Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 19 février 2009, 07-21.040

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2009-02-19
Cour d'appel de Douai
2007-09-28

Texte intégral

Sur les deux moyens

réunis, tels que reproduits en annexe : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 septembre 2007), que la caisse primaire d'assurance maladie de Valenciennes a décidé de prendre en charge au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles l'affection déclarée par M. X..., salarié de la société Eternit de 1949 à 1987 ; qu'il a saisi la juridiction de sécurité sociale d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de son employeur ; qu'une cour d'appel a accueilli cette demande ;

Attendu que la société Eternit fait grief à

l'arrêt de dire que la décision de prise en charge de la maladie de son salarié par la caisse lui est opposable et que la caisse pourra poursuivre auprès d'elle le recouvrement des sommes dont elle aurait fait l'avance, de fixer au maximum la majoration de la rente, et d'avoir rejeté sa demande tendant à la désignation d'un médecin expert chargé de prendre connaissance du dossier médical du salarié et de déterminer la nature exacte de la maladie déclarée par lui ;

Mais attendu

que la teneur de l'examen tomodensitométrique mentionné au tableau n° 30 B des maladies professionnelles, qui constitue un élément du diagnostic, n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse en application de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale et dont l'employeur peut demander la communication, que la production de cette pièce médicale ne peut être exigée que dans le cadre d'une expertise ; Et attendu qu'ayant relevé que la caisse et le salarié produisaient notamment le certificat médical initial et le compte-rendu du scanner thoracique ayant confirmé le diagnostic, la cour d'appel, appréciant la valeur et la portée des éléments de preuve produits devant elle et soumis à la discussion contradictoire des parties, a estimé qu'une expertise judiciaire n'était nécessaire ni pour rechercher l'existence de la maladie invoquée, suffisamment démontrée par les documents médicaux produits aux débats, ni pour en établir le caractère professionnel ; Qu'elle en a exactement déduit, sans encourir aucun des griefs du moyen que, la caisse ayant respecté les obligations pesant sur elle en ce qui concerne l'instruction de la demande de reconnaissance de la maladie, et la preuve du caractère professionnel de cette affection étant rapportée, la décision de prise en charge par la caisse était opposable à la société Eternit, et que celle-ci devait rembourser à la caisse les sommes avancées par cette dernière ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Eternit aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Eternit ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Valenciennes la somme de 200 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille neuf

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocat aux Conseils pour la société Eternit PREMIER MOYEN DE CASSATION (Régularité de la procédure d'instruction) Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la décision par laquelle la CPAM de VALENCIENNES a reconnu le caractère professionnel de la maladie est opposable à la société ETERNIT et d'avoir dit que la Caisse pourrait poursuivre le recouvrement des sommes dont elle aura fait l'avance auprès de la société ETERNIT ; AUX MOTIFS QUE « sur l'opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle : attendu qu'en application de l'article R.441-13 du même Code, le dossier constitué par la Caisse Primaire doit comprendre : 1. la déclaration d'accident et l'attestation de salaire ; 2. les divers certificats médicaux ; 3. les constats faits par la Caisse Primaire ; 4. les informations parvenues à la Caisse de chacune des parties ; 5. les éléments communiqués par la Caisse Régionale ; 6. éventuellement, le rapport de l'expert technique ; qu'il résulte par ailleurs de l'article R.441-11 du Code de la Sécurité Sociale que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, la Caisse justifie avoir effectué une enquête administrative, accompli auprès de la CRCAM la démarche nécessaire, sollicité et obtenu l'avis de l'inspecteur du travail, que par courrier en date du 19 février 2005, elle a transmis à l'employeur l'entier dossier comprenant l'avis du médecin conseil reconnaissant la maladie et donnant son avis sur le taux d'incapacité, en l'informant de la fin de l'instruction et de ce qu'elle prendrait sa décision le 28 février 2005, que même si ce courrier n'a été réceptionné par l'employeur que le 21 février,, la Cour estime que le délai qui lui a été laissé pour prendre connaissance des éléments du dossier et faire valoir ses observations était suffisant pour garantir le principe du contradictoire, la décision n'étant finalement intervenue que le 5 octobre 2005, que par ailleurs, l'avis du médecin conseil ressort d'un document intitulé « fiche de liaison médicoadministrative » qui a été transmis à la Société ETERNIT, aux termes duquel ledit médecin conseil a donné son avis sur la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par Monsieur Gilbert X... relevant selon ce médecin du Tableau n°30 des malad ies professionnelles, que la Société ETERNIT n'allègue ni ne démontre que la CPAM DE VALENCIENNES a pris sa décision au vu d'autres documents notamment des clichés radiologiques et/ou tomodensitométriques qui ne lui auraient pas été communiqués » ; ALORS, D'UNE PART, QU'il incombe à la CPAM, organisme de service public chargé de se prononcer sur le caractère professionnel d'une maladie, de vérifier que l'ensemble des conditions prévues par le Tableau des Maladies professionnelles en cause sont remplies ; que lorsqu'un Tableau prévoit des examens spécifiques dans la colonne « désignation des maladies », ces examens constituent une condition nécessaire à la prise en charge sans que l'employeur soit tenu de rappeler à la CPAM qu'elle doit s'assurer de l'existence et de la pertinence de cet examen qui doit figurer au dossier ; que viole dès lors le Tableau n°30 B, les articles L.461-1, R.441-11 et R.441-13 du Code de la sécurité sociale, la Cour d'appel qui déboute la société ETERNIT de sa demande d'inopposabilité de la décision de la CPAM de prendre en charge une maladie au titre du tableau n°30 B en énonçant que l'employeur n'établirait pas que la Caisse avait pris sa décision au regard de clichés tomodensitométriques pourtant expressément exigés par ce Tableau ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsqu'un texte du Tableau des maladies professionnelles subordonne la prise en charge à un examen médical particulier, le principe du contradictoire impose que l'employeur puisse pour discuter effectivement les conditions de la prise en charge, avoir accès à ce document préalablement à toute décision concernant la prise en charge ; que viole le Tableau n°30 B, les articles L.461-1 et R.441-11 du Code de la sécurité sociale l'arrêt qui déboute la société exposante de sa demande d'inopposabilité d'une décision de prise en charge de prétendues plaques pleurales au motif inopérant que l'employeur ne démontrerait pas que la Caisse, elle-même, a pris sa décision au regard de l'examen tomodensitométrique rendu obligatoire par ledit Tableau ; SECOND MOYEN DE CASSATION, SUBSIDIAIRE (Sur la possibilité pour l'employeur de discuter effectivement du caractère professionnel de l'affection déclarée par le salarié devant la juridiction de sécurité sociale) Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé au maximum la rente ou l'indemnisation en capital, d'avoir dit que la décision par laquelle la CPAM de VALENCIENNES a reconnu le caractère professionnel de la maladie est opposable à la société ETERNIT, d'avoir dit que la Caisse pourrait poursuivre le recouvrement des sommes dont elle aura fait l'avance auprès de la société ETERNIT et d'avoir rejeté la demande de la société ETERNIT tendant à la désignation d'un médecin expert chargé de prendre connaissance du dossier médical du salarié et de déterminer la nature exacte de la maladie déclarée par le salarié ; AUX MOTIFS QUE « que s'agissant de la maladie elle-même, il y a lieu de constater que l'employeur n'a émis aucune réserve spécifique lors de la réception de la déclaration de maladie professionnelle, accompagnée du certificat médical initial et notamment n'a pas réclamé la production de l'examen tomodensitométrique certes prévu au tableau n°30 B des maladies professionnelles ; qu'au vu des éléments versés aux débats par la victime et notamment le compte rendu de scanner thoracique du 18 août 2004, celle-ci est bien atteinte de plaques pleurales calcifiées et d'épaississements pleuraux au niveau des régions postérieures moyennes et inférieures droits avec également quelques petites plaques non calcifiées de la plèvre diaphragmatique droite ; qu'une mesure d'expertise judiciaire afin de déterminer la maladie dont le salarié est atteint est dès lors inutile ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré opposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie professionnelle » ; ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'un texte du Tableau des maladies professionnelles subordonne la prise en charge à un examen médical particulier, le principe du contradictoire impose que l'employeur puisse discuter effectivement les conditions de la prise en charge et avoir accès à ce document lorsqu'il conteste le caractère professionnel de la maladie devant la juridiction de sécurité sociale ; que viole le Tableau n°30 B, les articles L.461-1 du Code de la sécurité sociale et l'article 16 du Code de procédure civile, l'arrêt qui déboute la société exposante de sa demande d'inopposabilité d'une décision de prise en charge de prétendues plaques pleurales au motif inopérant que l'employeur ne démontrerait pas que la Caisse, elle-même, a pris sa décision au regard de l'examen tomodensitométrique prévu par ledit Tableau ; ALORS, D'AUTRE PART, QU'en admettant que les examens tomodensitométriques imposés par le Tableau n°30 B n'aient pas à figurer dans le dossier que l'employeur peut obtenir dans le cadre de la procédure d'instruction spécifique conduite par la CPAM, l'employeur demeure en droit de contester par la suite la prise en charge devant les juridictions de Sécurité Sociale, notamment lorsqu'il est actionné en faute inexcusable ; et qu'il ne saurait, dans le cadre de ce débat judiciaire être privé d'un accès direct aux documents litigieux ; qu'en décidant cependant, en l'absence de production des examens tomodensitométriques que la décision de prise en charge des plaques pleurales serait déclarée « opposable » à la Société ETERNIT, et que son adversaire était fondé dans sa prétention de faire reconnaître une faute inexcusable, la Cour d'Appel a privé l'employeur de toute possibilité de contester utilement la nature et le caractère professionnel de l'affection invoquée, en violation des articles 16 et 30 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que, de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ; ALORS, DE TROISIEME PART, QUE l'examen tomodensitométrique imposé par le Tableau n°30 B po ur la prise en charge des plaques pleurales est nécessaire à l'ouverture de toute discussion médicale sur la nature et l'origine de cette affection ; qu'en refusant d'ordonner la production de cette pièce et/ou une expertise de nature à donner une interprétation objective des clichés, l'arrêt qui se contente de viser un simple « compte rendu » de l'examen établi unilatéralement par le médecin de la victime et qui se détermine ainsi par des motifs entièrement inopérants, prive sa décision de base légale au regard tant des articles L.461-1, L.452-1 du Code de la Sécurité Sociale que des articles 16 du Nouveau Code de Procédure Civile et 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ; ALORS, ENFIN QUE la reconnaissance d'une maladie professionnelle et accessoirement d'une faute inexcusable qui en serait à l'origine emporte directement pour l'employeur l'obligation de régler à la Sécurité Sociale des cotisations, des majorations de rente et les indemnités prévues par l'article D.242-6.3, L.452-2 et L.252-3 du Code de la Sécurité Sociale et constitue, de ce fait, un titre de créance dont l'entreprise débitrice doit être à même de contester effectivement la cause, de sorte que viole également l'article 1er du protocole additionnel de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, la Cour d'Appel qui ne permet pas à l'entreprise défenderesse de vérifier si les conditions de prise en charge des plaques pleurales invoquées par la CPAM ont été strictement appliquées en conformité avec le Tableau des maladies professionnelles correspondant à cette affection.