Tribunal de grande instance de Paris, 6 novembre 2014, 2013/12965

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2013/12965
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Numéros d'enregistrement : DM/034091 ; DM/060448
  • Parties : CHAUMET INTERNATIONAL SA / CHRISTIAN BERNARD SAS

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2015-10-30
Tribunal de grande instance de Paris
2014-11-06

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 06 Novembre 2014 3ème chambre 1ère section N° RG : 13/12965 DEMANDERESSE S.A. CHAUMET INTERNATIONAL 12 Place Vendôme 75001 PARIS représentée par Maître Emmanuelle HOFFMAN de la SELARL HOFFMAN avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #C0610 DÉFENDERESSE S.A.S. CHRISTIAN B ZA Courtaboeuf [...] 91140 VILLEBON SUR YVETTE représentée par Maître Corinne KHAYAT de la SCP UGGC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire //P0261 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C. Vice-Présidente Camille LIGNIERES, Vice-Présidente Julien. RICHAUD. Juge assistés de Léoncia B. Greffier. DEBATS A l'audience du 16 Septembre 2014 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort EXPOSE DU LITIGE La SA CHAUMET INTERNATIONAL, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro B 342 966 942, commercialise des produits de joaillerie et d'horlogerie sous la marque « CHAUMET » et en particulier les bagues de sa gamme LIENS dont le premier modèle a fait l'objet d'un dépôt auprès de l'OMPI le 11 septembre 1995 sous le n° DM/034 091. Elle précise avoir intégré dans cette gamme une bague en or gris ou or jaune, composée d'un anneau inachevé, dont les deux extrémités sont reliées par deux liens entrelacés, sertis de diamants ou non dont le modèle a été déposé auprès de l'OMPI le 2 avril 2002 sous le n° DM/060448. La SAS CHRISTIAN B, immatriculée au RCS d'EVRY sous le numéro 339 507 394, a pour activité la création, la fabrication et la vente aux professionnels de la bijouterie de produits de bijouterie en or et autres métaux précieux, sertis de diamants ou non et qui s'adressent à une clientèle moyen de gamme et haut de gamme. Elle précise avoir déposé chez un huissier de justice le 10 décembre 2001 un modèle associant un anneau inachevé avec un motif en forme de croix serti de diamants donnant l'impression d'être posé qui lui a servi à développer son offre de bijoux en céramique en lançant en particulier sous la marque « JEELL » deux modèles de bagues composés d'un corps entier en céramique associé à un motif en forme de croix en or avec ou sans diamant incrusté pour les modèles référencés FG020GCN ou posé pour le modèle référencé FH005GCNB déposé à titre de dessin et modèle le 12 février 2009 sous le numéro 090699-094. Par jugement du 21 septembre 2012, le tribunal de grande instance de PARIS, saisi par la SA CHAUMET INTERNATIONAL qui imputait notamment à la SAS CHRISTIAN B des actes de contrefaçon des bagues de sa gamme LIENS, a en particulier : débouté la société CHRISTIAN BERNARD de sa demande tendant au prononcé de la nullité des modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 par la société CHAUMET INTERNATIONAL auprès de l'OMPI et visant la FRANCE, déclaré la société CHAUMET INTERNATIONAL recevable en sa demande en contrefaçon de ses modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 et dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bagues à double liens référencés FG020JCN et FG022GCNB produisant sur l'observateur averti une impression d'ensemble identique à celles des modèles n° 5 et 6 du dépôt n° DM/060448 du 2 avril 2002, les sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN ont commis des actes de contrefaçon de ces modèles au préjudice de la société CHAUMET INTERNATIONAL, dit que les bagues de la collection LIENS correspondant aux modèles n° 1 à 6 déposés par la société CHAUMET INTERNATIONAL le 2 avril 2002 à l'OMPI sous le n° DM/060448 constituent des œuvres protégées au titre du droit d'auteur, déclaré la société CHAUMET INTERNATIONAL recevable en sa demande en contrefaçon de ses droits d'auteur et dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bagues EG020GCN et FG022GCNB à double liens reprenant les caractéristiques originales de deux des bagues de la société CHAUMET les sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN ont commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur au préjudice de la société CHAUMET INTERNATIONAL, condamné la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la société CHAUMET INTERNATIONAL la somme de 600 000 euros en réparation de son préjudice économique consécutifs aux actes de contrefaçon de ses modèles et de ses droits d'auteur, condamné in solidum les sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN à verser à la société CHAUMET INTERNATIONAL la somme de 20 000 euros en réparation de ses préjudices résultant de l'atteinte portée à son image et à la valeur de ses droits de propriété intellectuelle, consécutives aux actes de contrefaçon de ses modèles et de ses droits d'auteur. fait interdiction, en se réservant la liquidation de l'astreinte, aux sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN, de poursuivre la commercialisation des modèles contrefaisants sous astreinte de 1 000 euros par modèle commercialisé à l'expiration d'un délai de huit jours à compter de la signification du jugement et pendant un délai de 6 mois, prononcé la nullité du modèle n° 074197 déposé par la société CHRISTIAN BERNARD le 17 septembre 2007. débouté la société CHAUMET INTERNATIONAL de sa demande tendant au prononcé de la nullité des modèles français de la société CHRISTIAN BERNARD n° 043061-015 du 18 juin 2004. n° 043061-038 du 18 juin 2004. n° 043061-042 du 18 juin 2004 et n° 090699-094 du 12 février 2009. débouté la société CHAUMET INTERNATIONAL de ses demandes au titre de la concurrence déloyale. La SAS CHRISTIAN B s'est désistée de l'appel interjeté contre cette décision après avoir conclu une transaction avec la SA CHAUMET INTERNATIONAL le 14 décembre 2012. La SA CHAUMET INTERNATIONAL explique avoir constaté que des copies serviles de ses modèles LIENS étaient proposées à la vente dans les collections de la marque « JEELL » présentées notamment sur le site internet http://www.luxuryceramic.com de la SAS CHRISTIAN B et en particulier une bague céramique or blanc sous la référence FP060GCN proposée à 350 euros et une bague céramique or blanc diamant sous la référence EP061GCNB proposé à 490 euros ainsi que leur déclinaison en blanc sous la référence LP061GCBB. Un constat d'huissier était dressé sur le site litigieux le 12 juin 2013. Après avoir adressé à la SAS CHRISTIAN B une mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception du 20 juin 2013, la SA CHAUMET INTERNATIONAL a, par exploit d'huissier du 9 septembre 2013, assigné cette dernière devant le tribunal de grande instance de PARIS. Dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 16 juin 2014 auxquelles il sera renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la SA CHAUMET INTERNATIONAL demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et aux visas des articles L 111-1 et suivants, L 335-2, L 512-4 et suivants, L 212-1, L 212-2, L 212-3 et suivants, L 331-1-3 et L 335-4 du code de la propriété intellectuelle, 1108 et suivants, 1134,1165 et 1382 du code civil ainsi que des articles 202 et 700 du code de procédure civile : de recevoir la société CHAUMET INTERNATIONAL en toutes ses demandes, fins et conclusions, de dire que la demande de nullité des dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la société CHAUMET est irrecevable, en tout état de cause, de débouter la société CHRISTIAN BERNARD de sa demande de nullité des modèles, de dire que les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 sont nouveaux et possèdent un caractère propre, de dire que les modèles de bagues à double liens revendiqués par la société CHAUMET INTERNATIONAL sont originaux, de dire que la société CHRISTIAN BERNARD en commercialisant des modèles de bagues reprenant les principales les caractéristiques originales des modèles de bagues à double liens appartenant à la Société CHAUMET INTERNATIONAL, s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon au sens des dispositions des livres I, III et V du code de la propriété intellectuelle, de dire que les modèles de bagues à double liens revendiqués par la société CHAUMET INTERNATIONAL ne sont pas contrefaisants, de dire que la société CHRISTIAN BERNARD s'est également rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au sens de l'article 1382 du code civil de dire que la société CHRISTIAN BERNARD n'a pas exécuté de bonne foi le protocole d'accord signé entre les parties le 14 décembre 2012, de débouter la société CHRISTIAN BERNARD de toutes ses demandes, fins et conclusions

; en conséquence

: de faire interdiction à la société CHRISTIAN BERNARD de poursuivre la commercialisation directe ou indirecte des modèles contrefaisants portant les références FP060GCN, FP061GCNB et FP061GCBB, et tout autre modèle similaires aux modèles protégés appartenant à la société CHAUMET INTERNATIONAL, sous astreinte de 3 000 euros par modèle commercialisé et de 10 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement, de condamner la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la Société CHAUMET INTERNATIONAL en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon une indemnité de 100 000 euros, de condamner la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la Société CHAUMET INTERNATIONAL, la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis sur le fondement de l'article 1382 du code civil, de condamner la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la société CHAUMET INTERNATIONAL la somme de 470 000 Euros au titre de l'exécution de mauvaise foi du protocole d'accord signé le 14 décembre 2012, d'ordonner l'insertion du jugement à intervenir dans trois publications (journal ou magazine), en format page entière, au choix de la Société CHAUMET INTERNATIONAL et aux frais de la société CHRISTIAN BERNARD; la publication devant être effectuée de façon visible, et en toute hypothèse, sans mention ajoutée, et en police de caractère ARIAL de taille 14 droits, de couleur noire sur fond blanc, dans un encadre de 468 x 210 pixels, en dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre « COMMUNIQUE JUDICIAIRE » en lettres capitales et en police de caractères ARIAL de taille 16 et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. d'ordonner la publication du Jugement à intervenir sur la première page du site internet www.luxuxyceramic.com. pendant un mois, aux frais de la société CHRISTIAN BERNARD, la publication devant être effectuée sur la partie supérieure de la page d'accueil dudit site internet, de façon visible, et en toute hypothèse, au-dessus de la ligne de flottaison, sans mention ajoutée, et en police de caractère ARIAL, de taille 14. droits, de couleur noire sur fond blanc, dans un encadre de 468 x 210 pixels, en dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre « COMMUNIQUE JUDICIAIRE », en lettres capitales et en police de caractères ARIAL de taille 16 et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de débouTer la société CHRISTIAN BERNARD de ses demandes reconventionnelles, de condamner la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la Société CHAUMET INTERNATIONAL la somme de 12 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de la présente instance y compris les frais de constat. Au soutien de ses prétentions, la SA CHAUMET INTERNATIONAL expose que l'originalité de ses modèles de bagues référencés LIENS créés en 2001 et commercialisés en 2002. qui sont le symbole de sa gamme phare, est caractérisée par un anneau large, inachevé en son centre sur le dessus du doigt, et dont les deux extrémités sont reliées par deux barrettes arrondies croisées, serties ou non de diamants, l'anneau étant inachevé sans que l'espace entre les deux extrémités de ce dernier ne soit trop prononcé, de manière à ce que les barrettes, légèrement arrondies, donnent l'impression d'unir par un lien les deux extrémités de l'anneau et que l'espace entre les deux extrémités de l'anneau ne soit perceptible qu'au-dessus et en dessous du croisement des barrettes. Elle ajoute être titulaire des droits d'auteur sur ces œuvres conformément aux dispositions de l'article L 113-1 du code de la propriété intellectuelle puisqu'elle a divulgué ces modèles sous son nom en 2002 et les exploite depuis de façon constante. Elle explique en outre que ses droits ont été reconnus définitivement par le jugement du 21 septembre 2012 rendu par le tribunal de grande instance de PARIS et que la société CHRISTIAN BERNARD elle aussi a reconnu contractuellement l'originalité des modèles revendiqués en signant la transaction du 14 décembre 2012 et en déduit que cette dernière est irrecevable à soulever dans le cadre du présent contentieux l'absence d'originalité des modèles de bague revendiqués par la société CHAUMET ou l'absence de droits d'auteur détenus par elle sur ces bagues. Elle explique en outre que ses bagues sont protégées à titre de modèles dont les dépôts reprennent exactement toutes les caractéristiques des modèles LIENS déjà évoquées, la validité des modèles ayant à son tour était reconnue dans le même jugement dont l'autorité de la chose jugée, la demande de nullité de la SAS CHRISTIAN B ayant été rejetée sur le fondement qu'elle invoque aujourd'hui et le principe de concentration des moyens excluant son examen à le supposer nouveau, rend irrecevable la demande de nullité de cette dernière qui a en outre acquiescé à ses termes dans le cadre du protocole d'accord transactionnel conclu entre les parties. Elle précise que ce jugement n'a pas reconnu au bénéfice de la SAS CHRISTIAN B l'existence d'un droit d'auteur antérieur sur un modèle de bague déposé en 2001, aucune divulgation le rendant opposable et démontrant sa qualité d'auteur n'ayant quoiqu'il en soit été opérée et les conditions d'existence d'une œuvre collective n'étant pas réunie. Elle expose en outre que les modèles de bagues proposés à la vente par la société CHRISTIAN BERNARD, d'ailleurs quasiment identiques à d'anciens modèles la société CHRISTIAN BERNARD référencés FG22GCNB et FG020JCN jugés contrefaisants des modèles CHAUMET revendiqués, reprennent de façon quasi-servile les caractéristiques principales originales et nouvelles des modèles «LIENS» et présentent la même impression d'ensemble que les modèles CHAUMET. Elle en déduit qu'ils en constituent des contrefaçons tant au titre du droit d'auteur qu'au titre du droit des dessins et modèles. Elle précise que la SAS CHRISTIAN B, après avoir été condamnée pour contrefaçon pour deux modèles quasi similaires aux modèles litigieux, n'a pas hésité à s'affranchir de la décision du tribunal de céans pour proposer deux autres modèles de bagues double liens quasi identiques aux modèles interdits, et contrefaisant toujours les modèles CHAUMET revendiqués, et a ainsi délibérément choisi de se placer dans le sillage de la société CHAUMET et en particulier de sa gamme LIENS en créant une confusion avec les produits CHAUMET pour bénéficier, à nouveau, sans bourse délier, de sa notoriété, de son image et de sa créativité. Elle indique qu'en commercialisant les modèles litigieux moins de 6 mois après la signature de la transaction en modifiant de mauvaise foi un infime détail des deux modèles précédemment jugés contrefaisants, la société CHRISTIAN BERNARD a commis une faute dans l'exécution de cette dernière. Elle précise que son préjudice causé par la contrefaçon réside d'une part dans la perte de marge liée à l'offre de vente et à la vente de copies par la SAS CHRISTIAN B et d'autre dans la grave atteinte portée à son image de marque et à celle de ses produits du fait de leur galvaudage dû à la vente de copies via internet à des prix nettement inférieurs, que son préjudice causé par la concurrence déloyale et parasitaire consiste dans les conséquences économiques négatives liées à la diffusion des produits « JEELL » qui emporte, outre un risque de détournement de clientèle, une banalisation, ainsi qu'une dévalorisation des bijoux CHAUMET, aux yeux de la clientèle, et que le préjudice né de l'exécution fautive de la transaction doit être calculé à la lumière de la somme à laquelle la société CHRISTIAN BERNARD avait été condamnée par le tribunal pour ses agissements. En réponse, dans ses dernières écritures notifiées le 19 août 2014 auxquelles il sera renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la SAS CHRISTIAN B demande au tribunal, aux visas des articles L 111-1 et suivants, L 335-2, L 511-6 et suivants, L 512-4 et suivants et L 513-4 et suivants du code de la propriété intellectuelle, 1134 et 1382 du code civil : à titre principal : de dire et juger que les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la société Chaumet portent atteinte au Modèle CB antérieur déposé chez un huissier de justice le 10 décembre 2001 et en conséquence, d'annuler les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la société Chaumet, d'interdire à la société Chaumet la commercialisation des dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 sous astreinte de 5 000 euros par produit à compter de la signification de la décision à intervenir, de débouter la société Chaumet de toutes ses prétentions et demandes, à titre subsidiaire : de dire et juger que les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 reproduisent quasi servilement les caractéristiques originales du Modèle CB antérieur déposé par la société Christian Bernard le 10 décembre 2001 chez un huissier et en constituent la contrefaçon au sens de l'article L 335-2 du code de la propriété intellectuelle, et en conséquence, de condamner la société Chaumet pour contrefaçon des droits d'auteur de la société Christian Bernard sur le Modèle CB antérieur de 2001, de condamner la société Chaumet à payer à la société Christian Bernard la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi, d'interdire à la société Chaumet la commercialisation des dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 sous astreinte de 5 000 euros par produit à compter de la signification de la décision à intervenir, de débouter la société Chaumet de toutes ses prétentions et demandes; à titre infiniment subsidiaire : de dire et juger que la société Chaumet est mal fondée en ses demandes tendant à la condamnation de la société Christian Bernard pour contrefaçon de droits d'auteur et dessins et modèles relatifs aux dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448, de dire et juger que la société Chaumet est mal fondée en ses demandes tendant à condamnation de la société Christian Bernard pour concurrence déloyale et parasitisme sur le fondement des dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 et en conséquence, de débouter la société Chaumet de l'ensemble de ses demandes tendant à sa condamnation au paiement de dommages et intérêts par la société Christian Bernard pour contrefaçon, de débouter la société Chaumet de l'ensemble de ses demandes tendant à la condamnation au paiement de dommages et intérêts par la société Christian Bernard pour actes de concurrence déloyale et parasitisme, en tout état de cause : de dire et juger que le protocole du 14 décembre 2012 a été exécuté de parfaite bonne foi par la société Christian Bernard, de débouter la société Chaumet de toutes ses prétentions et demandes, de condamner la société Chaumet à payer à la société Christian Bernard la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de la SCP UGGC Avocats en la personne de Maître Corinne KHAYAT suivant l'article 699 du code de procédure civile. Dans ce but, elle expose que le jugement du 21 septembre 2012 a rejeté sa demande en nullité sur le fondement du défaut de nouveauté ou de caractère propre du dessin et modèle contesté et non sur le fondement de l'article L 512-4 d) du code de la propriété intellectuelle, la condition de divulgation étant requise pour qu'un dessin ou modèle antérieur fasse échec au caractère nouveau ou propre d'un dessin ou modèle postérieur conformément aux dispositions de l'article L 512-4 a) du code de la propriété intellectuelle mais pas pour qu'un d'un droit d'auteur antérieur soit opposable à un dessin ou modèle postérieur. Soulignant l'existence d'un droit d'auteur depuis 2001 sur son modèle antérieur qui a d'ailleurs été reconnu dans le jugement, elle soutient être recevable à agir en nullité des modèles LIENS. Elle ajoute que ni ce jugement ni la transaction postérieure n'a reconnu la validité des modèles DM / 060448 de la société Chaumet et que les modèles ayant fait l'objet du protocole correspondent aux Modèles Liens tels qu'exploités ces dernières années par la société Chaumet, et non pas aux modèles n° DM / 060448 déposés en 2002. Elle indique que, pas plus que l'autorité de la chose jugée, le principe de concentration des moyens, ne lui est pas opposable, le moyen tiré de l'article L 512-4 d) du code de la propriété intellectuelle n'étant pas nouveau et étant en outre désormais évoqué à titre reconventionnel pour sa défense et non dans le cadre d'une instance nouvelle dont elle serait à l'initiative. Elle en déduit que la reconnaissance de son droit antérieur par le jugement du 21 septembre 2012 a pour conséquence celle de la nullité des modèles qui lui sont opposés et à défaut celle de leur caractère contrefaisant, les caractéristiques originales de son modèle antérieur, soit l'association d'un anneau inachevé avec une croix posée, sertie ou non de diamants et donnant l'impression de réunir l'anneau, étant intégralement reproduites par les modèles liens et les légères différences de détail tenant à un effet légèrement arrondi de l'anneau et des branches de la croix pour les Modèles Lien n'étant pas de nature à dissiper l'impression d'ensemble produite avec le Modèle CB antérieur. Subsidiairement, elle explique que ses modèles litigieux, constitués d'un anneau en corps entier avec deux petites encoches arrondies associé à une croix plate, rectangulaire et donnant l'impression d'être posée, ne reprennent aucune des trois caractéristiques originales visées par la SA CHAUMET INTERNATIONAL et sont une déclinaison des éléments essentiels du modèle du 12 février 2009 dont la validité a été reconnue dans le jugement antérieur. Plus subsidiairement, elle précise que la recherche alléguée de confusion et que sa volonté prétendue de se placer dans le sillage de la SA CHAUMET INTERNATIONAL ne sont pas démontrées et que celle-ci ne caractérise aucun acte distinct de concurrence déloyale ou de parasitisme. Elle ajoute que la transaction ne portait que sur ses modèles croix incrustée et que les modèles litigieux s'en distinguent clairement puisqu'ils ne sont qu'une déclinaison du modèle croix posée non couverts par la transaction. Enfin, elle expose que la SA CHAUMET INTERNATIONAL ne prouve ni la perte de marge invoquée, son préjudice commercial ou une quelconque atteinte portée à son image ni l'importance des investissements qu'elle allègue et ajoute qu'elle cherche à revenir sur la transaction qui a autorité de la chose jugée entre les parties. L'ordonnance de clôture était rendue le 9 septembre 2014. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile. L'affaire, retenue à l'audience du 16 septembre 2014, a été mise en délibéré au 6 novembre 2014 et le jugement sera prononcé à cette date par sa mise à disposition au greffe, les parties représentées en ayant été avisées à l'issue des débats conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. MOTIFS DU JUGEMENT 1°) Sur les droits de la SA CHAUMET INTERNATIONAL sur les modèles de bagues à double lien n° 060448 déposés le 2 avril 2002 auprès de l'OHMI et visant la FRANCE et la demande reconventionnelle en contrefaçon En application de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, qui s'entend au sens de l'article 4 du même code de l'objet du litige déterminé par les prétentions respectives des parties, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche. En vertu de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée, qui constitue une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, la chose demandée devant être la même, la demande fondée sur la même cause et formée entre les mêmes parties, par elles et contre elles en la même qualité. Et, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, seul le dispositif de la décision est revêtu de l'autorité de chose jugée à l'exclusion de ses motifs, peu important qu'ils soient décisifs ou dérisoires, les motifs de la décision ne pouvant que servir à éclairer le sens ou la portée du dispositif. L'autorité de la chose jugée suppose une triple identité : celle des parties agissant en vertu du même titre juridique, celle de l'objet et celle de la cause. La cause, qui ne fait l'objet d'aucune définition légale mais qui est implicitement évoquée aux articles 6 et 7 du code de procédure civile, s'entend non du fondement juridique de la demande mais de l'ensemble des faits qui la soutiennent, spécialement ou non. Ainsi, l'identité de cause doit être appréciée à la lumière du principe de concentration des moyens qui, pénétré du principe de loyauté des débats qui irrigue le droit processuel et guidé par la conception factuelle de la cause, impose au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à la fonder et au défendeur d'opposer tous les moyens de défense de nature à entraîner l'échec de la prétention adverse, ni l'un ni l'autre ne pouvant invoquer dans une instance postérieure un fondement juridique qu'il s'est abstenu de soulever en temps utile. Aux termes du jugement définitif du 21 septembre 2012, le tribunal de grande instance de PARIS a en particulier : « débouté la société CHRISTIAN BERNARD de sa demande tendant au prononcé de la nullité des modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 par la société CHAUMET INTERNATIONAL auprès de l'OMPI et visant la FRANCE, déclaré la société CHAUMET INTERNATIONAL recevable en sa demande en contrefaçon de ses modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 et dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bagues à double liens référencés FG020JCN et FG022GCNB produisant sur l'observateur averti une impression d'ensemble identique à celles des modèles n° 5 et 6 du dépôt n° DM/060448 du 2 avril 2002, les sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN ont commis des actes de contrefaçon de ces modèles au préjudice de la société CHAUMET INTERNATIONAL, dit que les bagues de la collection LIENS correspondant aux modèles n° 1 à 6 déposés par la société CHAUMET INTERNATIONAL le 2 avril 2002 à l'OMPI sous le n° DM/060448 constituent des œuvres protégées au titre du droit d'auteur, déclaré la société CHAUMET INTERNATIONAL recevable en sa demande en contrefaçon de ses droits d'auteur et dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bagues FG020JCN et FG022GCNB à double liens reprenant les caractéristiques originales de deux des bagues de la société CHAUMET, les sociétés CHRISTIAN BERNARD et BIJOUTERIE STOVEN ont commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur au préjudice de la société CHAUMET INTERNATIONAL, condamné la société CHRISTIAN BERNARD à verser à la société CHAUMET INTERNATIONAL la somme de 600 000 euros en réparation de son préjudice économique consécutifs aux actes de contrefaçon de ses modèles et de ses droits d'auteur ». Ce faisant, le tribunal reconnaissait, dans un dispositif dont la clarté exclut son interprétation par les motifs, d'une part la validité des modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 par la société CHAUMET INTERNATIONAL auprès de l'OMPI et visant la FRANCE et d'autre part leur protection par les droits d'auteur, la demande de nullité de la SAS CHRISTIAN B ayant ainsi été rejetée et la contrefaçon retenue sur les deux fondements. a)Sur la demande en nullité de modèles présentée par la SAS CHRISTIAN B Le tribunal était saisi, ainsi que le révèlent son exposé du litige et les conclusions récapitulatives de la SAS CHRISTIAN B qui lui étaient soumises, d'une demande tendant à ce qu'il dise « que les modèles revendiqués par la société CHAUMET INTERNATIONAL à savoir le modèle de bague et le modèle d'alliance composés « d'un anneau inachevé dont les deux extrémités sont reliées par un lien serti», ne sont pas susceptibles de protection au titre du livre I du CPI et d'autre part, que les modèles n° 1.1,1.2,1.3,2.1,2.2,2.3,3.1,3.2,3.3, 4.1,4.2,4.3, 5.1, 5.2, 5.3,6.1,6.2,6.3 figurant au dépôt international du 2 avril 2002 [...] sont nuls et qu'il prononce la nullité desdits dépôts ». La SAS CHRISTIAN B sollicite aujourd'hui à titre principal du tribunal qu'il « (Juge et dise] que les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la société Chaumet portent atteinte au Modèle CB antérieur déposé chez un huissier de justice le 10 décembre 2001 et, en conséquence, [qu'il annule] les dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la société Chaumet ». Ainsi, l'objet de ces prétentions, la nullité des dessins 5.3 et 6.3 du modèle n° 060448 déposés le 2 avril 2002 auprès de l'OHMI, est identique, les parties étant les mêmes prises en la même qualité. En outre, il ressort des pages 13 et 23 des conclusions récapitulatives présentées par la SAS CHRISTIAN B au tribunal dans le cadre de l'instance précédente qu'elle opposait à la SA CHAUMET INTERNATIONAL, comme elle persiste à le faire dans la présente instance en pages 7 à 12 de ses écritures, son droit d'auteur antérieur sur les bagues déposées chez un huissier de justice les 20 avril et 10 décembre 2001 et invoquait expressément le bénéfice des dispositions de l'article L 512-4 d du code de la propriété intellectuelle. Dès lors, non seulement la demande de nullité présentée contre la SA CHAUMET INTERNATIONAL pour les mêmes modèles repose sur des faits strictement identiques, circonstance qui suffît à caractériser une identité de cause, mais le fondement juridique invoqué est à son tour identique. Or, les motifs n'ayant pas autorité de chose jugée, le fondement finalement retenu par le tribunal pour rejeter sa demande antérieure est indifférent à l'appréciation de l'identité de cause de ses demandes reconventionnelles successives, l'éventuel défaut d'examen d'un moyen de droit par le tribunal étant d'ailleurs une cause d'appel à laquelle la SAS CHRISTIAN B a renoncé par voie de transaction. En conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la portée de la transaction conclue entre les parties, la demande en nullité présentée par la SAS CHRISTIAN B se heurte à l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 21 septembre 2012 et est irrecevable. b)Sur les droits d'auteur de la SA CHAUMET INTERNATIONAL L'instance précédente opposait, outre la société BIJOUTERIE STOVEN dont l'absence dans l'actuelle procédure est indifférente, les mêmes parties prises en la même qualité et portait sur un même objet, la contrefaçon par la SAS CHRISTIAN B des droits d'auteur de la SA CHAUMET INTERNATIONAL sur ses modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 auprès de l'OMPI et visant la FRANCE. Les bagues opposées à la SAS CHRISTIAN B étant celles visées dans la présente instance, les faits en débat sont identiques. Cette triple identité de parties, de cause et d'objet exclut que les droits d'auteur de la SA CHAUMET INTERNATIONAL sur les bagues litigieuses soient remis en question. En outre, la SAS CHRISTIAN B, évoquant la portée de la transaction sur ce point, admet expressément dans ses écritures qu'elle reconnaît « les droits d'auteur de la société CHAUMET sur les modèles visés dans le jugement», reprenant ainsi littéralement la formule retenue à l'article 2.1 de la transaction qui est à son tour revêtue de l'autorité de la chose jugée en vertu de l'article 2052 du code civil. Les droits d'auteur de la SA CHAUMET INTERNATIONAL sur les bagues litigieuses, également protégées par le droit des dessins et modèles, sont acquis. c)Sur la demande reconventionnelle en contrefaçon Aucune demande en contrefaçon n'avait été présentée par la SAS CHRISTIAN B dans l'instance achevée par le jugement du 21 septembre 2012. En conséquence, faute d'identité d'objet entre une demande en nullité de modèles portant atteinte à un droit d'auteur antérieur et une demande en contrefaçon d'un droit d'auteur par un modèle ultérieurement déposé, cette dernière ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée, le principe de concentration des moyens n'impliquant pas celle des demandes. En revanche, le jugement du 21 septembre 2012 ne contient dans son dispositif aucune mention portant reconnaissance d'un droit d'auteur antérieur de la SAS CHRISTIAN B sur ses bagues déposées chez un huissier en 2001. Les motifs d'une décision de justice n'ayant pas autorité de la chose jugée, l'interprétation a contrario livrée par la SAS CHRISTIAN B de la motivation du jugement du 21 septembre 2012 est sans pertinence et ne peut induire l'existence couverte par l'autorité de la chose jugée du droit d'auteur qu'elle allègue. Au contraire, le rejet de sa demande de nullité consacre nécessairement, au regard de l'identité de cause de la demande, l'impossibilité pour la SAS CHRISTIAN B de se prévaloir d'un droit d'auteur antérieur opposable aux modèles déposés par la SA CHAUMET INTERNATIONAL indépendamment de l'objet nouveau de sa demande, l'existence du droit d'auteur antérieur étant le pré-requis commun à ses prétentions au titre de la nullité et de la contrefaçon. Enfin, les modèles argués de contrefaçon sont cumulativement protégés par des droits d'auteur dont l'application est conditionnée par l'originalité de l'œuvre de l'esprit qui en constitue l'objet. Or, l'originalité, si elle est distincte de la nouveauté, étant exclue au bénéfice d'un auteur si l'œuvre qui en est le siège est la reproduction d'une œuvre protégée antérieure, sa reconnaissance présuppose l'absence d'un droit antérieur. En conséquence, l'autorité de la chose jugée attachée à l'absence de droit d'auteur de la SAS CHRISTIAN B opposable à la SA CHAUMET INTERNATIONAL la prive d'intérêt pour agir reconventionnellement en contrefaçon au sens des articles 31 et 32 du code de procédure civile et emporte l'irrecevabilité de sa demande en application de l'article 122 du code de procédure civile. 2°) Sur la demande principale en contrefaçon Fait juridique, la contrefaçon se prouve par tous moyens. a)Sur la contrefaçon des modèles n° DM/060448 Aux termes de l'article L 513-4 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, à défaut du consentement du propriétaire du dessin ou modèle, la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation, l'utilisation, ou la détention à ces fins, d'un produit incorporant le dessin ou modèle. Conformément à l'article L 513-5 du même code qui fait écho à la définition du caractère propre du modèle posée par l’article L 511-4, la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente. Cette disposition, qui transpose l'article 9 de la directive CE n° 98/71 du 13 octobre 1998 doit être interprétée conformément à celle-ci, l'étendue de la protection devant ainsi être appréciée en tenant compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du modèle au sens de l'article 9§2 de la directive. Dans ce cadre, la détermination de l'impression visuelle d'ensemble par un observateur averti, et par conséquent doté d'une vigilance particulière liée à sa connaissance de la catégorie de produits concernés par le modèle et de la liberté du créateur dans l'élaboration du modèle, s'opère par comparaison du produit argué de contrefaçon et de la reproduction graphique ou photographique du modèle déposé visé à l'article R 512-3 du code de la propriété intellectuelle et non du produit tel qu'il est commercialisé ou de sa brève description établie à des fins exclusivement documentaire. En application de l'article L 521-1 du code de la propriété intellectuelle, toute atteinte portée aux droits du propriétaire d'un dessin ou modèle, tels qu'ils sont définis aux articles L513-4 à L513-8, constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur Aux termes du dépôt réalisé auprès de l'OHMI sous le n° DM/060448, le modèle n° 5, reproduit par les dessins 5.1 à 3, représente une bague large constituée d'un anneau inachevé légèrement arrondi sur sa surface extérieure, relié par un double lien croisé légèrement bombé serti de pierres, le modèle n° 6, reproduit par les dessins 6.1 à 3, représentant la même bague avec un double lien croisé non serti. La bague sertie présentée à l'audience par la SA CHAUMET INTERNATIONAL et observée en délibéré correspond en tout point au modèle déposé n° 5. L'aspect bombé des liens donnent l'impression d'un entrelacs dont les extrémités sont ancrées dans l'anneau, renforçant ainsi le sentiment qu'ils maintiennent uni l'anneau inachevé. La SAS CHRISTIAN B ne conteste pas qu'elle commercialise depuis début 2013 dans sa collection « JEELL » des bagues référencées FP060GCN, FP061GCNB et FP061GCBB, ce que confirme le procès- verbal de constat dressé par un huissier de justice le 12 juin 2013 à partir du site internet luxuryceramic.com appartenant à la SAS CHRISTIAN B. Ces trois bagues, qui ne diffèrent que par leur couleur, noire pour les deux premières et blanche pour la dernière, ainsi que par le fait qu'elles soient serties, pour les deux dernières, ou non sertie, pour la première, se composent d'un anneau achevé comportant en son sommet deux liens croisés très légèrement bombés encadrés au niveau de leur point de croisement par deux petites encoches symétriques de forme conique mais arrondie. Les liens de ces bagues sont d'une taille très voisine de ceux du modèle déposé mais sont plus épais, leur anneau ne présentant aucune ouverture visible. Par ailleurs, leur courbure est à ce point moins marquée qu'ils paraissent plats et s'apparentent à une croix posée sur l'anneau : ils semblent de ce fait sceller l'anneau achevé par pression verticale, les deux encoches exprimant un rapprochement récent, et non, comme le signifient les liens des modèles déposés, maintenir les bords nettement écartés de l'anneau inachevé par un effet de laçage. L'observateur averti, acheteur de bijoux moyen et haut de gamme sensible aux détails des formes, des proportions et de l'ornementation ainsi qu'à la signification symbolique recherchée et connaisseur de la liberté importante offerte à leur créateur par-delà les contraintes imposées par leur destination notamment sur la forme des bagues, perçoit ces différences significatives entre les bagues litigieuses et le modèle déposé. De cette comparaison naît dans l'œil de l'observateur averti une impression d'ensemble différente exclusive de la contrefaçon invoquée. D'ailleurs, les bagues arguées de contrefaçon semblent, ainsi que le souligne la SAS CHRISTIAN B qui soulève l'avantage économique d'une telle opération, être la version réduite des modèles jugés non contrefaisants dans le jugement du 21 septembre 2012. En conséquence, la demande en contrefaçon de la SA CHAUMET INTERNATIONAL au titre de ses droits sur les modèles n° DM/060448 déposés le 2 avril 2002 auprès de l'OMPI et visant la FRANCE sera, comme ses demandes subséquentes, rejetée. b) Sur la contrefaçon des droits d'auteur Aux termes de l'article L122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. La SA CHAUMET INTERNATIONAL situe l'originalité judiciairement reconnue de ses créations dans « un anneau large inachevé en son centre sur le dessus du doigt» dont les «deux extrémités [...] sont reliées par deux barrettes arrondies croisées, serties ou non de diamants ». Aux termes de la description comparative opérée, il est acquis que les bagues référencées FP060GCN, FP061GCNB et FP061GCBB commercialisées par la SAS CHRISTIAN B sont constituées d'un anneau achevé, les encoches qu'il comporte ne donnant pas l'impression d'une ouverture, ainsi que d'une croix posée dont le léger rebond est si peu perceptible qu'elle paraît plate. Aussi ces bagues ne reprennent-elles pas les caractéristiques de la forme originale de l'œuvre protégée de la SA CHAUMET INTERNATIONAL. Sa demande en contrefaçon à ce titre sera, comme ses demandes subséquentes, rejetée. 3°) Sur la concurrence déloyale, le parasitisme et l'inexécution de la transaction du 14 décembre 2012 La SA CHAUMET INTERNATIONAL invoque au soutien de sa demande en concurrence déloyale et en parasitisme, qui engage la responsabilité de son auteur en application de l'article 1382 du code civil, le comportement fautif de la SAS CHRISTIAN B qui «n'a pas hésité à s'affranchir de la décision du Tribunal de céans pour proposer deux autres modèles de bagues double liens quasi identiques aux modèles identiques et contrefaisant toujours les modèles CHAUMET revendiqués » et a ainsi « créé une confusion avec les produits CHAUMET, en se plaçant, délibérément, dans le sillage de la société CHAUMET INTERNATIONAL, pour bénéficier, à nouveau, sans bourse délier, de sa notoriété, de son image et de sa créativité ». Elle situe son préjudice dans la vulgarisation de ses créations et dans l'atteinte corrélative à son image de marque. Au soutien de sa demande fondée sur l'inexécution de la transaction, qui engage la responsabilité contractuelle de son auteur en application des articles 1134 et 1147 du code civil, la SA CHAUMET INTERNATIONAL invoque la « mauvaise foi » et 1' « attitude malveillante » de la SAS CHRISTIAN B qui s'est « non seulement affranchie du jugement du tribunal de céans l'ayant condamné mais également du Protocole d'accord en découlant ». Elle situe dans ce cadre son préjudice dans la « [destruction] chaque jour un peu plus [de] l'attrait des créations CHAUMET et [des] efforts créatifs réalisés par cette dernière ». Ainsi, la SA CHAUMET INTERNATIONAL invoque des faits identiques tirés de la poursuite alléguée de la commercialisation de produits contrefaisants après condamnation sur les fondements inconciliables des responsabilités délictuelle et contractuelle de la SAS CHRISTIAN B et poursuit par ce biais la réparation d'un préjudice unique, le quantum de l'indemnisation sollicitée ne variant qu'en raison des modes de calcul du préjudice et non de la nature du dommage. Par la confusion qu'opère le cumul interdit auquel elle procède, la SA CHAUMET INTERNATIONAL place le juge dans l'incapacité de déterminer le fondement applicable au sens de l'article 12 du code de procédure civile et viole le principe du contradictoire posé par l'article 16 du même code en interdisant à la SAS CHRISTIAN B de préparer utilement sa défense. Ses demandes à ce titre sont en conséquence irrecevables. 4°) Sur les demandes accessoires Succombant au litige, la SA CHAUMET INTERNATIONAL, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, sera condamnée à payer à la SAS CHRISTIAN B la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du même code par la SCP UGGC Avocats en la personne de Maître Corinne KHAYAT.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition par le greffe le jour du délibéré. Déclare irrecevables la demande de la SAS CHRISTIAN B tendant au prononcé de la nullité des dessins 5.3 et 6.3 des modèles n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la SA CHAUMET INTERNATIONAL auprès de l'OHMI et ses demandes subséquentes ; Déclare irrecevables la demande de la SAS CHRISTIAN B au titre de la contrefaçon de ses droits d'auteur et ses demandes subséquentes ; Rejette les demandes de la SA CHAUMET INTERNATIONAL au titre de la contrefaçon de ses droits d'auteur et de ses droits sur les modèles n° 060448 déposés le 2 avril 2002 par la SA CHAUMET INTERNATIONAL auprès de l'OHMI ; Déclare irrecevable les demandes de la SA CHAUMET INTERNATIONAL au titre de la concurrence déloyale, du parasitisme et de l'inexécution de la transaction du 14 décembre 2012 ; Rejette la demande de la SA CHAUMET INTERNATIONAL au titre des frais irrépétibles ; Condamne la SA CHAUMET INTERNATIONAL à payer à la SAS CHRISTIAN B la somme de HUIT MILLE EUROS (8 000€) en application de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne la SA CHAUMET INTERNATIONAL à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du même code par la SCP UGGC Avocats en la personne de Maître Corinne KHAYAT.