Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 16 septembre 2014, 13-14.027

Synthèse

Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2014-09-16
Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
2012-11-30
tribunal de commerce de Saint-Denis
2005-03-09

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que M. X..., dirigeant de la société Azur voyages, mise en liquidation judiciaire le 25 juin 2003, a été condamné par une décision pénale du 19 avril 2005 devenue définitive, à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à la société BB voyages (la société BB) ; qu'il a lui-même été mis en liquidation judiciaire le 19 octobre suivant ; que la procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif le 26 mars 2008 ; que le 5 janvier 2010, la société BB, soutenant n'avoir pas été informée de l'ouverture de cette procédure, a assigné M. X..., pour voir lui déclarer inopposable, sur le fondement de l'action paulienne, la donation faite à sa fille, le 7 mai 2003, et, subsidiairement en paiement de dommages-intérêts d'un montant équivalent à celui de sa créance ;

Sur le premier moyen

: Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen

, pris en sa première branche :

Vu

l'article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de dommages-intérêts de la société BB en réparation du préjudice causé par la dissimulation, par M. X..., de sa situation, l'arrêt retient

, d'un côté, que l'extinction de sa créance résulte de l'absence de déclaration de cette créance et non du silence du débiteur, fût-il fautif, et de l'autre, que la fraude n'est pas caractérisée par le seul constat du défaut de remise, par le débiteur au mandataire, de la liste des créanciers ;

Attendu qu'en se déterminant par

de tels motifs, insuffisants à écarter le comportement fautif de M. X... durant le délai de déclaration des créances ou de relevé de forclusion, quand la créance litigieuse résultait d'une décision de justice dont il avait connaissance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société BB voyages de son action en responsabilité, l'arrêt rendu le 30 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société BB voyages PREMIER MOYEN DE CASSATION : Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société BB Voyages de sa demande tendant à ce qu'il soit dit et jugé que la donation faite le 7 mai 2003 par M. Abddoul Aziz X... à sa fille Zarina lui sera inopposable, AUX MOTIFS QU'il ressort des éléments du dossier que la société BB Voyages avait obtenu pour la même créance deux titres exécutoires contre la SARL Azur Voyages à savoir :- une ordonnance du 5 mars 2003 du juge des référés du Tribunal mixte de commerce de Saint-Denis condamnant la société Azur Voyages à lui payer la somme provisionnelle de 47. 449 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2002 ;- une condamnation personnelle de M. X... à lui payer au titre des intérêts civils les sommes de 47. 449 euros, 5000 euros à titre de dommages intérêts et 1. 200 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale (soit 53. 949 euros), prononcée par le Tribunal correctionnel de Saint-Denis le 19 avril 2005 ; que la société BB Voyages a choisi d'exercer l'action paulienne sur le fondement de la condamnation aux intérêts civils prononcée par le tribunal correctionnel de Saint-Denis le 19 avril 2005 ; qu'il ressort des éléments de la procédure suivie devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis que le 19 juin 2003 la SARL Azur Voyages déclarait être en cessation des paiements et la liquidation judiciaire de la société était prononcée le 25 juin 2003 par le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis avec une date de cessation des paiements fixée au 1er mars 2002 ; qu'au moment de la liquidation, l'insuffisance d'actif de la société s'élevait à 721. 960, 47 euros ; que compte tenu des fautes graves de gestion qui lui étaient reprochées (absence de tenue de comptabilité régulière et détournement d'actifs) le mandataire judiciaire Maître Y... assignait le gérant M. X... en comblement de passif ; que par jugement du 9 mars 2005, le tribunal de commerce de Saint-Denis de la Réunion le condamnait à supporter personnellement les dettes de la SARL Azur Voyages à concurrence de 300. 000 euros et prononçait la faillite personnelle de celui-ci pour une durée de dix ans ; que M. X... étant dans l'incapacité de s'acquitter de cette somme a été placé le 19 octobre 2005 en liquidation judiciaire personnelle par le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis en application de l'article L. 624-4 ancien du code de commerce et la procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif le 26 6 mars 2008 ; que quelques jours avant l'ouverture de la procédure collective de la société Azur Voyages et pendant la période suspecte, M. X... faisait donation à sa fille mineure, le 7 mai et le 12 mai 2003, de la nue propriété d'un bien immobilier situé ... à Saint Denis et évalué dans l'acte à la somme de 122. 000 euros ; qu'il résulte des pièces produites que, si la société BB VOYAGES a bien produit le 17 juillet 2003 au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Azur Voyages et que sa créance commerciale a été admise pour un montant de 51. 138, 19 euros, elle n'a par contre pas produit à la liquidation judiciaire personnelle de M. X... sur le fondement de la condamnation aux intérêts civils qu'elle détenait contre lui personnellement, et n'a pas non plus demandé à être relevée de sa forclusion ; que la créance de l'appelante à l'égard de M. X... doit donc être considérée comme éteinte par application des dispositions de l'article L621-46 alinéa 4 ancien du code de commerce ; qu'il s'ensuit que la société BB Voyages, qui a perdu la qualité de créancier de M. X..., est irrecevable à exercer une action paulienne contre ce dernier ; 1° ALORS QU'il résulte de l'article L. 622-32 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 et applicable au litige, qu'après le jugement de clôture pour insuffisance d'actif, les créanciers recouvrent leur droit de poursuite en cas de fraude du débiteur ; qu'en décidant que l'action paulienne, par hypothèse fondée sur la fraude, ne pouvait plus être exercée contre M. X..., faute pour la société BB Voyages d'avoir déclaré la créance de dommages-intérêts résultant du jugement correctionnel du 19 avril 2005, la cour d'appel a violé, ensemble, l'article L. 622-32 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, et l'article 1167 du Code civil ; 2° ALORS QUE la cassation à intervenir du chef ayant écarté l'action en dommages-intérêts entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile la cassation du chef de l'arrêt ayant écarté l'action paulienne dès lors que la créance de dommages-intérêts, résultant de la faute commise par M. X... en dissimulant la procédure collective dont il faisait l'objet était par hypothèse postérieure à l'ouverture de cette procédure de sorte que la créance en résultant n'avait pas à être déclarée à cette procédure là ; SECOND MOYEN DE CASSATION : Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société BB Voyages de sa demande de dommages-intérêts contre en réparation du préjudice causé par la dissimulation de sa situati MOTIFS Q tribunal avait considéré que la dissimulation par le débiteur de la créance de la société BB Voyages, ainsi que sa volonté manifeste d'échapper à ses obligations financières était constitutif d'une fraude qui était à l'origine du préjudice lié à l'extinction de la créance, et donc de la qualité de créancier de la demanderesse, et avait accordé à la société BB Voyages la somme de 60. 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que seul le préjudice directement causé par la faute du débiteur peut être réparé sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'en cas de procédure collective, l'extinction de la créance résulte du défaut de déclaration et non pas du silence gardé par le débiteur, fut-il fautif ; que la fraude ne peut être constituée par le seul constat de la non remise par le débiteur au mandataire de la liste des créanciers, qui n'établit pas le caractère intentionnel de la dissimulation ; que la saisine par les époux X... de la commission des situations de surendettement ne peut davantage caractériser une fraude dans la mesure où la décision d'irrecevabilité prononcée le 4 mars 2005 par le tribunal d'instance de Saint Denis est antérieure au jugement du tribunal correctionnel du 19 avril 2005 accordant à la société BB Voyages le bénéfice des intérêts civils ; que le jugement sera donc réformé en ce qu'il a accordé des dommages et intérêts à la société BB Voyages sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; 1° ALORS QUE le créancier n'ayant pas bénéficié de l'avertissement aux créanciers connus d'avoir à déclarer leur créance par suite de son omission de la liste certifiée des créanciers et du montant des dettes, peut agir contre le débiteur en réparation du préjudice lié à l'extinction de sa créance sur le fondement de l'article 1382 du code civil, à charge pour lui d'établir que ce dernier a commis une fraude en dissimulant intentionnellement sa dette ; qu'après avoir été condamné, par jugement du tribunal correctionnel de Saint-Denis du 19 avril 2005 auquel il était présent et assisté, à payer à la société BB Voyages la somme de 53 449 euros, M. X... a été placé en liquidation judiciaire par jugement du 19 octobre 2005 ce dont l'exposante n'a jamais été avertie faute d'avoir été inscrite sur la liste des créanciers connus ; qu'en se bornant à énoncer que « la fraude ne peut être constituée par le seul constat de la non remise par le débiteur au mandataire de la liste des créanciers, qui n'établit pas le caractère intentionnel de la dissimulation », sans rechercher si M. X... n'était pas inévitablement de mauvaise foi dès lors qu'il connaissait nécessairement la condamnation correctionnelle dont il venait de faire l'objet six mois plus tôt, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du code civil ; 2° ALORS QU'en retenant expressément une « dissimulation » et en affirmant que son caractère intentionnel ne serait pas établi, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs contradictoires, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3° ALORS QU'en déboutant la société BB Voyages de ses demandes, sans répondre aux conclusions qui faisaient également valoir que M. X... avait de mauvaise foi dissimulé la liquidation judiciaire dont il faisait l'objet à l'huissier de justice qui lui avait délivré un commandement de payer en juillet 2006, en un temps où la société BB voyages aurait pu demander un relevé de forclusion (conclusions, page 6), la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile,