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Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2002, 99-46.259

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
26 février 2002
Cour d'appel de Paris
28 octobre 1999

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le pourvoi formé par M. Horace X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 28 octobre 1999 par la cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section C), au profit de la société SNEF, société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ; Vu la communication faite au Procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 2002, où étaient présents : M. Merlin, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire rapporteur, M. Finance, conseiller, M. Soury, conseiller référendaire, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi, avocat de M. X..., de la SCP Gatineau, avocat de la société SNEF, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Paris, 28 octobre 1999), que M. X... a été engagé le 1er décembre 1956 en qualité d'ingénieur de chantier par la société Deschamp devenue en 1975 la société Agec ; qu'en 1977, il a été licencié et réembauché par la société Agec; qu'à la suite de la reprise de cette société par la société SNEF, un contrat de travail à durée déterminée a été conclu du 3 mai 1989 au 31 décembre 1991 puis renouvelé jusqu'au 31 décembre 1992 ; que le salarié a alors perçu une indemnité forfaitaire de rupture prévue au contrat ; qu'il a été à nouveau engagé par contrat à durée déterminée à temps partiel du 5 janvier 1993 au 31 décembre 1993 avec possibilité de renouvellement ; que le 29 septembre 1993, il s'est opposé au renouvellement proposé par l'employeur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment au paiement d'une indemnité de départ à la retraite et d'un rappel de salaire et congés afférents ;

Sur le premier moyen

:

Attendu que le salarié fait grief à

la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande d'indemnité de départ à la retraite, alors, selon le moyen : 1 / qu'ayant constaté que le contrat de travail à durée déterminée avait été prolongé une première fois jusqu'au 31 mars 1992 puis une seconde fois jusqu'au 31 décembre 1992, la cour d'appel qui retient que le salarié ne relève pas le moyen tiré de la requalification dudit contrat en contrat à durée indéterminées cependant qu'il lui appartenait de tirer les conséquences légales de ses propres constatations dont il ressortait que le contrat devait être requalifié et violé les articles L. 122-3-10 et suivants du Code du travail ; 2 / qu'il résulte de l'article 21 de la convention collective applicable que l'ingénieur, assimilé ou cadre de 65 ans révolus qui résilie lui-même son contrat de travail bénéficie néanmoins de l'indemnité de départ, cette indemnité lui étant également attribuée s'il résilie lui-même son contrat à partir de 55 ans révolus, à condition que la résiliation de son contrat soit suivie, sous délai minimum de la justification de la liquidation de la retraite dans les conditions fixées par la convention du 14 mars 1947 à compter de la cessation de son emploi ; qu'en relevant qu'à la date du 31 décembre 1991, il n'avait pas vocation à percevoir l'indemnité de départ, ne remplissant pas les conditions posées par l'article 21 de la convention collective, qu'en effet, s'il n'avait pas encore atteint l'âge de 65 ans, du moins avait-il plus de 55 ans mais qu'il ne justifiait pas avoir lui-même résilié à cette date son contrat de travail ; qu'au contraire, celui-ci était toujours en cours, ayant été prolongé une première fois jusqu'au 31 mars 1992 puis une seconde fois jusqu'au 31 décembre 1992, qu'un nouveau contrat a été conclu le 5 janvier 1993, la cour d'appel qui retient que le salarié ne relève pas le moyen tiré de la requalification dudit contrat en contrat à durée indéterminée et qu'il ne démontre pas que ladite résiliation ait été suivie de la justification de la liquidation de retraite, qu'en effet la liquidation de sa retraite n'interviendra qu'à compter du Ier janvier 1993 au taux de 70 %, qu'il n'est pas établi qu'il ait cessé son emploi, qu'il a poursuivi ses activités dans la société durant l'année 1992, ce qu'il ne conteste pas, la cour d'appel qui, en l'état de ses propres constatations dont il résultait la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée et que de ce fait, il remplissait toutes les conditions conventionnelles, n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations et a violé les articles L. 122-2 et suivants, L. 122-3-10 et suivants du Code du travail ; 3 / qu'au soutien de sa demande en paiement de l'indemnité de départ à la retraite, il faisait valoir qu'elle aurait dû lui être réglée au moment de son passage au salariat à temps partiel, qui a marqué le début de sa retraite progressive, soit au 31 décembre 1992 et ajouté qu'"en tout état de cause, depuis janvier 1994, M. X... perçoit sa pension de retraite complète et n'est salarié dans aucune société" concluant ainsi qu'il réclamait purement et simplement ce qui lui était dû au titre de son indemnité de départ à la retraite compte tenu de ses 36 années passées à la société Agec anciennement Deschamp et devenue SNEF ; qu'en réponse la société SNEF soutenait notamment qu'il ne pouvait davantage prétendre à une indemnité de départ à l'issue de son contrat à temps partiel, ce contrat s'étant terminé le 31 décembre 1993 dès lors notamment que cette année supplémentaire d'activité à temps partiel au service de la SNEF n'avait pu générer une quelconque indemnité de départ à la retraite compte-tenu d'une ancienneté de tout juste un an et que, quand bien même l'ancienneté acquise au service de la société AGEC serait également prise en compte, il ne pouvait prétendre à une indemnité de 570 000 francs au titre de la rupture de son contrat de travail avec la société AGEC, rupture intervenue le 31 décembre 1992 ; que pour le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité de départ à la retraite, la cour d'appel qui énonce que celui-ci ne formerait pas de demande d'indemnité de départ volontaire au titre du contrat de travail à durée déterminée qui'il avait accompli à compter du 5 janvier jusqu'au 31 décembre 1993, a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu

, d'une part, que les dispositions prévues par les articles L. 122-1 et suivants du Code du travail, relatives au contrat à durée déterminée, ont été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation, le juge ne pouvant d'office requalifier les contrats en contrat à durée indéterminée, et qu'il ne résulte ni de la décision attaquée ni des pièces de la procédure que l'intéressé ait sollicité la requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée devant les juges du fond ; Et attendu, d'autre part, que l'article 21 de la convention collective du bâtiment annexe cadre énonce que "l'ingénieur, assimilé ou cadre de soixante cinq ans révolus, qui résilie lui-même son contrat de travail, bénéficie néanmoins de l'indemnité de départ" et que "cette indemnité lui est également attribuée s'il résilie lui-même son contrat de travail à partir de cinquante cinq ans révolus à condition que la résiliation de son contrat soit suivie, sous délai minimum, de la liquidation de sa retraite, acquise dans les conditions fixées par la convention du 14 mars 1997, à compter de la cessation de son emploi" ; que les juges du fond qui ont constaté que le salarié ne remplissait pas ces conditions, ont légalement justifié leur décision ; Qu'il s'ensuit que le moyen pour partie nouveau et mélangé de fait et de droit, est infondé pour le surplus ;

Sur le second moyen

:

Attendu que le salarié fait encore grief à

l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande de rappel de salaire pour le mois de décembre 1993 et de congés payés afférents, alors, selon le moyen : 1 / qu'il appartient à l'employeur qui entend retenir une partie du salaire en excipant de l'absence du salarié d'en rapporter la preuve ; que pour le débouter de sa demande, la cour d'appel qui énonce qu'il n'apporte aucun élément probant contraire aux allégations de l'employeur et de nature à établir qu'il est bien resté à son poste de travail durant le moins de décembre 1993, a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ; 2 / qu'en énonçant qu'il résulte de la procédure diligentée au commercial par la société, qu'à la même époque, il avait effectué des actes de concurrence déloyale envers la société SNEF, ayant transféré à son propre domicile le siège d'une société ATR concurrente de la société SNEF, sans préciser en quoi ces agissements démontraient l'absence du salarié à son poste de travail durant le mois de décembre 1993, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant privant sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 140-1 du Code du travail ; 3 / que le juge ne peut motiver sa décision par référence, sans aucun examen, à une décision antérieure rendue entre les mêmes parties dans une autre instance ; que pour le débouter de sa demande en paiement du salaire du mois de décembre 1993, la cour d'appel qui se borne à énoncer "qu'il résulte de la procédure diligentée au commercial par la société, qu'à la même époque, Horace X... a effectué des actes de concurrence déloyale envers la société SNEF, ayant transféré à son propre domicile le siège d'une société ATR concurrente de la société SNEF", a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 4 / qu'à titre subsidiaire, que la cour d'appel qui se réfère uniquement à la procédure diligentée au commercial par la société sans préciser la nature et la date de la décision qui aurait retenu qu'à la même époque, il aurait effectué des actes de concurrence déloyale envers la société SNEF, a violé les dispositions des articles 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu

que les juges du fond, appréciant l'ensemble des éléments de fait et de preuve qui leur étaient soumis, sans inverser la charge de la preuve ni encourir les autres griefs du moyen, ont retenu que les absences du salarié étaient établies et qu'il ne justifiait pas des frais professionnels qu'il aurait engagés en décembre 1993 ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société SNEF ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille deux.