Cour de cassation, Troisième chambre civile, 23 novembre 1994, 92-16.527

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
1994-11-23
Cour d'appel de Rennes (4e Chambre)
1992-05-21

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS I - Sur le pourvoi n° Q 92-16.527 formé par M. Jean-Pierre Z..., demeurant ... à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) et actuellement ... à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), en cassation d'un arrêt rendu le 21 mai 1992 par la cour d'appel de Rennes (4e Chambre), au profit : 1 ) de la société civile immobilière Vauban, dont le siège est rue Sainte-Barbe à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, demeurant audit siège, 2 ) de la société Y..., entreprise générale de bâtiment, dont le siège social est ... à Saint-Briac-sur-Mer (Ille-et-Vilaine), prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, demeurant audit siège, 3 ) de M. Michel X..., demeurant à Saint-Jouan des Guérets (Ille-et-Vilaine), défendeurs à la cassation ; II - Sur le pourvoi n° N 92-17.353 formé par M. Michel X..., en cassation du même arrêt, au profit : 1 ) de la société anonyme Y... , prise poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, 2 ) de la société civile immobilière Vauban, prise poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, 3 ) de M. Jean-Pierre Z..., défendeurs à la cassation ; Le demandeur au pourvoi n° Q 92-16.527 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Le demandeur au pourvoi n° N 92-17.353 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 19 octobre 1994, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Fromont, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Mlle Fossereau,, MM. Chemin, Villien, conseillers, M. Chapron, conseiller référendaire, M. Roehrich, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Fromont, les observations de Me Boulloche, avocat de M. Z..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de la SCI Vauban, de Me Hémery, avocat de la société Y..., de Me Parmentier, avocat de M. X..., les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Joint les pouvois n° Q 92-16.527 et N 92-17.353 ;

Sur le moyen

unique du pourvoi n° Q 92-16.527 : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 21 mai 1992), que la société civile immobilière Vauban (SCI) a, suivant marché du 17 octobre 1988, fait construire un hôtel sous la maîtrise d'oeuvre de M. Z..., architecte, par la société d'exploitation des Etablissements Y... ; qu'au cours des travaux de terrassement sous-traités par cette entreprise à M. Chapon, des désordres ont été causés à l'immeuble voisin entraînant des retards dans la livraison de l'hôtel ; qu'après expertise, la SCI a assigné en réparation les constructeurs ;

Attendu que M. Z... fait grief à

l'arrêt de le condamner à payer une certaine somme à la SCI Vauban, in solidum avec la société Y..., à garantir cette dernière à concurrence du quart de la condamnation prononcée au profit de la SCI Vauban et à payer à la société Y... une somme de 112 507,09 francs en la garantissant du quart des condamnations qui pourraient intervenir à son encontre au titre des pénalités de retard, alors, selon le moyen, "1 ) que la cour d'appel, qui a constaté que le sous-traitant Chapon était intervenu seul durant un week-end, sans prévenir qui que ce soit, et que les travaux de terrassement qu'il avait entrepris avaient ébranlé l'immeuble voisin, et qui n'a pas recherché si la société Y..., sous le contrôle exclusif de laquelle il se trouvait, n'avait pas encouru la responsabilité de cette intervention, n'a pas donné de base légale, au regard de l'article 1382 du Code civil, à sa décision condamnant l'architecte à la garantir de la condamnation prononcée contre elle au profit du maître de l'ouvrage, tant pour les travaux rendus nécessaires que pour le retard dans leur exécution ; 2 ) que la cour d'appel, qui a constaté que le rapport d'expertise du sol n'avait été adressé à l'architecte que le 14 décembre 1988, postérieurement à l'initiative unilatérale et inopinée du sous-traitant Chapon, à l'insu de l'architecte, n'a pas donné de base légale, au regard de l'article 1382 du Code civil, à sa décision condamnant l'architecte à garantir l'entrepreneur général de la condamnation prononcée contre celui-ci envers le maître de l'ouvrage, pour n'avoir pas attiré l'attention des entrepreneurs sur les précautions à prendre avant de commencer les travaux ; 3 ) que l'arrêt attaqué a laissé sans réponse, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, les conclusions de M. Z... faisant valoir que la société Y... ayant reconnu que les conséquences dommageables de l'incident des 10-11 décembre 1988 avaient pris fin le 8 avril 1989, le retard survenu dans l'achèvement du chantier après le 15 octobre 1989 ne pouvait leur être imputé au titre de celui-ci" ;

Mais attendu

qu'ayant constaté que l'intervention de M. X... constituait la cause principale du sinistre et retenu que l'architecte n'avait pas appelé l'attention des entrepreneurs sur l'état de l'immeuble voisin et sur les précautions à prendre avant de commencer les travaux, que l'étude du sol avait été réalisée tardivement, que les coupes sur le projet du 25 juin 1988 ne laissaient apparaître aucune reprise en sous-oeuvre sur le mur mitoyen, qu'il aurait fallu donner des instructions aux entrepreneurs pour que les démolitions soient effectuées avec plus de soin et prévoir des reprises en sous-oeuvre avant d'achever celles-ci et d'exécuter les terrassements, la cour d'appel, qui a relevé que le calendrier établi par l'architecte après le sinistre n'avait aucune valeur contractuelle à l'égard du maître de l'ouvrage, fondé à se prévaloir du dépassement du délai initial, a, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le premier moyen

du pourvoi n° N 92-17.353 :

Attendu que M. X... fait grief à

l'arrêt de rejeter sa demande en garantie dirigée à l'encontre de M. Z..., alors, selon le moyen, "que les arrêts qui ne contiennent pas de motifs sont nuls ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a implicitement rejeté la demande formée par M. X... dans ses écritures d'appel, tendant à être garanti par M. Z... de toutes les condamnations prononcées à son encontre ; qu'en considérant néanmoins, dans les motifs de son arrêt, que, compte tenu des négligences de l'architecte, la demande de M. X... à l'encontre de celui-ci pouvait prospérer dans la proportion d'un quart, la cour d'appel, qui s'est ainsi contredite, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile" ;

Mais attendu

que, sans se contredire et accueillant partiellement la demande de M. X..., la cour d'appel a souverainement apprécié les parts de responsabilité et le montant des réparations incombant respectivement à ce dernier et à M. Z... ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen

du pourvoi n° N 92-17.353 :

Attendu que M. X... fait grief à

l'arrêt de le condamner à garantir la société Y..., à concurrence des trois quarts de la condamnation, au paiement de la somme de 98 885,32 francs prononcée contre celle-ci au bénéfice de la SCI Vauban et à payer à la société Y... la somme de 337 521,27 francs, alors, selon le moyen, "que le sous-traitant, bien que tenu à une obligation de résultat vis-à -vis de l'entrepreneur principal, peut s'exonérer de sa responsabilité dès lors que le dommage est dû à une cause étrangère qui ne saurait lui être imputée, par exemple au fait du créancier ; que, dans ses écritures d'appel, M. X... avait fait valoir que, d'une part, l'entrepreneur principal, la société Y..., ne lui avait pas transmis les instructions reçues de l'architecte et, d'autre part, que les travaux de terrassement avaient été exécutés selon les instructions de M. Y..., avec lequel les cotes de niveaux avaient été prises le 10 décembre 1988 ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions d'appel, si M. X..., qui avait exécuté les travaux conformément aux directives de M. Y..., ne devait pas être déchargé de sa responsabilité contractuelle à l'égard de l'entrepreneur principal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil" ;

Mais attendu

qu'ayant relevé que l'architecte n'avait donné aucune instruction précise à la société Y... que celle-ci ne pouvait donc transmettre et que M. X... était intervenu seul sur le chantier sans prévenir, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que les fautes commises par l'architecte et M. X... étaient la cause des dommages, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen

du pourvoi n° N 92-17.353 :

Attendu que M. X... fait grief à

l'arrêt de le condamner à garantir la société Y... dans la proportion des trois quarts des condamnations qui pourraient intervenir à son encontre au titre des pénalités de retard, alors, selon le moyen, "que le débiteur n'est tenu que des dommages-intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors de la conclusion du contrat ; que la cour d'appel, qui a condamné le sous-traitant à payer à l'entrepreneur principal, à titre de dommages-intérêts pour exécution tardive de ses obligations, le montant des pénalités de retard supportées par ce dernier en application du contrat le liant au maître de l'ouvrage, sans rechercher si le sous-traitant pouvait connaître les conséquences de l'inexécution de ses obligations pour l'entrepreneur principal dans ses relations avec le maître de l'ouvrage et spécialement le jeu des pénalités de retard, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1150 du Code civil" ;

Mais attendu

que M. X... s'étant borné, dans ses écritures, à contester le montant des pénalités de retard sans soutenir qu'il en ignorait l'existence, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE les pourvois ; Condamne M. Z... aux dépens du pourvoi n Q 92-16.527, M. X... aux dépens du pourvoi n N 92-17.353 ; Les condamne, ensemble, aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-trois novembre mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.