Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 23 septembre 2014, 13-19.630

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2014-09-23
Cour d'appel de Rouen
2013-02-28

Texte intégral

Sur le moyen

unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 28 février 2013), que la société La Fiduciaire Concorde (la société La Fiduciaire), cabinet d'expertise comptable, a effectué des prestations comptable, sociale, et fiscale pour la société Pulvorex ; que celle-ci a contesté le montant de quatre factures et en a refusé le paiement ; que la société La Fiduciaire a obtenu le 25 février 2010 une ordonnance d'injonction de payer une certaine somme à l'encontre de la société Pulvorex, qui a formé opposition ;

Attendu que la société Pulvorex fait grief à

l'arrêt d'avoir confirmé le jugement entrepris l'ayant condamnée à verser à la société La Fiduciaire une certaine somme, alors, selon le moyen : 1°/ qu'il appartient au prestataire de service, tel que l'expert-comptable, qui sollicite la condamnation de son client à paiement, d'établir, comme ayant la charge à la preuve, l'existence et l'étendue des prestations dont il demande la rémunération ; qu'en énonçant successivement qu'« il n'est pas démontré qu'il le coût total de cette prestation ne serait pas conforme aux prestations effectuées comportant de multiples taches entrant dans la mission de l'expertise comptable ¿ et indispensables à la vie de la société cliente » ou que « rien ne permet d'établir que ces taches, similaires à celles facturées les années précédentes, n'auraient pas été exécutées », ou encore que : « rien n'établit que ces prestations qui entrent également dans les attributions de l'expert-comptable, n'auraient pas été fournies », les juges du fond ont fait peser la charge de la preuve de l'existence et l'étendue des prestations sur le client et ainsi ont violé l'article 1315 du code civil ; 2°/ que, saisie d'une contestation de la part du client quant aux sommes réclamées, le juge a l'obligation de s'assurer que le prestataire fournit des éléments permettant d'apprécier le montant des honoraires réclamées puis de déterminer si le montant réclamé correspond à l'importance et à la qualité du travail fourni ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, aux termes des motifs rappelés à la première branche, les juges du fond, qui ont refusé d'exercer leur office, s'agissant de la contrepartie financière des prestations, ont violé l'article 1134 du code civil ; 3°/ qu'à partir du moment où le client a choisi de contester les sommes réclamées au titre d'un certain exercice, les juges du fond ont l'obligation d'exercer leur contrôle, dans les termes indiqués à la deuxième branche, peu important les paiements effectués sans contestation par le client au titre d'exercices antérieurs ; qu'à cet égard, en ce qu'il s'est fondé sur un motif inopérant, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu

qu'après avoir vérifié la nature des prestations facturées et récapitulé les montants d'honoraires pour les cinq exercices comptables précédant celui pour lequel les factures contestées avaient été établies, et relevé, d'abord, que les honoraires n'avaient pas progressé dans les conditions alléguées, ensuite, que la société La Fiduciaire justifiait de factures détaillées correspondant à des prestations entrant dans la mission d'un expert-comptable et pour lesquelles les honoraires avaient faiblement augmenté par rapport à l'année précédente, enfin, que la société Pulvorex ne soutenait pas que tout ou partie de ces prestations n'avaient pas été exécutées et, pour ce qui concernait les factures litigieuses, n'en contestait pas la qualité, l'arrêt retient que les demandes en paiement de la société La Fiduciaire sont fondées ; que par ces constatations et appréciations souveraines faisant ressortir que cette dernière justifiait de l'existence et du contenu des prestations qu'elle avait facturées, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise et qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a pu statuer comme elle l'a fait ; que le moyen, qui critique un motif inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Pulvorex aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société La Fiduciaire Concorde la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la société Pulvorex. L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QUE, confirmant le jugement entrepris, il a confirmé l'ordonnance rendue le 25 février 2010 par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de DIEPPE, ayant condamné la société Pulvorex à payer à la société La Fiduciaire Concorde la somme de 40. 281, 28 euros ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « La société La Fiduciaire Concorde demande le paiement à la société Pulvorex du solde des factures suivantes :- facture d'honoraires MN0000024 concernant des prestations comptables et fiscales (intervention de Melle X... et M. Y...au cours des mois d'août et septembre 2008- révision des comptes au 31. 07. 2008- rendez-vous) en date du 30 septembre 2008 d'un montant de 6. 003, 92 ¿.- facture d'honoraires MN concernant des prestations comptables et fiscales (temps passés par Melle X... et M. Y...en octobre 2008- établissement des comptes annuels au 31 juillet 2008- rendez-vous) en date du 31 octobre 2008 d'un montant de 6. 912, 88 ¿.- facture d'honoraires IVIN0000012 concernant l'approbation des comptes clos le 31 juillet 2008 et le traitement fiscal de la distribution de dividendes en date du 31 janvier 2009 d'un montant de 1. 471, 08 ¿,- facture MN concernerait un traitement comptable et social pour la période du 1 " août 2008 au 31 juillet 2009 en date du 31 janvier 2009 pour un montant de 34. 923, 20 e. Selon le grand livre de La Fiduciaire, deux avoirs ont été émis en janvier et décembre 2009 d'un montant total de 2. 571, 40 e, et Pulvorex a réglé la somme la 6. 458, 40 ¿ le 18 décembre 2009, ce qui correspond pour cette société aux prestations sociales (établissements des bulletins de salaire et déclaration de bordereaux de charges sociales) effectuées pour la période du lel août 2008 au 31 juillet 2009 ainsi qu'il résulte de sa lettre du 15 décembre 2009 à hauteur de 5. 400 E, le solde correspondant aux prestations sociales effectuées d'août à novembre 2009 et à la rédaction d'un contrat de travail ; que comme le soutient à juste titre la société Pulvorex la saisine du conseil de l'ordre des experts comptables n'est pas un préalable obligatoire à toute action en contestation ; qu'il n'est pas contesté que la société Pulvorex a un exercice comptable qui s'ouvre le 1 " août de chaque année pour se terminer le 31 juillet de l'aimée suivante ; que la société La fiduciaire verse aux débats l'analyse des honoraires Pulvorex au titre de chacun des exercices de 2003/ 2004 (millésime 2004), 2004/ 2005 (millésime 2005), 2005/ 2006 (millésime 2006), 2006/ 2007 (millésime 2007), 2007/ 2008 (millésime 2008), 2008/ 2009 (millésime 2009) distinguant 4 postes de missions, à savoir : comptable, sociale, juridique et ponctuelle à laquelle sont annexées les factures correspondant aux travaux effectuées au titre de chacune d'entre elles et sur lesquelles figure systématiquement le millésime concerné, contrairement à ce que soutient la société Pulvorex ; que selon le tableau récapitulatif dressé par la société la Fiduciaire dont les chiffres sont corroborés par les pièces ci-dessus, le montant total des honoraires hors taxe facturés par exercice comptable, pour les six derniers exercices, à la société Pulvorex est le suivant : 2003/ 2004 : 25. 565 2004/ 2005 : 24. 184 2005/ 2006 : 28. 313 2006/ 2007 : 37. 682 2007/ 2008 : 35. 714 2008/ 2009 : 28. 880 Que la société Pulvorex, pour preuve de la progression constante des facturations du " millésime 2003 au millésime 2008 ", verse aux débats un tableau dont la ligne intitulée " Factures correspondant aux honoraires sur ex... " qui correspond, selon elle, aux exigences de reclassement " par millésime " invoquée par la société La Fiduciaire Concorde, fait effectivement apparaître pour : 2003/ 2004 : 26. 473 2004/ 2005 : 25. 594 2005/ 2006 : 28. 175 2006/ 2007 : 32. 115 2007/ 2008 : 41. 779 2008/ 2009 : 31. 050 ; Que ce seul tableau ne suffit cependant pas à contredire la facturation par millésime que la Fiduciaire Concorde a appliquée, dans la mesure où chacune des factures mentionne avec précision la nature des prestations et la période sur lesquelles elles portent, ce qui permet ainsi leur affectation à tel ou tel exercice. Il y a donc lieu de retenir le tableau de la Fiduciaire Concorde comme élément de comparaison de l'évolution de la facturation des prestations de 2003 à 2009 ; qu'il résulte de ce tableau que les facturations du millésime 2003 au millésime 2008 n'ont pas progressé dans les proportions indiquées par Pulvorex ; que par ailleurs, la société Pulvorex ne conteste pas la facturation des prestations sociales effectuées par son expert-comptable pour chacun des exercices, soit pour la période contestée 2008/ 2009, 5. 400 ¿ HT (facture MN0000017) ; que s'agissant de la mission comptable, au vu du tableau de la Fiduciaire, si les honoraires ont progressé entre 2004 et 2008, la facturation MN0000017 pour la période contestée 2008/ 2009 d'un montant total de 23. 800 ¿ HT est inférieure à celle des années précédentes, et aucune des pièces versées par la société Pulvorex n'est versée aux débats qui justifie d'une surfacturation effectuée au titre des aimées précédentes. Elle s'est, d'ailleurs, acquittée des factures pour les années précédentes, sans aucune contestation avant son courriel du 9 septembre 2009 ; qu'en ce qui concerne la facture MN0000024 d'un montant de 5. 020 ¿ HT, soit 6. 003, 92 ¿ TTC, celle-ci fait référence aux interventions de Melle X..., employée, et M. Y..., expert-comptable, au cours des mois d'août et septembre 2008 pour la révision des comptes au 31 juillet 2008 ; que la facture N'MN0000002 d'un montant de 5. 780 ¿ HT, soit 6. 912, 88 ¿ TTC, vise le temps passé par les mêmes personnes en octobre 2008 pour l'établissement des comptes annuels au 31 juillet 2008 ; qu'à l'examen comparatif de la facturation de la mission comptable effectuée pour l'exercice 2006/ 2007, et qui, sauf preuve contraire a été acquittée sans contestation, d'un montant de 24. 368 ¿, et de celle établie pour l'exercice 2007/ 2008 d'un montant total de 25. 115 e, en ce compris les deux factures litigieuses, il n'existe qu'une faible augmentation du coût total de cette prestation qui s'explique par le temps passé par chacun des intervenants, dont il n'est pas démontré qu'il ne serait pas conforme aux prestations effectuées comportant de multiples taches entrant dans la mission de l'expertise comptable, (situation comptable à diverses époques de l'année, travaux concourant à l'établissement des comptes annuels, relations avec le commissaire aux comptes, validation des déclarations de TVA, établissement des déclarations fiscales...) et indispensables à la vie de la société cliente ; que rien ne permet d'établir que ces taches, similaires à celles facturées les années précédentes, n'auraient pas été exécutées ; que par ailleurs, il n'est pas davantage démontré que le taux horaire moyen pratiqué en 2008 de 80, 5 HT serait excessif, la seule lettre de mission envoyée à la société PULVOREX en date du 3 mai 2010, sans aucune indication du cabinet d'expertise comptable n'y suffisant pas. S'agissant de la facture N'MN0000012 d'un montant de 1. 471, 08 ¿ et correspondant à des prestations comptables (approbation des comptes clos le 31 juillet 2008 AG annuelle du 26. 01. 2009, rapport de gestion, annexe sur conventions...) pour 1. 010 C, et au traitement fiscal de la distribution des dividendes pour 160 q, rien n'établit que ces prestations qui entrent également dans les attributions de l'expert-comptable, n'auraient pas été fournies ; qu'enfin, s'agissant des observations formulées par la société Pulvorex sur la qualité des travaux de la Société La Fiduciaire Concorde, qui portent sur une assistance à contrôle fiscal en 2007, sur une récupération de TVA sur créances irrécouvrables effectuée par le cabinet comptable qui, selon le commissaire aux comptes de la société Pulvorex, serait irrégulière, ces critiques qui portent sur des prestations non visées par les factures litigieuses, ne seront pas prises en compte. Au vu de l'ensemble de ces éléments, la société Fiduciaire Concorde est donc bien fondée à solliciter le règlement par la société Pulvorex du solde desdites factures, soit la somme de 40. 281, 28 ¿. » ; AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « la mission de la SARL LA FIDUCIAIRE CONCORDE était triple, une mission comptable qui consiste à l'établissement du bilan, une assistance juridique, une mission sociale établissement des bulletins de paies, des contrats de travail et une assistance à la procédure de licenciement et une facturation d'honoraires pour une assistance lors d'un contrôle fiscal ; que la somme réclamée correspond à un ensemble de factures soit :- Facture d'honoraires de 6. 003, 92 ¿ TTC du 30 septembre 2008 correspondant à une intervention de Mademoiselle X... et de Monsieur Y...sur le bilan 2008, Facture d'honoraires de 6. 912, 88 E TTC du 31 octobre 2008 correspondant à une intervention de Mademoiselle X... et de Monsieur Y...sur le bilan 2008, Une note d'honoraires pour une assistance juridique, assemblée générale, rapport de gestion, formalités de dépôt, traitement fiscal de la distribution de dividendes de 1. 471, 08 E, La note d'honoraires du 31 janvier 2009 concerne les travaux suivants :- Traitement social : 5. 400 HT-Traitement comptable et social pour le bilan arrêté le 31 juillet 2009, selon lettre de mission du 26 janvier 2009 pour un montant de : 23. 800 ¿ HT soit 34. 923, 20 E TTC ; que dans ses écritures la SAS PULVOREX informe le Tribunal que le temps passé sur le site par la collaboratrice de la SARL LA FIDUCIAIRE CONCORDE s'est considérablement réduit, de plus la sortie de l'actionnaire américain a réduit également les besoins de la SAS PULVOREX, en effet ceux-ci exigeaient une situation mensuelle, malgré toutes ses allégations la SAS PULVOREX n'a jamais contesté le montant des honoraires et la qualité de la prestation de la SARL LA FIDUCIAIRE CONCORDE devant le conseil de l'ordre des experts comptables ; que le Tribunal déboutera la SAS PULVOREX de ses demandes, le tableau récapitulatif des honoraires facturés pour chaque exercice comptable par la SARL LA FIDUCIAIRE CONCORDE à la SAS PULVOREX ainsi que les factures détaillées (nature de la mission) démontrent que les honoraires facturés pour le millésime 2008/ 2009 sont similaires à ceux facturés pour les millésimes précédents avec une légère augmentation, que le Tribunal confirmera l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 25 février 2010 par le Président du Tribunal de Commerce de DIEPPE en ce qu'elle a condamné la SAS PULVOREX à payer à la SARL LA FIDUCIAIRE CONCORDE la somme principale de 40. 281, 28 ¿ ¿ » ; ALORS QUE, premièrement, il appartient au prestataire de service, tel que l'expert-comptable, qui sollicite la condamnation de son client à paiement, d'établir, comme ayant la charge à la preuve, l'existence et l'étendue des prestations dont il demande la rémunération ; qu'en énonçant successivement qu'« il n'est pas démontré qu'il le coût total de cette prestation ne serait pas conforme aux prestations effectuées comportant de multiples taches entrant dans la mission de l'expertise comptable ¿ et indispensables à la vie de la société cliente » ou que « rien ne permet d'établir que ces taches, similaires à celles facturées les années précédentes, n'auraient pas été exécutées », ou encore que : « rien n'établit que ces prestations qui entrent également dans les attributions de l'expert-comptable, n'auraient pas été fournies » (arrêt p. 7, alinéas 6 à 8), les juges du fond ont fait peser la charge de la preuve de l'existence et l'étendue des prestations sur le client et ainsi ont violé l'article 1315 du code civil ; ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, saisie d'une contestation de la part du client quant aux sommes réclamées, le juge a l'obligation de s'assurer que le prestataire fournit des éléments permettant d'apprécier le montant des honoraires réclamées puis de déterminer si le montant réclamé correspond à l'importance et à la qualité du travail fourni ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, aux termes des motifs rappelés à la première branche, les juges du fond, qui ont refusé d'exercer leur office, s'agissant de la contrepartie financière des prestations, ont violé l'article 1134 du code civil ; ET ALORS QUE, troisièmement, à partir du moment où le client a choisi de contester les sommes réclamées au titre d'un certain exercice, les juges du fond ont l'obligation d'exercer leur contrôle, dans les termes indiqués à la deuxième branche, peu important les paiements effectués sans contestation par le client au titre d'exercices antérieurs ; qu'à cet égard, en ce qu'il s'est fondé sur un motif inopérant, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 1134 du code civil.