Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème Chambre, 27 juin 2016, 15MA02109

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
  • Numéro d'affaire :
    15MA02109
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Décision précédente :tribunal administratif de Bastia, 19/03/2015
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000032825080
  • Rapporteur : M. Michel POCHERON
  • Rapporteur public :
    M. REVERT
  • Président : M. BOCQUET
  • Avocat(s) : TOMASI
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Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Marseille
2016-06-27
tribunal administratif de Bastia
2015-03-19

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Procédure contentieuse antérieure : L'association " U Levante " a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la délibération en date du 31 mai 2013 par laquelle le conseil municipal de Vescovato a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, et la mise à la charge de la commune de Vescovato de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1300855 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 mai 2015 et le 1er mars 2016, l'association " U Levante ", représentée par MeB..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 19 mars 2015 ; 2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Vescovato en date du 31 mai 2013 ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Vescovato une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la délibération litigieuse méconnaît les articles L. 121-1, L. 123-1-5, L. 146-4 paragraphe I et L. 146-2 du code de l'urbanisme, ainsi que le schéma d'aménagement de la Corse. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2016, la commune de Vescovato, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et que soit mise à la charge de l'association " U Levante " la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la première instance et la somme de 4 500 euros au titre de l'appel. Elle soutient que : - la requête est tardive, et est également irrecevable en raison de la méconnaissance des articles R. 412-1 et R. 411-1 du code de justice administrative ; - les moyens soulevés par l'association " U Levante " ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ; - le schéma d'aménagement de la Corse ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pocheron, - et les conclusions de M. Revert, rapporteur public. 1. Considérant que par délibération du 31 mai 2013, le conseil municipal de Vescovato (Haute-Corse) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ; que l'association " U Levante " a introduit un recours devant le tribunal administratif de Bastia en annulation de cette délibération ; que, par jugement en date du 19 mars 2015, dont cette association relève appel par la présente requête, le tribunal a rejeté la demande ;

Sur le

bien-fondé du jugement attaqué : 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : /1° L'équilibre entre : /a) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux : /b) L'utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières, et la protection des sites, des milieux et paysages naturels (...) " ; 3. Considérant que par sa décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions n'étaient pas contraires aux articles 34 et 72 de la Constitution sous réserve qu'elles soient interprétées comme imposant seulement aux auteurs des documents d'urbanisme d'y faire figurer des mesures tendant à la réalisation des objectifs qu'elles énoncent et que, en conséquence, le juge administratif exerce un simple contrôle de compatibilité entre les règles fixées par ces documents et les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code l'urbanisme ; 4. Considérant qu'en se bornant à soutenir que la capacité d'accueil offerte par la création de nouvelles zones U et AU, prétendument deux fois supérieure aux besoins engendrés par l'évolution démographique de la commune de Vescovato à l'horizon 2020, serait incompatible avec la gestion économe de ses sols, l'association " U Levante " ne démontre pas que le PLU contesté créerait un déséquilibre manifeste entre les séries d'objectifs qu'il mentionne, qui consistent à mettre en place un développement tenant compte de l'évolution de la commune tant sur le plan démographique qu'économique et social, notamment avec la construction d'une voie rapide la reliant à Bastia, sans remettre en cause son positionnement rural ni la qualité environnementale de son territoire ; que, par suite, il n'est pas établi que les règles fixées par le PLU litigieux ne seraient pas compatibles avec les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme ; qu'au surplus, il ressort des données statistiques actualisées produites par la commune sur son évolution démographique et celle des communes voisines, et de l'attractivité nouvelle engendrée par la mise en oeuvre de la voie rapide qui la reliera à Bastia, que la capacité d'accueil envisagée n'apparaît pas manifestement disproportionnée au regard des objectifs du PLU, et est compatible avec les dispositions de cet article L. 121-1 ; 5. Considérant que le quatrième alinéa de l'article L. 146-1 du code de l'urbanisme dispose que " les directives territoriales d'aménagement prévues à l'article L. 111-1-1 peuvent préciser les modalités d'application du présent chapitre (...) " ; qu'en vertu du dernier alinéa de l'article L. 111-1-1, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les plans locaux d'urbanisme (...) doivent être compatibles avec les orientations des schémas de cohérence territoriale et des schémas de secteur. En l'absence de ces schémas, ils doivent être compatibles avec les directives territoriales d'aménagement (...). En l'absence de ces documents, ils doivent être compatibles avec les dispositions particulières aux zones de montagne et au littoral des articles L. 145-1 et suivants et L. 146-1 et suivants " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les auteurs des plans locaux d'urbanisme doivent s'assurer que les partis d'urbanisme présidant à l'élaboration de ces documents sont compatibles avec les directives territoriales d'aménagement ou, en leur absence, avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières, notamment, au littoral ; qu'en vertu des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, l'extension de l'urbanisation doit se réaliser, dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ; qu'il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages ; que, cependant, le schéma d'aménagement de la Corse, approuvé par décret en Conseil d'Etat du 7 février 1992, demeuré applicable à la date du document d'urbanisme litigieux et jusqu'à l'entrée en vigueur du plan d'aménagement et de développement durable de la Corse, ainsi que le prévoit l'article 13 de la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse, a valeur de schéma de mise en valeur de la mer en vertu de l'article L. 144-2 du code de l'urbanisme ; qu'il prescrit que l'urbanisation du littoral demeure limitée ; que, pour en prévenir la dispersion, il privilégie la densification des zones urbaines existantes et la structuration des " espaces péri-urbains ", en prévoyant, d'une part, que les extensions, lorsqu'elles sont nécessaires, s'opèrent dans la continuité des " centres urbains existants ", d'autre part, que les hameaux nouveaux demeurent... ; que de telles prescriptions apportent des précisions relatives aux modalités d'application des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code l'urbanisme et sont compatibles avec elles ; que la compatibilité du plan local d'urbanisme de Vescovato doit ainsi s'apprécier au regard des dispositions du schéma d'aménagement de la Corse ; 6. Considérant qu'il ressort du PLU contesté en ce qui concerne le zonage du secteur Arena-Torra que les zones U2 et U2i sont déjà urbanisées, de manière dense au centre de la zone U2 et sous forme plus diffuse mais continue pour le surplus ; que les zones AUa et AUb sont en continuité de la zone U2, qui doit être regardée comme un centre urbain existant, la zone AUb étant en outre située dans l'emprise de l'infrastructure routière et insérée dans une zone bâtie ; qu'une partie de la zone AUc est séparée de la zone U2 par un espace boisé classé mais de faible étendue et se révèle être pour le surplus dans le prolongement de cette même zone U2 ; qu'ainsi, les zones concernées étant soit déjà elles-mêmes urbanisées, soit situées en continuité avec le centre urbain existant, le zonage du secteur Arena-Torra est compatible avec les dispositions du schéma d'aménagement de la Corse ; 7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-2 du code de l'urbanisme dans ses dispositions en vigueur à la date de la délibération approuvant le PLU querellé : " Pour déterminer la capacité d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d'urbanisme doivent tenir compte : /-de la préservation des espaces et milieux mentionnés à l'article L. 146-6 ; /-de la protection des espaces nécessaires au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes (...) " ; que le schéma d'aménagement de la Corse dispose en outre qu'il a pour vocation de prévoir la protection des terres agricoles à fortes potentialités ; qu'à cet effet, il prescrit que les terres de plaine, de basses vallées et zones de faible pente se voient reconnaître une vocation agricole dominante, l'agriculture devant y être l'activité prioritaire hors des aires actuellement urbanisées, et que les changements d'affectation n'y sont acceptables que dans la mesure où ils ne mettent pas en péril les politiques de compétitivité, de filière, de label et d'appellation de la production agricole ; que, ainsi qu'il a été dit, il appartient au juge administratif, saisi de la légalité d'un plan local d'urbanisme, de s'assurer de la compatibilité de ce document avec ces prescriptions ; 8. Considérant que ces dispositions ne sauraient toutefois être regardées comme interdisant de modifier, lors de la révision d'un plan d'occupation des sols et en fonction des nécessités du développement de l'agglomération à laquelle ce document s'applique, l'affectation de certaines zones et, en particulier, d'ouvrir à l'urbanisation des terrains jusqu'alors consacrés à des activités agricoles ; 9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du paragraphe IV 2 du rapport de présentation, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que le PLU litigieux aboutit à une augmentation de la superficie des terres agricoles, qui passe ainsi de 1 104 à 1 174 hectares par rapport à l'ancien document d'urbanisme de 2007, pour finalement représenter 67 % de la superficie totale de la commune ; que la surface de zones urbaines ou à urbaniser assises sur les terres agricoles a été ramenée de 70 hectares au moment de l'enquête publique à 33 hectares dans le PLU contesté ; que les avis parfois défavorables au classement de certaines terres agricoles en zones U ou AU émis par la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) de la Haute-Corse, la chambre d'agriculture de ce département, l'institut national des appellations d'origine (INAO) et la commission départementale de la consommation des espaces agricoles (CDCEA) de Haute-Corse sont antérieurs aux modifications apportées au PLU approuvé ; que le secteur de Sciancataccia, dont l'association requérante conteste le classement des zones AUa, au Nord et au Sud, ainsi qu'AUb, et U2 au Nord, est très largement à vocation agricole ; que les zones agricoles y ont en outre été étendues par rapport au projet initial suite aux observations de la chambre d'agriculture, de l'INAO et de la CDCEA, notamment en ce qui concerne les parcelles 924, 925, 928, 936 et 937 ; que les autres parcelles n'ont pas fait l'objet d'observations particulières des personnes publiques associées ; que leur classement en zones AUa ou b, alors qu'elles sont situées en zone urbanisée, permet une densification du secteur tout en préservant les terres agricoles ; que le classement de la zone AUa du secteur Torra étant inchangé par rapport au PLU de 2007, il ne saurait être reproché à la commune d'avoir modifié l'affectation d'une zone antérieurement agricole ; que cette zone n'est en outre aucunement concernée par les observations alléguées de l'INAO ; que, dans le secteur Rangia/Pietraolo, qui comprend des zones AUa au Nord et à l'Ouest, ainsi qu'une zone AUc, les parcelles 1357, 1509 et 1359 sont, contrairement à ce qui est soutenu par la requérante, classées en zone A ; que les parcelles 1356 et 1358, de faible superficie, classées en zone AUc, se trouvent en prolongement de la zone U2 et constituent ainsi une zone homogène avec les zones U3 et AUb, permettant une densification des constructions ; que l'association " U Levante " n'établit pas que les classements contestés constitueraient une atteinte aux objectifs de préservation des terres agricoles ; que, notamment, dans aucun des secteurs concernés, ladite association ne démontre que les zones en cause correspondraient à des terres à forte potentialité agricole, ni que les modifications envisagées seraient de nature à mettre en péril les politiques de compétitivité, de filière, de label et d'appellation de la production agricole ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions sus-rappelées de l'article L. 146-2 du code de l'urbanisme et du schéma d'aménagement de la Corse doit être écarté ; 10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme : " I. Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger (...)" ; 11. Considérant que si le plan d'aménagement et de développement durables (PADD) a prévu dans son orientation n° 6 " Préserver les terres agricoles " de " Préserver les espaces agricoles ayant un fort potentiel agronomique, biologique et économique afin de développer l'économie du secteur primaire ", il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'ouverture à l'urbanisation de trente-trois hectares de terres agricoles, de faible ampleur eu égard à la superficie totale des zones agricoles de la commune, et dont la forte potentialité agronomique, biologique et économique n'est pas démontrée, ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme ; 12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa requête, l'association " U Levante " n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'association " U Levante " le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Vescovato et non compris dans les dépens ; 14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Vescovato, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à l'association " U Levante " la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association " U Levante " est rejetée. Article 2 : L'association " U Levante " versera à la commune de Vescovato une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Vescovato est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " U Levante " et à la commune de Vescovato. Délibéré après l'audience du 6 juin 2016, où siégeaient : - M. Bocquet, président, - M. Pocheron, président-assesseur, - Mme Hameline, premier conseiller. Lu en audience publique, le 27 juin 2016. '' '' '' '' 5 N° 15MA02109