Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2009, 08-41.123

Synthèse

Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2009-09-23
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2007-12-10

Texte intégral

Sur le moyen

unique pris en ses première et troisième branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en -Provence, 10 décembre 2007) que M. X... a été engagé par la société Hôtel Juana le 1er avril 2003 en qualité de chef de partie ; qu'en 2004, la société a décidé de cesser son activité de restauration gastronomique ; qu'après autorisation accordée par l'Inspection du travail le 5 avril 2005 en raison de la qualité de salarié protégé de M. X..., ce dernier a été licencié pour motif économique le 18 avril 2005 ; que s'estimant non rempli de ses droits en matière de rémunération, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que l'employeur fait grief à

l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. X... des sommes au titre de la récupération des jours fériés, du repos hebdomadaire et des heures supplémentaires effectuées en 2003 et 2004, alors, selon le moyen : 1°/ que nul ne peut se constituer un titre à lui-même ; que par ailleurs, pour établir l'existence d'heures supplémentaires, le juge doit se fonder sur les éléments de preuve produits par chacune des parties ; qu'ainsi la cour d'appel qui, alors que le salarié avait éludé l'établissement des heures supplémentaires par enquête des conseillers rapporteurs désignés par le bureau de conciliation, s'est exclusivement fondée, pour présumer l'existence de dépassements d'horaires, sur des témoignages de collègues de travail et des allégations du salarié fondées sur les seules heures d'ouverture du restaurant, sans réfuter les éléments contraires produits par l'employeur, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 212-1-1 du code du travail, devenu L. 3171-4, et de l'article 1315 du code civil ; 2°/ que pour les mêmes raisons, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve, violant l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu

que la cour d'appel qui a constaté, d'une part, que le salarié produisait préalablement des éléments de nature à étayer sa demande, à savoir des témoignages donnant des informations concordantes sur les heures d'ouverture de cuisine et des décomptes détaillés et quotidiens de ses horaires et d'autre part, que l'employeur ne produisait pas l'horaire collectif auquel il se référait mais un tableau et des horaires de commandes tardives qui établissaient l'accomplissement d'heures supplémentaires par le salarié, a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS

et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Hôtel Juana aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hôtel Juana à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Hôtel Juana Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société HOTEL JUANA à payer à Monsieur X... les sommes de 609,34 euros au titre de la récupération des jours fériés, 253,85 euros au titre du repos hebdomadaire, 22 779,76 euros au titre des heures supplémentaires effectuées en 2003 et 2004 et 1 500 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; AUX MOTIFS QUE si Monsieur X... produit certaines attestations qui ne peuvent être, en ce qui le concerne, probantes en ce qu'elles ne le citent pas ou concernent une période à laquelle il n'était pas encore embauché, il produit en revanche deux attestations de deux salariés cuisiniers, Monsieur Y..., embauché par la Société HOTEL JUANA du 1er avril 2003 au 6 mai 2004, et Monsieur Z..., embauché comme commis de cuisine de juillet 2003 à octobre 2004, donnant des informations concordantes sur les heures d'ouverture de cuisine, à savoir le lundi, vendredi et samedi de 8 h 30 à 15 heures et de 17 h 30 à 23 heures, le jeudi de huit heures à 15 heures et de 17 h 30 à 23 heures, le dimanche de 8 h 30 à 15 h 30 et de 17 h 30 à 23 heures, le restaurant étant fermé les mardis et mercredis, la Société HOTEL JUANA ne produisant quant à elle pas l'horaire collectif auquel elle se réfère, indiquant que le restaurant était ouvert tous les jours, midi et soir, sauf les mardis et mercredis et les mois de juillet et août tous les soirs uniquement avec en 2004 deux jours de fermeture en juillet et deux jours de fermeture en août, précisant que les heures d'ouverture du restaurant étaient de midi à 13 h 30 et de 20 heures à 22 heures quand le restaurant était ouvert midi et soir et de 20 heures à 22 h 30 quand le restaurant était ouvert uniquement le soir et qu'en conséquence les horaires des cuisiniers étaient donc de 9 heures à 14 h 30 et de 18 h 30 à 23 heures en déduisant une heure pour les deux repas pris lorsqu'il y a deux services et de 15 heures à 23 h 30 en déduisant une demi-heure pour le repas pris pour un seul service, affirmation qui ne concorde pas avec le tableau qu'elle produit concernant les horaires de prise de la «dernière commande» par service puisqu'il apparaît que contrairement à ce qu'elle indique beaucoup de «commandes» dépassent les heures d'ouverture théoriques annoncées ; qu'en effet en janvier 2004, 17 commandes ont été prises après 13 h 30 et cinq après 22 heures, en février 2004 16 commandes ont été prises après 13 h 30 et cinq après 22 heures, en mars 2004 des dépassements respectifs de 12 et 3 commandes, en avril 2004 de 15 et 3 commandes, en mai 2004 de seize et de 6 commandes, en juin de 14 et de 4 commandes, en septembre de 8 et de 6 commandes, en octobre de 8 et d'une commande tandis qu'en juillet et août 2004 où le restaurant n'était ouvert que le soir, des dépassements de 8 commandes après 22 h 30 en juillet et de 12 commandes après 22 h 30 en août, tardiveté de certaines commandes certains jours obligeant nécessairement le personnel de cuisine à travailler au-delà des horaires maximum indiqués par la Société HOTEL JUANA et justifiant la demande en paiement d'heures supplémentaires présentée par l'intéressé ; que par ailleurs la nature desdites commandes, le roulement du personnel, le travail à faire en cuisine sont suffisants à expliquer que plusieurs salariés travaillant aux cuisines formulent des demandes d'heures supplémentaires pour des montants différents, la Société HOTEL JUANA se contentant de dire que les demandes respectives de ces différents salariés sont fantaisistes en ce qu'elles concernent des montants différents sans pour autant produire en ce qui la concerne de décompte précis du travail des uns et des autres, sans produire d'horaire collectif, et expliquer, eu égard aux dépassements de prises de commandes susvisés, comment le travail de cuisine aurait pu être accompli pour satisfaire les clients si ce n'est par des dépassements d'horaire, de sorte qu'il doit être constaté que Monsieur X... étaye sa demande autant à partir des attestations qu'il produit qu'à partir des propres pièces produites par la Société HOTEL JUANA induisant nécessairement des dépassements d'horaire, tandis que cette dernière ne produit pas, en infraction à l'article L. 212-1-1 du Code du Travail, de documents justifiant les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'enfin la Société HOTEL JUANA soutient sans l'établir que le restaurant n'aurait ouvert que le 9 avril ce qui rendrait mensonger la revendication d'heures supplémentaires faite pour les premiers jours du mois d'avril alors qu'il ne peut être contesté que Monsieur X... a été embauché le 1er avril 2003, et alors par ailleurs qu'elle indique elle-même qu'il y avait un banquet de 65 personnes le 9 avril avec huit jours de préparation auparavant, de sorte que la revendication d'heures supplémentaires formulée pour cette période ne présente aucun caractère fantaisiste ; ALORS QUE, D'UNE PART, nul ne peut se constituer un titre à lui-même ; que par ailleurs, pour établir l'existence d'heures supplémentaires, le juge doit se fonder sur les éléments de preuve produits par chacune des parties ; qu'ainsi la Cour d'Appel qui, alors que le salarié avait éludé l'établissement des heures supplémentaires par enquête des conseillers rapporteurs désignés par le bureau de conciliation, s'est exclusivement fondée, pour présumer l'existence de dépassements d'horaires, sur des témoignages de collègues de travail et des allégations du salarié fondées sur les seules heures d'ouverture du restaurant, sans réfuter les éléments contraires produits par l'employeur, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 212-1-1 du Code du Travail, devenu L. 3171-4, et de l'article 1315 du Code Civil ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE le contrat de travail précisait que le salarié ne pouvait être amené à effectuer des heures supplémentaires qu'à la demande de l'employeur eu égard aux nécessités de fonctionnement du service ; qu'ainsi, en condamnant la Société HOTEL JUANA à payer des heures supplémentaires, sans constater, en réfutation des conclusions de celle-ci, que l'employeur avait donné son accord au moins implicite aux prétendues heures supplémentaires alléguées, la Cour d'Appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code Civil : ALORS EGALEMENT QUE, pour les mêmes raisons, la Cour d'Appel a renversé la charge de la preuve, violant l'article 1315 du Code Civil.