Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 22 novembre 2012, 11-26.758

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2012-11-22
Cour d'appel de Paris
2011-09-19
Tribunal de grande instance de Paris
2010-01-21

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que le 31 mars 2002, Mme X... a été blessée en étant percutée sur une patinoire par M. Y..., assuré auprès de la société Pacifica (l'assureur) ; qu'à la suite de plusieurs arrêts de travail, Mme X..., salariée d'un office du tourisme, a été placée en invalidité ; que les 17, 18 et 19 juin 2008, à la suite d'une expertise médicale ordonnée en référé, Mme X... a assigné M. Y... et l'assureur en responsabilité et indemnisation, en présence des tiers payeurs, la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie (la caisse) et l'institution Prémalliance prévoyance, aux droits de laquelle vient l'institution AG2R prévoyance ; Attendu que le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois principal et incident ;

Mais sur le premier moyen

du pourvoi principal :

Vu

l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour évaluer la perte de gains professionnels futurs de Mme X... avant recours des tiers payeurs et dire qu'il ne lui revenait aucune somme après imputation des sommes revenant à ces derniers, l'arrêt retient

que Mme X... peut prétendre à l'indemnisation de la perte de gains professionnels résultant de son licenciement ; qu'elle ne démontre ni qu'elle était dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle après son licenciement, ni qu'elle a fait la moindre démarche pour retrouver un emploi ; qu'elle sera donc indemnisée par la somme de 60 000 euros ; que ce préjudice a été totalement réparé par la rente invalidité versée par la caisse pour un montant de 36 857,48 euros, par les indemnités journalières d'un montant de 37 106,96 euros ainsi que par la rente complémentaire invalidité d'un montant de 61 391,33 euros versées par la société Prémalliance, après la date de consolidation, de sorte qu'il ne reste aucun solde pour la victime et qu'il subsiste un reliquat total de prestations non imputées de 75 355,77 euros ;

Qu'en statuant ainsi

, alors qu'il résulte des productions que M. Y... et l'assureur avait subsidiairement conclu que l'indemnité susceptible d'être allouée à Mme X... au titre des pertes de gains professionnels futurs pouvait être calculée, en fonction des justificatifs produits, à la somme de 110 589,69 euros avant imputation des prestations indemnitaires versées par les tiers payeurs, et qu'un solde d'indemnité subsistait alors en faveur de la victime, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

: DECLARE non admis le pourvoi incident ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement en ses dispositions concernant la créance de la caisse primaire d'assurance maladie de Savoie, alloué à Mme Geneviève X... la somme de 19 660 euros en réparation de son préjudice corporel, et alloué à la société AG2R la somme de 90 776,04 euros en remboursement des prestations versées à la victime, l'arrêt rendu le 19 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne M. Y... et la société Pacifica aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... et la société Pacifica à payer à Mme X... la somme globale de 2 500 euros, rejette les autres demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille douze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme Geneviève X..., demanderesse au pourvoi principal PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué : D'AVOIR décidé qu'il ne revenait aucune somme à Madame X... au titre de l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs, l'intégralité de la réparation étant allouée à AG2R PREVOYANCE, et d'avoir en conséquence condamné in solidum Monsieur Y... et la société PACIFICA à payer, d'une part, à Madame X... la seule somme de 19.660 € en réparation de son préjudice corporel, ladite somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter de l'arrêt pour le surplus, et, d'autre part, à AG2R PREVOYANCE la somme de 90.776,04 € en remboursement des prestations versées à la victime, avec intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2009, jour de la demande, et capitalisation des intérêts ; AUX MOTIFS QUE, « sur le préjudice : (…) préjudices patrimoniaux : (…) o permanents, après consolidation : - perte de gains professionnels futurs. Les experts ont conclu que Mme X..., droitière et exerçant des fonctions de gestion, était apte à reprendre son emploi et que les problèmes psychologiques qu'elle a rencontrés n'entraînent pas de déficit fonctionnel. Toutefois, les arrêts de travail délivrés à Madame X... se sont prolongés jusqu'au mois de juin 2003 pour algodystrophie, puis jusqu'en décembre 2003, pour algodystrophie et dépression, le diagnostic d'algodystrophie posé par les médecins traitants de la victime n'étant cependant pas retenu par l'expert judiciaire pour qui il subsiste un doute sur les causes et l'organicité de cette raideur douloureuse de l'épaule gauche. Le licenciement prononcé le 11 juin 2003 a pour cause la perturbation qui est résultée pour l'office de tourisme de l'absence prolongée de Madame X..., or, cette absence est due aux problèmes de santé subis par la victime à la suite de l'accident. En conséquence, il existe un lien de causalité entre l'accident et le licenciement, Madame X... peut donc prétendre à l'indemnisation de la perte de gains professionnels résultant de son licenciement. Madame X... qui ne démontre ni qu'elle était dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle après son licenciement, ni qu'elle a fait la moindre démarche pour retrouver un emploi, sera indemnisée par la somme de 60.000 €. Ce préjudice a été totalement réparé par la rente invalidité versée par la Caisse primaire d'assurance maladie pour un montant de 36.857,48 €, par les indemnités journalières d'un montant de 37.106,96 € ainsi que par la rente complémentaire invalidité d'un montant de 61.391,33 € versées par la société PREMALLIANCE, après la date de consolidation, de sorte qu'il ne reste aucun solde pour la victime et qu'il subsiste un reliquat total de prestations non imputées de 75.355,77 € (37.106,96 € + 36.857,48 € + 61.391,33 €) - 60.000 € . La société AG2R recevra la somme de 60 000 € et reste en droit de percevoir celle de 38.498,29 € (37.106,96 € + 61.391,33 €) - 60.000 € » ; 1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant néanmoins, pour fixer à la somme de 60 000 € l'indemnisation de Madame X... au titre de la perte de gains professionnels futurs, que la victime ne démontrait ni qu'elle avait été dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle après son licenciement, ni qu'elle avait fait la moindre démarche pour retrouver un emploi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle avait relevé d'office, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige, tel qu'il résulte des prétentions des parties ; qu'en fixant néanmoins à la somme de 60.000 € l'indemnisation de Madame X... au titre de la perte de gains professionnels futurs, bien que Monsieur Y... et la société PACIFICA aient proposé, à titre subsidiaire, de fixer cette indemnisation à la somme de 110.589,69 €, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE les tiers payeurs ne peuvent obtenir le remboursement des sommes versées aux victimes d'une atteinte à leur personne que si ces sommes ont un lien direct avec le fait dommageable ; qu'en imputant néanmoins les indemnités journalières versées par l'institut PREMALLIANCE PREVOYANCE après le 31 mars 2003 sur l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs résultant du licenciement de Madame X..., sans rechercher s'il existait un lien de causalité entre l'accident subi par la victime et ces indemnités journalières versées postérieurement à la date de consolidation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 29 et 30 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; 4°) ALORS QUE les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les indemnités allouées à la victime ; que la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations ; qu'en ce cas, l'assuré peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence aux tiers payeurs ; qu'en imputant néanmoins la créance de AG2R PREVOYANCE sur l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs, fixée à la somme de 60.000 € en raison de l'absence de recherche d'emploi de Madame X..., sans vérifier si, en présence de cette limitation du droit à indemnisation de la victime, les dommages-intérêts réparant la perte de gains professionnels futurs ne devaient pas être attribués par préférence à Madame X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985. SECOND MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué : D'AVOIR décidé qu'il ne revenait aucune somme à Madame X... au titre de l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent, l'intégralité de la réparation étant allouée à AG2R PREVOYANCE, et d'avoir en conséquence condamné in solidum Monsieur Y... et la société PACIFICA à payer, d'une part, à Madame X... la seule somme de 19.660 € en réparation de son préjudice corporel, ladite somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter de l'arrêt pour le surplus, et, d'autre part, à AG2R PREVOYANCE la somme de 90 776,04 euros en remboursement des prestations versées à la victime, avec intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2009, jour de la demande, et capitalisation des intérêts ; AUX MOTIFS QUE, « sur le préjudice : (…) préjudices extrapatrimoniaux : (…) o permanents, après consolidation : - déficit fonctionnel permanent : les premiers juges ont à juste titre alloué la somme de 13.200 €, ce poste a été totalement indemnisé par le reliquat non imputé de la rente d'un montant total de 75.355,77 €, dont 38.498,29 € pour la société AG2R, il ne revient par conséquent aucune somme de ce chef à la victime et la société AG2R peut imputer le reliquat de sa créance sur la somme de 13.200 € » ; 1°) ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige, tel qu'il résulte des prétentions des parties ; qu'en imputant néanmoins la rente complémentaire d'invalidité servie par AG2R PREVOYANCE sur l'indemnisation allouée à Madame X... au titre du déficit fonctionnel permanent, bien que AG2R PREVOYANCE ait seulement demandé l'imputation de sa créance sur l'indemnisation allouée au titre des pertes de gains professionnels futurs, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE le recours subrogatoire du tiers payeur s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qu'il a prises en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel, sauf s'il établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer, pour imputer la rente complémentaire d'invalidité versée par l'institut PREMALLIANCE PREVOYANCE sur l'indemnisation allouée à Madame X... au titre du déficit fonctionnel permanent, que ce poste avait été totalement indemnisé par la rente d'invalidité, sans indiquer en quoi la prestation servie avait permis d'indemniser de manière incontestable un poste de préjudice personnel normalement exclu du recours subrogatoire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985. Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Pacifica et M. Y..., demandeurs au pourvoi incident Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. Y... et la société Pacifica à payer à AG2R Prévoyance la somme de 90.776,04 € en remboursement des prestations versées à la victime, outre les intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2009 et la capitalisation des intérêts ; AUX MOTIFS QUE les demandes de la société AG2R, venant aux droits de la société Prémalliance Prévoyance, au titre des dépenses de santé, 1.890,04 € et des indemnités journalières, 15.686 €, versées avant la consolidation de la victime, non contestées, seront confirmées ; qu'elle recevra également la somme totale de 73.200 € au titre des compléments d'indemnités journalières et de la rente complémentaire d'invalidité versés à la victime après consolidation, soit une somme totale de 90.776,04 € qui portera intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2009, date de la demande en paiement ; ALORS QUE le tiers payeur ne peut présenter des demandes en paiement qu'au titre de sommes ayant un lien direct avec le fait dommageable ; que dans leurs écritures d'appel (conclusions signifiées le 25 mai 2011, p. 28 et 29), M. Y... et la société Pacifica faisaient valoir que les prestations versées par AG2R Prévoyance, venant aux droits de Premalliance Prévoyance, postérieurement à la date de consolidation, n'étaient pas imputables à l'accident litigieux, de sorte qu'AG2R Prévoyance ne pouvait présenter aucune demandes à ce titre ; qu'en estimant qu'AG2R Prévoyance était fondée à obtenir paiement d'une somme de 73.200 € « au titre des compléments d'indemnités journalières et de la rente complémentaire d'invalidité versés à la victime après consolidation » (arrêt attaqué, p. 10 § 1), sans rechercher s'il existait un lien de causalité direct entre l'accident subi par Mme X... et les indemnités versées par l'institution de prévoyance après la date de consolidation fixée au 31 mars 2003, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et 29 et 30 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985.