Logo pappers Justice
Logo pappers Justice

Tribunal administratif d'Orléans, 1ère Chambre, 5 juillet 2022, 2101208

Mots clés
requérant • ressort • requête • service • pouvoir • harcèlement • maire • sanction • rejet • terme • absence • apprentissage • dénigrement • qualification • rapport

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif d'Orléans
  • Numéro d'affaire :
    2101208
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Rapporteur : Mme Best-De Gand
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : BEGUIN
Voir plus

Résumé

Vous devez être connecté pour pouvoir générer un résumé. Découvrir gratuitement Pappers Justice +

Suggestions de l'IA

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: I. Par une requête enregistrée le 6 avril 2021 sous le n° 2101208 et des mémoires enregistrés le 5 mai 2021 et le 28 avril 2022, M. A C, représenté en dernier lieu par Me Castagnoli, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du maire d'Orléans du 19 mars 2021 le suspendant de ses fonctions ; 2°) de mettre à la charge de la commune d'Orléans la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté est entaché d'un vice de procédure : il n'a pas été informé préalablement de l'arrêté par courrier et n'a dès lors pas pu se faire accompagner d'un avocat ou d'un représentant syndical lors de sa notification, le 23 mars 2021 ; - il n'a travaillé que 72 jours au total dans le service ; - les griefs reprochés ne sont pas clairement ni objectivement établis ; - il a été victime d'un abus de pouvoir. Par un mémoire enregistré le 11 février 2022 et un mémoire déposé le 20 mai 2022, la commune d'Orléans, représentée par Me Béguin, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés. II. Par une requête enregistrée le 4 septembre 2021 sous le n° 2103135, un mémoire enregistré le 27 avril 2022 et un mémoire déposé le 15 juin 2022, M. A C, représenté en dernier lieu par Me Castagnoli, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du maire d'Orléans du 15 juillet 2021 le licenciant pour insuffisance professionnelle ; 2°) d'enjoindre à la commune d'Orléans de le réintégrer sur son poste, à compter de la notification du jugement à intervenir et de procéder à la reconstitution de sa carrière ; 3°) de mettre à la charge de la commune d'Orléans la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté est insuffisamment motivé ; - l'arrêté est entaché d'erreur d'appréciation ; - il a fait l'objet d'une sanction déguisée ; - l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir car il a été pris dans le but d'éviter son reclassement à la suite de la suppression de son poste. Par des mémoires enregistrés le 11 février 2022 et le 24 mai 2022, la commune d'Orléans, représentée par Me Béguin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par ordonnance du 5 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2022 dans la requête n° 2101208. Par ordonnance du 1er juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2022 dans la requête n° 2103135. Vu l'ordonnance n° 2103139 du 23 septembre 2021 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans. Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B, - les conclusions de Mme Best-De Gand, rapporteure publique, - et les observations de Me Castagnoli représentant M. C, et de Me Béguin, représentant la commune d'Orléans.

Considérant ce qui suit

: 1. Employé depuis 2017 par la collectivité Orléans Métropole, M. A C, adjoint technique territorial, a été muté au sein de la commune d'Orléans à compter du 1er octobre 2019, sur le poste de référent des équipements sportifs pour le secteur Nord de la commune. Le 18 novembre 2020, il a déposé plainte pour harcèlement moral à l'encontre de son supérieur hiérarchique direct et a ensuite demandé le bénéfice de la protection fonctionnelle. Le 14 décembre 2020, son supérieur hiérarchique direct ainsi que deux autres de ses supérieurs ont également sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral commis par M. C à leur encontre. La commune a alors diligenté une enquête administrative à la suite de laquelle le maire de la commune d'Orléans a suspendu temporairement M. C de ses fonctions, par arrêté du 19 mars 2021 dont il demande l'annulation par la requête n° 2101208. Après saisine du conseil de discipline qui a rendu un avis favorable, le maire d'Orléans a décidé de licencier M. C pour insuffisance professionnelle, par arrêté du 15 juillet 2021 dont il demande l'annulation par la requête n° 2103135. 2. Les requêtes n° 2101208 et n° 2103135 concernent la situation d'un même fonctionnaire et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement. Sur la légalité de l'arrêté du 19 mars 2021 : 3. En premier lieu, le requérant soutient que l'arrêté le suspendant de ses fonctions est entaché d'un vice de procédure car il n'a pas eu communication préalable de l'arrêté et n'a pas pu se faire assister d'un avocat ou d'un représentant du personnel lors de sa notification. Toutefois, le requérant ne peut utilement se prévaloir des garanties propres à la procédure disciplinaire, la suspension d'un agent public, prise dans l'intérêt du service n'étant qu'une mesure conservatoire sans caractère disciplinaire, qui n'a pas à être précédée du respect de ces garanties. Dès lors, le moyen doit être écarté comme inopérant. 4. En deuxième lieu, le requérant soutient que l'enquête administrative diligentée par la commune a été réalisée à charge, en conséquence de sa plainte pour harcèlement moral déposée contre son supérieur hiérarchique, ainsi qu'en raison de ses absences pourtant justifiées, notamment par des congés maladie et la situation sanitaire, tandis que la suppression de son poste était de toute façon actée dans le cadre d'un projet de réorganisation du service de la vie sportive. Il fait également valoir qu'un certain nombre de témoignages recueillis dans le cadre de l'enquête administrative se bornent à relater des propos de personnes qui ne le connaissent pas personnellement ou qui n'ont jamais été personnellement témoins des faits allégués et que l'enquête se fonde principalement sur les témoignages partiaux de trois agents et sur des rumeurs non étayées. 5. Toutefois, la mesure provisoire de suspension peut légalement être prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant, sans qu'il soit nécessaire qu'ils soient formellement établis. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que le requérant s'est non seulement vu reprocher par son employeur, pendant ses trois mois de présence cumulée entre la date de sa nomination et la date de sa suspension, la non-réalisation des tâches confiées dans les délais impartis, la qualité insuffisante de ses tâches, en particulier d'entretien mais également le dénigrement de sa hiérarchie devant ses collègues de travail ainsi que des critiques relatives à l'organisation du service. Il ressort également des pièces du dossier que lui sont également reprochés une absence d'esprit d'équipe, la diffusion de rumeurs, le non-respect de la limite entre la sphère professionnelle et la sphère personnelle ainsi qu'une posture tendant à refuser les remarques qui lui sont faites. Ces griefs présentent, au vu des pièces versées au dossier, un caractère de vraisemblance suffisant. Dès lors, le moyen tiré de l'absence d'établissement par la commune de griefs clairement et objectivement établis doit être écarté ainsi que, en tout état de cause, le moyen tiré de l'absence de période suffisante pour évaluer ses manquements. 6. En dernier lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le requérant a été victime d'un détournement de pouvoir de la part de la commune. Par suite, le moyen doit être également écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions du requérant à fin d'annulation de l'arrêté le suspendant de ses fonctions doivent être rejetées. Sur la légalité de l'arrêté du 15 juillet 2021 : 8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. () ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 9. Contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté litigieux comporte les considérations de droit et de fait de nature à justifier le licenciement prononcé et est, par suite, suffisamment motivé. Dès lors, le moyen doit être écarté. 10. En second lieu, aux termes de l'article 93 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans la version applicable au litige : " Le licenciement pour insuffisance professionnelle est prononcé après observation de la procédure prévue en matière disciplinaire. Le fonctionnaire licencié pour insuffisance professionnelle peut recevoir une indemnité dans des conditions qui sont fixées par décret ". 11. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions correspondant à son grade, s'agissant d'un fonctionnaire, et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Lorsque la manière de servir d'un fonctionnaire exerçant des fonctions qui ne correspondent pas à son grade le justifie, il appartient à l'administration de mettre fin à ses fonctions. Une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé de nouvelles fonctions correspondant à son grade durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ces fonctions peut, alors, être de nature à justifier légalement son licenciement. 12. Il ressort des pièces du dossier et en particulier de sa fiche de poste que le requérant s'est vu confier, sous la direction du responsable des équipements sportifs du secteur Nord, les fonctions de référent d'équipements sportifs consistant tout d'abord à apporter son expertise technique à l'équipe constituée d'une dizaine de personnes pour, notamment, exécuter les missions quotidiennes d'un agent d'équipement mais aussi améliorer la qualité de l'entretien ménager des équipements, participer au développement de la qualité des pratiques professionnelles de l'équipe, veiller au bon état de fonctionnement du matériel et mobilier sportif et proposer des améliorations du service rendu aux usagers. Ses missions principales incluent également la coordination des activités soit, d'une part, la coordination de l'activité de l'équipe même, d'autre part, la mission de faire appliquer les priorités, de rendre compte des problématiques et de proposer des solutions en tant que relai du responsable hiérarchique, ainsi que de gérer les ressources matérielles telles que la gestion des stocks, la centralisation des besoins des agents et le suivi et l'entretien régulier du matériel. Il ressort également de cette fiche de poste que sont attendues des compétences en terme de savoir-faire telles que la maîtrise des techniques de nettoyage des différentes surfaces sportives, la maîtrise et l'application des règles d'hygiène, une aptitude à l'encadrement ainsi qu'en terme de savoir-être telles que des aptitudes relationnelles et de la discrétion. 13. Le requérant soutient tout d'abord que la plupart des griefs reprochés ne sont pas clairement ni objectivement établis. Néanmoins, il ressort des nombreuses pièces versées au dossier et, notamment, d'une part, des différents comptes-rendus réalisés par son supérieur hiérarchique, au demeurant non sérieusement contestés et par ailleurs étayés par d'autres témoignages ou des photos, d'autre part, des constats de son second supérieur hiérarchique, proche de la retraite et aguerri au management, qu'il n'a pas réalisé dans les délais impartis les tâches qui lui avaient été confiées et que les tâches d'entretien ménager dont il avait la charge n'étaient pas réalisées de manière consciencieuse. Il ressort en outre des pièces du dossier qu'il ne respectait pas les consignes données et qu'il a témoigné d'un manque général de motivation. Il ressort de plus de l'enquête administrative diligentée par la commune à la suite de son dépôt de plainte pour harcèlement moral au cours de laquelle 25 personnes ont été auditionnées dont ses collègues et supérieurs hiérarchiques et dont il n'est nullement établi qu'elle ait été menée à charge comme il le prétend, que le requérant a adopté une posture professionnelle totalement inadéquate vis-à-vis de ses collègues et de sa hiérarchie, contribuant ainsi à dégrader l'ambiance régnant au sein du service. A ce titre, il ressort des témoignages concordants qu'il a non seulement colporté des rumeurs et dénigré à de multiples reprises la hiérarchie devant son équipe, mais aussi menacé son supérieur hiérarchique direct devant des usagers des équipements, sans par ailleurs accepter les remarques constructives qui lui étaient faites et adopter un esprit d'équipe. Ces différents manquements ont fait l'objet d'un bilan intermédiaire lors d'un entretien le 15 juin 2020, dont il est établi qu'il a bien eu lieu contrairement à ce que le requérant prétend, en présence de la directrice du service, de la cheffe de service et du responsable de secteur, relaté dans un compte-rendu de la cheffe du service qu'il a signé le 30 juin 2020 et qu'il a annoté en indiquant qu'il était encore en plein apprentissage s'agissant des tâches d'entretien. 14. S'il soutient toutefois que le temps pendant lequel il a été réellement en activité ne lui a pas permis de maîtriser pleinement ses missions techniques, notamment l'entretien ménager, il ressort des pièces du dossier que ces tâches ne nécessitaient pas de compétence technique particulière tandis qu'il maîtrisait, selon son curriculum vitae, une expérience de conduite d'auto-laveuse et d'entretien des équipements sportifs et qu'il a fait l'objet d'un accompagnement lors de la prise de ses fonctions, notamment de son supérieur hiérarchique direct. S'il soutient par ailleurs que ses fonctions d'encadrement ne relevaient pas de son grade mais du grade d'agent de maîtrise, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il en a réussi l'examen professionnel en 2019 tandis que les reproches qui lui ont été adressés n'avaient pas trait à ses missions d'encadrement. Si le requérant soutient enfin que la période pendant laquelle il a été réellement en fonction était insuffisante pour juger de ses capacités professionnelles, comme en témoigne le fait qu'il n'a été évalué ni pour l'année 2019, ni pour l'année 2020, il ressort toutefois des pièces du dossier que cette période a été suffisante pour établir les éléments propres à caractériser une insuffisance professionnelle, l'absence d'évaluation professionnelle pendant ces deux années tenant aux circonstances particulières dans lesquelles celles-ci se sont déroulées le concernant. 15. En troisième lieu, et alors qu'il a été dit au point précédent que les éléments révélant une insuffisance professionnelle sont établis, le moyen tiré de ce que le requérant a été victime d'une sanction déguisée ne peut qu'être écarté. En tout état de cause, la circonstance que certains des faits retenus seraient susceptibles de revêtir une qualification disciplinaire, comme l'a un temps envisagé sa supérieure hiérarchique, n'est pas par elle-même de nature à entacher cette décision d'illégalité. 16. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas établi que la décision attaquée ait été entachée de détournement de pouvoir lié au projet de réorganisation du service conduisant à la suppression d'un poste de référent sur trois, au demeurant décidé avant l'enquête administrative diligentée suite à sa plainte du 18 novembre 2020 mais également au dépôt le 14 décembre 2020 de certains de ses supérieurs de demandes de protection fonctionnelle. 17. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Orléans, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens dans les deux requêtes. 19. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune d'Orléans dans la requête n° 2103135 présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 2101208 et n° 2103135 sont rejetées. Article 2 : Les conclusions de la commune d'Orléans présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans la requête n° 2103135 sont rejetées. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A C et à la commune d'Orléans. Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Lefebvre-Soppelsa, présidente, Mme Vincent, première conseillère, M. Joos, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022. La rapporteure, Laurence B La présidente, Anne LEFEBVRE-SOPPELSALa greffière, Lucie BARRUET La République mande et ordonne à la préfète du Loiret en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Nos 2101208

Commentaires sur cette affaire

Pas encore de commentaires pour cette décision.