Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 4 novembre 1987, 86-19.489

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
1987-11-04
Cour d'appel de Paris
1986-12-01

Texte intégral

Sur le pourvoi formé par : 1°/ La société anonyme Z... , dont le siège social est ... (Alpes-Maritimes), et dont l'établissement principal se trouve ... (9ème), 2°/ La société ATHLETE'S FOOT MARKETING ASSOCIATES Inc. (AFMA), société de droit américain dont le siège social est 24th street, and AVRR, Pittsburgh, Pensylvania 15222 (USA), 3°/ La société GENERAL SPORTS VENTURES Inc. (GSV), société de droit américain dont le siège social est 83-56, Bird C..., Miami, Florida 33155 (USA), en cassation d'un arrêt rendu le 1er décembre 1986 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre, section A), au profit de la société à responsabilité limitée RUNNING, dont le siège social est ... (8ème), représentée par son syndic, Monsieur A..., défenderesse à la cassation ; Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 6 octobre 1987, où étaient présents : M. Baudoin, président, M. Le Tallec, rapporteur, MM. B..., Y..., X... de Pomarède, Peyrat, Nicot, Bézard, Sablayrolles, conseillers, M. Lacan, conseiller référendaire, M. Montanier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Le Tallec, les observations de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat des sociétés Marshall, Athlete's foot marketing associates inc. (AFMA) et General sports ventures inc. (GSV), de Me Ryziger, avocat de la société à responsabilité limitée Running, les conclusions de M. Montanier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi, Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er décembre 1986), la société Running, actuellement en liquidation des biens, titulaire d'une marque complexe composée de la dénomination Running et de la représentation d'une chaussure de sport munie d'une aile avec revendication de la couleur bleue, a demandé la condamnation de la société Marshall pour contrefaçon ou imitation illicite de ce titre de propriété industrielle ; que les sociétés Athlete's foot marketing associates inc., General sports ventures inc. et la société Marshall (les sociétés américaines) ont prétendu que, par suite d'une création aux Etats-Unis d'Amérique, elles détenaient des droits d'auteur sur un élément figuratif représentant un pied muni d'une aile

Sur le second moyen

, pris en ses trois branches :

Attendu que les sociétés américaines font grief à

la cour d'appel d'avoir accueilli la demande, alors que, selon le pourvoi, d'une part, il résulte du principe d'assimilation de l'unioniste au national posé par la convention universelle sur le droit d'auteur de Genève que doit recevoir protection en France l'oeuvre publiée aux Etats-Unis sans avoir été enregistrée au Copyright Office ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que : "le logo des consorts Z... a bien été créé aux Etats-Unis en 1971 et est devenu notoire dans ce pays" ; que, d'ailleurs, la cour d'appel a estimé que "le logo en litige" n'avait pas fait l'objet d'une "demande de copyright USA" ; que, dès lors, en refusant la protection de la convention de Genève, au motif inopérant tiré de l'absence d'un "renouvellement de l'enregistrement", la cour d'appel a violé les articles 2 à 6 de la convention de Genève, l'article 1er de la loi du 11 mars 1957 et l'article 1382 du Code civil ; alors que, d'autre part, en prétendant que les "consorts Z... n'établissent nullement la réalité d'une chaîne ininterrompue de cessions", sans avoir recherché s'il ne résultait pas de la loi américaine que bénéficie d'une présomption de titularité l'exploitant notoire d'une oeuvre intellectuelle, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1er de la loi du 11 mars 1957 et de l'article 1382 du Code civil ; et alors qu'enfin, dans ses conclusions d'appel, les sociétés américaines faisaient valoir que "le succès sans précédent du réseau de franchise Athlete's foot n'a pas pu passer inaperçu de professionnels comme Running", qu'elles "avaient fait procéder à des publicités dans des revues sportives spécialisées et grand public" dont "certaines portant la publicité et donc le logo Athlete's foot ont été distribuées en France entre 1978 et 1982", tels "des magazines aussi connus que People et Playboy pour les revues grand public, Runner's world et Track and field news pour les revues sportives" ; qu'il s'agissait là d'un moyen pertinent de nature à influer sur la solution du litige, dès lors qu'il tendait à démontrer la notoriété nécessaire du logo "Athlete's foot" en 1982 pour un professionnel français du sport de course à pied ; qu'en omettant d'y répondre, la cour d'appel a privé son arrêt de motifs et, par suite, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu

que, par une appréciation souveraine des éléments de preuve produits aux débats, la cour d'appel a retenu que les sociétés américaines ne justifiaient pas être titulaires des droits d'auteur dont elles se prévalaient ; que, par ce seul motif qui la dispensait de répondre aux conclusions invoquées, la cour d'appel a justifié sa décision quant à la propriété intellectuelle invoquée ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen

, pris en ses deux branches :

Attendu que les société

s américaines font également grief à la cour d'appel d'avoir accueilli la demande, alors que, selon le pourvoi, d'une part, les ressemblances susceptibles de caractériser l'imitation doivent porter sur des éléments distinctifs en eux-mêmes et non sur des éléments banals non protégeables par le droit des marques ; qu'en l'espèce, en retenant l'existence d'une "imitation illicite partielle", après s'être bornée à relever des ressemblances entre des éléments banals et génériques par rapport aux produits désignés et avoir refusé de tenir compte des différences notables existant entre les logos, la cour d'appel, qui a accordé à la société Running la protection d'un genre privatif, a violé les articles 1er de la loi du 31 décembre 1964 et 1382 du Code civil ; et alors que, d'autre part, à supposer par hypothèse que la notion de risque de confusion ne soit pas une qualification juridique contrôlée par la Cour de Cassation, la cour d'appel ne pouvait successivement retenir un tel risque de constater l'abandon de l'exploitation de la marque, sans entacher son arrêt d'une contradiction entre motifs de fait et, par suite, d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu

que, par motifs propres et adoptés, après avoir relevé l'antériorité de la marque de la société Running et, par la description donnée, exclu toute protection d'un genre, la cour d'appel a retenu que la partie figurative de cette marque n'était ni générique ni usuelle ni descriptive, a décrit l'élément figurarif utilisé par la société Marshall comme marque et comme enseigne et a constaté que des confusions s'étaient effectivement produites ; qu'ainsi, et hors toute dénaturation, la cour d'appel a légalement justifié sa décision du chef de la propriété industrielle ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Et sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : Attendu que la société Running sollicite l'allocation d'une somme à déterminer par la Cour de Cassation par application de ce texte ; Attendu qu'il y a lieu d'accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ;