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Tribunal administratif de Pau, 1ère Chambre, 16 août 2022, 1902918

Mots clés
société • contrat • requête • rapport • rejet • tiers • publicité • voirie • recours • pouvoir • remise • saisine • service • procès-verbal • pourvoi

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Pau
  • Numéro d'affaire :
    1902918
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Rapporteur : M. Clen
  • Nature : Décision
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Bordeaux, 18 novembre 2019
  • Avocat(s) : SCP CGCB & ASSOCIES
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Résumé

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Partie demanderesse
Sarl Bernard dépannage
défendu(e) par Cabinet LEXIA
Parties défenderesses
Préfète des Landes
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Suggestions de l'IA

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 décembre 2019, le 31 mai 2022 et le 7 juin 2022, la société à responsabilité limitée (Sarl) Bernard dépannage, représentée par le cabinet d'avocats Lexia, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de surseoir à statuer sur sa requête, dans l'attente que la Cour de cassation se prononce sur le pourvoi introduit à l'encontre de l'ordonnance du 18 novembre 2019 du juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Landes du 25 juin 2019, en tant qu'il porte agrément du GIE DBF-RDB pour des prestations de dépannage, remorquage et évacuation des véhicules poids-lourds d'un PTAC de plus de 3,5 tonnes, pour une durée de sept ans, sur le secteur 1 du réseau autoroutier de l'A63 entre Salles et Saint-Geours-de-Maremne, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable, eu égard à l'objectif de sécurité routière qui s'attache à la décision d'agrément, d'ailleurs détachable du contrat de concession qu'elle ne conteste pas ; elle justifie d'un intérêt à agir, la décision lui faisant grief, dès lors qu'elle aurait dû être concernée par la procédure d'agrément, à l'issue de la procédure de passation du marché qu'elle conteste devant le juge judiciaire ; - il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur de l'acte ; - la décision, rendue sur avis de la commission d'agrément des dépanneurs du 19 juin 2019, a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, faute de justification de la régularité de la composition et de la saisine de cette commission ; - l'illégalité du choix de l'attributaire par la société Atlandes, concessionnaire, qui résulte de manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence, entraîne l'illégalité de la décision d'agrément ; le marché a été passé en méconnaissance des articles L. 122-12 et suivants du code de la voirie routière, en particulier de l'article L. 122-18 : - la consultation n'a pas fait l'objet d'une publication au journal officiel de l'Union européenne ; - le délai dit de " standstill " n'a pas été respecté ; - les modalités d'information des candidats évincés n'ont pas été respectées ; - la grille d'analyse des offres, dont l'absence lui est préjudiciable, ne lui a pas été remise ; - ni l'avis d'appel à concurrence, ni aucun des trois documents de la consultation ne mentionnent les critères de sélection des candidatures ; - le contrat a été signé avant l'expiration du délai de remise des offres ; - les critères de notation des offres prévus par le règlement de la consultation sont insuffisants ; - le critère intitulé " Localisation géographique (adresse du garage) du candidat par rapport à la nécessité d'une intervention rapide en tout point du secteur ", affecté de la pondération la plus élevée, ne comporte aucun sous-critère ; les modalités de son évaluation sont insuffisamment expliquées ; - le marché de l'agrément, très supérieur au seuil européen prévu pour les marchés de services, n'a pourtant pas été passé selon l'une des procédures formalisées prévues aux articles L. 122-12 et L. 122-18 du code de la voirie routière ; en particulier, la société Atlandes a manqué à ses obligations de transparence et d'égalité de traitement des candidats : - l'avis d'appel à concurrence publié par la société Atlandes ne contenait pas les informations requises ; - la société Atlandes ne lui a pas communiqué l'intégralité des informations sollicitées après l'attribution du marché ; - le préfet des Landes n'a pas davantage répondu à sa demande de communication du procès-verbal de la commission d'agrément ; or M. C, dépanneur sur l'un des secteurs VL d'Atlandes, a pris part au vote, en violation des règles de mise en concurrence ; - le GIE DBF-DRB, qui n'a pas de moyens propres, n'avait pas qualité pour candidater ; l'entente des sociétés membres a permis de proposer des tarifs artificiellement bas ; en outre, seul le GIE est agréé et non ses sociétés membres ; - le GIE DBF-DRB n'est pas en mesure de satisfaire personnellement aux prescriptions du cahier des charges, en particulier aux délais d'intervention et aux permanences ; - le critère de distance n'est pas suffisamment précisé ; les temps d'intervention de la Sarl Bernard dépannage sont plus courts que ceux du candidat retenu ; - les sous-critères du critère du tarif, qui ne correspondent pas à la réalité économique de la facturation d'un dépannage ou d'un remorquage de poids-lourd sur l'autoroute, ne permettent pas d'apprécier et de classer les offres tarifaires des candidats ; en outre, en proposant un coût horaire de main d'œuvre et un coût kilométrique inférieur de seulement quelques centimes à ceux, publics, proposés par la Sarl Bernard dépannage, le GIE DBF-DRB s'est livré à une pratique déloyale ; les factures d'intervention du GIE sont, de fait, plus coûteuses que celles de la Sarl Bernard dépannage ; - l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article 14.2 de l'annexe au décret n° 2011-85 du 21 janvier 2011 approuvant la concession passée entre l'Etat et la société Atlandes, dès lors que le GIE DBF-DRB ne pouvait être agréé sans mise en œuvre d'une procédure de publicité et de mise en concurrence transparente et non discriminatoire ; - seules les sociétés composant le GIE, effectuant le dépannage, peuvent être agréées, et non le GIE lui-même, dont l'activité, en vertu de l'article L. 251-1 du code de commerce, n'est qu'auxiliaire par rapport à celle de ses membres. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés le 7 avril 2020, le 8 novembre 2021 et le 3 juin 2022, le GIE DBF-DRB conclut au rejet de la requête et à ce que la Sarl Bernard dépannage soit condamnée à lui verser une somme de 4 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête de la Sarl Bernard dépannage, tiers au contrat, est irrecevable, dès lors qu'elle tend à l'annulation, pour excès de pouvoir, d'une mesure d'exécution de la convention de concession conclue le 17 janvier 2011 entre l'Etat et la société Atlandes, dont elle n'est pas détachable ; - en tout état de cause, le recours des tiers contre les actes détachables de la formation d'un contrat est irrecevable ; - en outre, la société requérante n'a pas intérêt pour agir en contestation de l'arrêté portant agrément du GIE DBF-DRB, d'une part, dès lors qu'il n'emporte pas, en lui-même, d'effet sur sa situation, d'autre part, compte tenu de son objet ; - le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; au demeurant, ce moyen n'est pas fondé ; - le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission d'agrément des dépanneurs n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; - les moyens tirés des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence issues du code de la commande publique, relatifs au contrat de dépannage conclu entre la société Atlandes, concessionnaire de l'autoroute, et le GIE DBF-DRB, dépanneur, sont inopérants à l'encontre de la décision d'agrément prise par l'autorité concédante, dont la légalité n'est pas conditionnée par la régularité de la procédure de publicité et de mise en concurrence organisée par son concessionnaire ; en effet, l'article L. 122-12 du code de la voirie routière ne vise que les contrats passés par les concessionnaires d'autoroute qui constituent des marchés, excluant nécessairement les contrats répondant à la définition des concessions ; le contrat conclu entre la société Atlandes et le GIE DBF-DRB, qui a précisément pour objet de confier à ce dernier le droit d'exploiter un service de dépannage et de remorquage des poids-lourds sur une section de l'autoroute A63, et implique un transfert de risque économique d'exploitation, ne peut être qualifié de marché au sens de l'article L. 122-12 ; - en outre, le juge administratif est incompétent pour se prononcer sur la légalité de la procédure de sélection d'un dépanneur autoroutier ayant abouti à la conclusion d'un contrat de droit privé ; - les moyens tirés de la méconnaissance des règles de mise en concurrence sont inopérants, compte-tenu de la nature du contrôle exercé par l'Etat sur le choix des dépanneurs, visant à protéger principalement les intérêts publics liés à la sécurité routière ; - les moyens tirés de l'exception d'illégalité du contrat de dépannage du 19 juin 2019 sont inopérants, dès lors que, d'une part, le contrat signé le 19 juin 2019 entre l'exposante et la société Atlandes et le GIE, relevant d'un régime de droit privé, ne revêt pas le caractère d'un acte administratif, d'autre part, cet acte ne constitue pas la base légale de l'agrément attaqué, qui n'a été pris pour son application ; - en outre, aucun des moyens soulevés par la Sarl Bernard dépannage n'est fondé. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2020, la préfète des Landes conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la requête est irrecevable, dès lors que l'arrêté contesté, pris au motif de considérations de sécurité publique, ne porte aucun préjudice, direct ou indirect, aux intérêts de la Sarl Bernard dépannage ; - le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte et celui tiré du vice de la procédure de saisine de la commission d'agrément ne sont pas assortis de précisions suffisantes et manquent en fait ; - les autres moyens soulevés par la Sarl Bernard dépannage, portant sur les vices allégués de la procédure de sélection du candidat retenu, sont inopérants ; au surplus, par une ordonnance du 18 novembre 2019, la société requérante a été déboutée de l'ensemble de ses demandes présentées devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la route ; - le code de la voirie routière ; - le code de la commande publique ; - le code de commerce ; - le décret n° 2011-85 du 21 janvier 2011 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A, - les conclusions de M. Clen, rapporteur public, - et les observations de Me Ruffie, représentant la Sarl Bernard dépannage et de Me Gauci, représentant le GIE DBF-DRB.

Considérant ce qui suit

: 1. L'Etat a conclu avec la société Atlandes une convention de concession pour le financement, la conception, l'aménagement, l'élargissement, l'entretien, l'exploitation et la maintenance de la section de l'autoroute A63 entre Salles et Saint-Geours-de-Maremne, qui a été approuvée, ainsi que son cahier des charges, par un décret interministériel n° 2011-85 du 21 janvier 2011. Le 19 avril 2019, la société Atlandes a lancé un appel à candidature pour sélectionner des prestataires de dépannage et de remorquage de poids lourds sur deux secteurs autoroutiers de cette section. A l'issue de l'examen des offres, elle a signé le 19 juin 2019 un contrat avec le GIE DBF-DRB, concernant le secteur 1, avec prise d'effet au 29 juin 2019. Par un arrêté du 25 juin 2019, la préfète des Landes a agréé notamment le GIE DBF-DRB pour des prestations de dépannage, remorquage et évacuation des véhicules poids-lourds d'un PTAC de plus de 3,5 tonnes, pour une durée de sept ans, sur le secteur 1 du réseau autoroutier de l'A63 entre Salles et Saint-Geours-de-Maremne. La Sarl Bernard dépannage, candidate évincée, demande au tribunal d'annuler cet agrément, ainsi que la décision implicite de rejet née sur son recours administratif du 27 août 2019. Sur la recevabilité de la requête : 2. La société concessionnaire d'un réseau autoroutier ne peut être regardée comme agissant pour le compte de l'Etat quand elle conclut avec d'autres personnes privées des contrats portant sur le dépannage des véhicules et n'emportant pas occupation du domaine public. Ces contrats revêtent par suite le caractère de contrats de droit privé. L'acte administratif par lequel le représentant de l'Etat agrée la société de dépannage sélectionnée par le concessionnaire est détachable d'un tel contrat, en exécution duquel il est pris. Un tiers au contrat est recevable à contester la légalité d'une décision d'agrément devant le juge de l'excès de pouvoir, sous réserve de justifier d'un intérêt direct susceptible d'être lésé, en rapport avec l'objet de l'acte attaqué. 3. La convention de concession passée entre l'Etat et la société Atlandes a pour objet de confier à celle-ci le financement, la conception, l'aménagement, l'élargissement, l'entretien, l'exploitation et la maintenance de la section de l'autoroute A63 entre Salles et Saint-Geours-de-Maremne. Parmi les missions de service public qui lui sont ainsi déléguées, figure notamment les services de dépannage, de remorquage et d'évacuation des véhicules poids lourds d'un poids total autorisé en charge (PTAC) de plus de 3,5 tonnes sur cette section du domaine autoroutier concédé. La société concessionnaire peut décider de confier à un tiers cette activité. L'agrément accordé par le représentant de l'Etat, pour le secteur 1 de la section précitée, au GIE DBF-DRB, constitué par la SARL DBF Cestas et la Sarl Dépannage remorquage Bertrande, qui a été sélectionné par la société concessionnaire, a principalement pour objet de s'assurer que ce groupement d'entreprises sera en mesure de remplir ses missions dans le périmètre concerné de la concession et répond aux objectifs de la sécurité routière sur des voies où les conditions de circulation conjuguent vitesse élevée et importance du trafic. La Sarl Bernard dépannage, tiers au contrat de dépannage, qui se prévaut essentiellement de sa qualité de concurrent évincé, ne justifie d'aucun intérêt en rapport direct avec l'objectif de sécurité routière de cette décision d'agrément. Dès lors, elle ne peut être regardée comme ayant intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 25 juin 2019, en tant qu'il porte agrément du GIE DBF-DRB. Par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de cette décision et de la décision implicite de rejet née sur le recours administratif de la Sarl Bernard dépannage sont irrecevables et doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la Sarl Bernard dépannage demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la Sarl Bernard dépannage une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par le GIE DBF-DRB et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la Sarl Bernard dépannage est rejetée. Article 2 : La Sarl Bernard dépannage versera une somme de 1 200 euros au GIE DBF-DRB, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la Sarl Bernard dépannage, au ministre de l'intérieur et au GIE DBF-DRB. Copie en sera adressée à la préfète des Landes et à la société Atlandes. Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Sellès, présidente, Mme Schor, première conseillère, M. Ramin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 août 2022. Le rapporteur, signé V. A La présidente, signé M. B La greffière, signé P. SANTERRE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition : La greffière, P. SANTERRE

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