elles doivent desservir. () ". 6. Toutefois, ainsi qu'indiqué au point 3, le projet envisagé par M. A n'empiète pas sur des chemins privés permettant l'accès à d'autres parcelles et ne crée pas davantage d'obstacle à la libre circulation des véhicules. Dans ces conditions, la substitution de motifs demandée doit être écartée. 7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2020 du maire de la commune de Villelaure. 8. Pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît en l'état de l'instruction susceptible de fonder l'annulation totale de la décision attaquée. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ". 10. Eu égard au motif d'annulation, et dès lors que M. A est titulaire d'un permis de construire tacite, le présent jugement n'implique, dans les circonstances de l'espèce, aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent donc être rejetées. Sur les frais liés au litige : 11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Villelaure la somme de 1 200 euros à verser à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la commune de Villelaure au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du maire de la commune de Villelaure du 17 septembre 2020 est annulé. Article 2 : La commune de Villelaure versera à M. A une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté. Article 4 : Les conclusions de la commune de Villelaure présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et à la commune de Villelaure. Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022 où siégeaient : - M. Antolini, président, - Mme Bourjade, première conseillère, - Mme Lahmar, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2022. La rapporteure, A. C Le président, J. ANTOLINILa greffière, N. LASNIER La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.